2- Ce jour où le monde a basculé

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           Je m'en souviens comme si c'était hier. Je me trouvais avec mes sœurs, chacune sur nos écrans. Nous étions hypnotisées lorsque des coups de feu retentirent dehors. Nous croyions alors que ce n'était que des feux d'artifice. Nous nous étions donc rendu sur la grande place là où nous aurions eu une meilleure vue pour ce spectacle. Et en effet, nous avons vu un spectacle, mais pas celui que l'on pensait... Sur la place, des militaires américains tiraient sur les quelques personnes essayant de s'enfuir. Le sol était couvert de sang et de corps. À peine vis-je cette scène que je pris dans mes bras les 3 petites filles m'accompagnant et je courus le plus vite possible. Par chance, les soldats ne m'avaient pas remarqué, trop occupé à tuer des innocents. Sur le chemin, je trébuchais mainte et mainte fois mais je ne m'arrêtais pas. Mes forces me quittaient, des crampes apparaissaient, mes pieds  et mes jambes me faisaient souffrir, cependant, je n'avais pas le droit de stopper ma course. Arrivée à la maison, je fermais tout à clé, criais à ma mère de lancer les infos et à mon beau-père de s'occuper des filles. La télévision affichait des scènes tout aussi horribles voire pire que celle que l'on avait vu. Ces attentats ne ciblaient pas seulement notre petit village, mais tout le monde entier. Personne ne l'avait vu venir. L'Amérique qui était notre allié depuis si longtemps avait décidé de retourner sa veste et de conquérir le monde. J'entendis ma mère pleurer, mes sœurs, effrayées, s'étaient réfugiées dans ses bras. Et moi, je restais stoïque, je n'avais pas le droit d'être faible, je devais me montrer forte. Je ne voulais pas leur transmettre ma terreur, mon appréhension et surtout, je voulais qu'elles se montrent courageuses, car on allait devoir se battre pour survivre et il fallait qu'elles soient fortes.

        Les premiers jours, on se préparait à affronter le monde, on se rationnait afin de ne pas manquer de nourriture. Nous préparions nos affaires pour pouvoir partir à tout moment de la maison. Régulièrement, des coups de feu se faisaient entendre. Dans ces moments, je tentais de faire diversion pour que mes soeurs n'aient pas peur... ou bien pour me convaincre que ce n'était pas réel. Cinq jours après les premiers attentats, la télévision se coupa, les téléphones, les ordinateurs, l'électricité, tout avait était coupé. Tout. Seul restait la radio, mais toutes les fréquences étaient brouillées. On restait donc chez nous enfermés, terrifiés. Un jour, la radio émit un grésillement, puis on pu entendre un message qui nous amena de l'espoir. L'espoir de pouvoir s'en sortir ! "Cher compatri... gardez espoir... Rendez-vous... Russie... territo... protecti..." ce message se répétait en boucle et rapidement on arrivait à la conclusion qu'il fallait nous y rendre, de toute façon nous n'avions pas le choix. Cependant, nous ne pouvions partir sans nos proches, amis, famille et donc nous nous décidions à faire quelques détours afin de les prévenir.

       Une heure plus tard, nous étions dans la voiture chargée de tout ce qui nous serait utile. On passait d'abord par la maison de mon père, mais, ils étaient déjà parti laissant derrière eux un mot "Parti vers la liberté. Retrouve-nous y. Bisous". Au moins avaient-ils laissé un mot... Je récupérais quelques affaires puis rejoignis ma famille dans la voiture. Et nous repartions. Cette fois, nous prenions le chemin pour aller chez mon petit copain. L'homme que j'aimais. Arrivés devant sa maison, je me précipitais à la porte et la martelais de mes poings. Lorsque la porte s'ouvrit, je fus reçu par son père qui tenait un poignard dans sa main. Lorsqu'il me vit, il le baissa et m'invita à rentrer. Il appela Romain qui descendit si rapidement que l'on aurait dit qu'il venait de se transporter. Il m'embrassa et me serra contre lui. Je lui expliquais alors la situation et lui demandait de venir avec nous, lui et son père. Ils acceptèrent et firent leurs affaires aussi rapidement qu'ils purent. Ils mirent leurs bagages dans leur voiture et nous suivirent sur la route.

   Cependant, il y avait une chose que nous n'avions pas prévue. Les américains se cachaient partout et bloquaient les routes. Ils nous prirent par surprise sur l'autoroute alors que nous venions de dépasser Carcassonne après plus d'une heure de trajet. On fut obligé de s'arrêter, ils crevèrent nos roues et firent glisser leurs armes le long des voitures. Les filles hurlaient et pleuraient. Ma mère fermait les yeux et essayait tant bien que mal de les rassurer. Mon cœur battait à tout rompre. Je regardais Romain et vis son regard fixer au loin. Je suivais son regard et m'aperçus qu'il y avait du mouvement. Soudain, une dizaine de soldats français vinrent à notre rescousse. Un soldat s'écroula sur notre voiture. Un autre tenta de rentrer dedans mais les portes étant fermées, il essaya de briser la vitre. Ce fut un massacre. Alors que les uns se battaient aux poignards, les autres avaient des fusils. À la fin, il ne restait plus que trois soldats français qui nous proposèrent de rejoindre leur groupe qui se rendait en Russie. Nous n'avions pas vraiment le choix donc nous acceptions. On rejoignit alors un groupe regroupant quelques centaines de personnes. Des charrues et des chevaux aidaient à transporter les personnes plus faibles et les provisions.

     Les jours passèrent. Tous semblables. Le matin on se réveillait dès que le soleil apparaissait et on marchait. Toutes les heures nous avions le droit à cinq minutes de pause. Le midi nous avions une heure avant de repartir. Des combats avaient lieu tous les jours. On perdait des soldats et des civils, mais on en récupérait plus que ce que l'on avait perdu. Le soir, des tentes étaient installées. On dut rapidement diviser le groupe en plusieurs pour avancer plus discrètement. Je fus séparée de ma famille, malgré mes protestations, mais je restais avec Romain. Notre progression était longue car nous devions sans cesse faire des détours. Je m'inquiétais pour ma famille mais je les savais protégée par les soldats et de plus, elles étaient dans le groupe qui avait les charrues et les chevaux. J'étais persuadée qu'elles s'en sortiraient.

    Blottie dans les bras de Romain, je m'endormais paisiblement. Cela faisait quatre mois que nous marchions. Certains perdaient patience. Mais nous, nous gardions espoir de voir des jours meilleurs. Un soir, paisiblement allongé dans notre tente on entendit des cris. On sortit de nos tentes et on vit au loin une centaine de soldats américains s'élancer à toute allure vers nous. Ce fut la panique générale. Nos soldats nous poussèrent à courir. Nous courrions le plus vite possible et nous engagions dans une forêt. Nous n'y voyons presque rien, mais poussé par l'adrénaline, nous arrivions tant bien que mal à semer l'ennemi. Nous étions entourés par les néants. Impossible de savoir où se trouvait l'ennemi. Je fis une erreur. Je trébuchais et tombais sur le côté. Je croisai une dernière fois le regard de Romain et fus entourée par le néant. J'entendis mon nom puis plus rien. Je sentis mon corps se heurter à quelque chose de dure, je sentis le froid s'emparer de mon corps. La fatigue m'envahit et je sombrais dans le monde des limbes.

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⏰ Dernière mise à jour : Jul 26, 2021 ⏰

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