18/02, 03h33 .

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Dans le couloir du dortoir n°3 de la vieille et défraîchie résidence d'etudiants, on pouvait percevoir au milieu des sifflements du petit groupe électrogène stationné à l'extérieur, des bruits de pas, tapotant avec mesure le palier du sol. À mieux y regarder, une silhouette masculine se dessinait alors, masquée dans une obscurité totale. C'était un homme d'allure vive, agile et robuste.
Cependant, l'homme semblait boiter, et au cours de son trajet jusqu'au rez-de-chaussée, il balbutia minte fois.

Une fois parvenu à la porte d'entrée du bâtiment, dans un élan qu'on pourrait qualifier d'ultime, le mystérieux visiteur rassembla toutes ses forces et s'engagea dans un sprint remarquable sur plusieurs centaines de mètres, sous le regard intense et impuissant du clair de lune. L'homme disparu alors, incognito.

Peu après, aux alentours de 5h45, les premiers passants ébahis, constataient avec effroi les traces manifestes de sang laissées depuis le seuil d'une porte fermée, jusqu'à la fontaine universitaire. Ne pouvant alors determiner la destination finale du fuyard ensanglanté, une masse de curieux et de détectives du dimanche s'était alors cloîtrée aux abords de l'immeuble, tandis que le directeur de l'université, accompagné de trois agents de sécurité quadrillaient et tentaient de s'introduire à l'intérieur de l'appartement duquel des traces de pas ensanglantés débutaient.

"paaaaaaafffffff"

Le verrou de la porte éclata et le morceau de bois qui subsistait vola sous la violence d'un coup de pieds, asséné par l'un des gardes. À l'intérieur de la pièce, une inhabituelle et repoussante odeur se faisait ressentir. À deviner, on aurait pensé à de la viande fraîche, abandonnée sur un brasier depuis trop longtemps. Pourtant, fait surprenant, il n'y avait aucune trace de fumée sur les lieux et plus frappant encore, hors mis les traces de pas ensanglantés sur le sol du logis, et quelques éclaboussures ça et là de sang, il n'y avait aucun signe d'intrusion dans cette chambre, ni même de macabé. Un petit lit dressé de draps blancs, était à peine dérangé et un petit aquarium disposé en dessous de la petite fenêtre, nous faisait directement penser que le résident de cette chambre d'étudiant anormalement sobre et inanimée devait drôlement aimer les animaux, au point de n'avoir pour seul compagnon et source de distraction, un petit poisson rouge.

C'est alors que l'un des agents, survolté par l'invraisemblabilité des faits, comme dans une tentative désespérée d'élucider l'énigme, ouvrit la porte des toilettes sans concession.

À ce moment précis, tout se précisa. Il n'y avait plus aucun doute envisageable sur l'horreur et la barbarie du crime.
Dans cette petite douche sans fenêtre, un cadavre mutilé, dégradé, gisait inerte sur le sol, au milieu d'une scène de film d'extrême épouvante. Un sèche-cheveux, encore branché à une prise d'électricité, brûlait ce qui apparaissait comme une poitrine féminine mutilée (d'où évidemment, l'odeur de steak grillé abandonné entre les flammes). L'un des hommes s'élança au dessus du cadavre et débrancha immédiatement l'appareil électrique en s'écriant "D'où Jésus !". Les vêtements de la jeune femme étaient en lambots, son corps dénudé portait des plaîts qui semblaient être des morsures d'un fauve, ou alors d'un homme dénué d'une quelconque humanité. De la cheville, en passant par le clitoris jusqu'au coup, les marques se succédaient, et des morceaux d'une peau presque écorchée, manquaient parfois. Sa tête enfin, était maintenue bien haute par ses longs cheveux noirs, attachés à une barre de sèche-linge fixée sur le mur. Et dans ses petits yeux grands ouverts, rougis, se lisait les dernières pensées d'un être abattu et supplicié.

Directeur et agents de sécurité, tous étaient choqués devant le degré de sadisme du crime et imaginaient très bien la folie du criminel, toujours dans la nature. Si bien que, après une minute seulement d'inspection, le vieux directeur d'une soixantaine d'années éteignit la lumière de la toilette et referma brusquement la porte, prétextant qu'il fallait attendre l'arrivée de la police et préserver la scène de crime intacte.
Ils sortirent de la pièce et deux des loubards se dressèrent devant l'entrée sous les ordres du vieux monsieur.

À cette heure matinale de la journée, la police alertée, n'allait plus tarder à débarquer.

Ange ou démon.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant