Que le carnage commence !

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Les filles sont installées sur les sièges avant, palabrant posément et tournant la tête de temps à autre pour nous observer, contrairement à nous les garçons qui sommes très bruyants ; nous ne cessons de pousser des cris d’animaux et de faire des blagues idiotes qui nous font hurler de rire. La route est certes longue mais on s’amuse néanmoins. Du moins, les autres, parce que je n’ai pas ouvert la bouche depuis que nous avons pris la route.
À l’extrême gauche du véhicule, est assis Benson ; un garçon grassouillet avec une tête de gentil bouledogue hérissé de cheveux noirs coupés courts. Il est plutôt silencieux avec une très grande corpulence, très timide, le genre à se faire piétiner par tous. Le larbin du groupe quoi. Je m’approche de lui, afin de discuter ; on lui fait tellement de mauvaises blagues à l’amphi qu’il ne parle plus avec nous, sauf par nécessité.
— Salut Benson.
— Salut, répond-il timidement avec surprise.
— Tu n’as pas l’air dans ton assiette, on dirait ; ça ne t'enchante pas d’aller dans ce centre de recherche ? C’est comme aller dans un camp de vacances, tu sais ?
Il me lorgne dramatiquement quelques secondes et ne pipe mot. Je me sens mal à l’aise et au moment de me lever, il me demande de m'assoir à nouveau.
— Dis-moi Jimmy : pourquoi vous vous moquez tout le temps de moi ? Pourquoi les gens me regardent toujours bizarrement ? me demande-t-il. Si j’ai fait du mal à qui que ce soit d’entre vous dis-le-moi. Nos camarades me regardent toujours étrangement ; j’ai tellement peur au final. Je ne marche jamais le cœur en paix, je me sens tout le temps marché dessus comme si je rampais. Je suis un être humain comme vous, Jimmy ; est-ce à cause de ma corpulence ? Je suis ce que MK et sa bande appellent un obèse en surpoids ; ils se moquent de moi et de ma démarche cinq fois sur six, à chaque rentrée du campus, j’ai l’impression que le monde s’écroule ; les regards sont durs et froids alors je baisse constamment le mien, je vise les murs, mais au final, je me dis qu’ils n’ont pas tort de le faire. Je suis le parfait clown, gras comme une truie en gestation. Des fois j’ai tellement mal intérieurement au point de ne plus sentir les coups de poing de Karis lorsqu’il tire le bouchon trop haut en me frappant. C’est fou la façon dont les gens nous poussent à devenir fou.
Je garde le silence et me contente de baisser le regard, ne sachant quoi lui dire ; vu que je fais partie de ces brutes qui l’humilient souvent à l’amphi. La honte et la culpabilité me submergent presque.
— Je ne sais pas trop quoi dire Benson.
— C’est mieux ainsi ; mais une chose que vous devez savoir Jimmy : tout ce que nous faisons finit toujours par nous rattraper ; tout à un revers. Nous pouvons choisir de laisser le bon Dieu châtier ceux qui nous font du mal comme nous pouvons le faire nous-mêmes. Il suffit juste d’attendre le bon moment et le bon endroit ainsi que la bonne occasion ; généralement ça vient quand on s’y attend le moins. Aujourd’hui vos regards sont des coups de poignards mais peut-être que demain ça sera l’inverse ; ils seront au bout d’un poignard.
— Qu’est-ce que tu veux dire par « bon moment et bon endroit » Benson ? lui demandé-je, totalement inquiet par ses propos.
— Rien d’important Jimmy ; s’il te plaît, retourne à ta place maintenant que je dorme un peu, le voyage devient très fatigant.
Les paroles de Benson ont quelque chose de contagieux qui me mettent mal à l’aise ; je retourne à ma place sans perde de temps.
— Hé Jimmy, m’interpelle-t-il.
— Quoi ?!
— Tu ne m’as pas pris au sérieux j’espère ? C’était juste des paroles en l’air ; afin de faire la causette quoi, me dit-il  d’une voix sarcastique.
Je reviens à ma place afin d’observer les autres faire les pitres de cirque. Je sens monter une espèce de vague mélancolique à mon âme âpre avoir laissé Benson. Devant moi, sont assis les animateurs principaux de l’autocar ; il s’agit d’un grand noir aux cheveux longs teintés de blanc appelé Karis : les yeux dissimulés derrière des Ray-ban noires, il joue les dures à cuire dénouant et renouant indéfiniment le foulard qui lui serre le front, et le mannequin aux yeux bruns de tout à l’heure : MK, qui passe la plupart du temps à se vanter de ses connaissances sur la nature et les animaux en faisant des grimaces, surtout quand les filles se retournent. Il n’a pas arrêté de se lancer des fleurs depuis que l’autocar a démarré. Son but est visiblement d’attirer l’attention des filles sur lui ; vous parler d’un vantard oui ! Et je ne vous parle pas de ses réflexions. Et comme s’il ne m’avait pas encore assez énervé, il entame la conversation avec Nairobi, une eurasienne aux cheveux très longs et blonds avec qui j’entretiens une relation intime.
— Hé ! Nairobi, comment trouves-tu le voyage ? Il n’est pas ennuyeux au moins, dis ? demande-t-il.
Elle prélude par l’ignorer puis, se retourne au bout d’une vingtaine de secondes :
— Oui ! affirme-t-elle sèchement.
— C’est quoi ton problème gros macho ! Épargnes-nous de tes conneries ! scandale Diane, la deuxième amie intime de Nairobi après Elsa.
Pour la petite histoire, c’est la seule redoublante de notre classe en fait. L’année dernière, elle passait les trois quarts de son temps à organiser des soirées chez elle ; au final, elle n’a validé aucune matière et s’est retrouvée toute seule avec nous.
— Hééé, ça alors. Excuse-moi de te poser cette question Diane mais dis ? C’est de cette façon que tu répondais à tes anciens camarades qui sont maintenant en deuxième année ou c’est juste que tu en as marre de voir cette route ? rétorque MK avec un peu de sarcasme, et le groupe de garçons éclate de rire évidemment.
— Tu n’es décidément pas plus sage qu’un débile mental MK ! scandale-t-elle.
— Oui c’est ça ; madame Tavoshky, tonne-t-il avec son même sarcasme.
Madame Tavoshky c’est une cuisinière de notre faculté ; chaque fois qu'on la croise au campus ou au réfectoire, on a droit à sa petite histoire selon laquelle nous devons arrêter les distractions inutiles dont la drogue, le sexe, la boisson, les fêtes et nous concentrer uniquement sur  nos études car c’est à cause de ces distractions qu’elle n’a pas pu réussir son baccalauréat trois années de suite et s’est  retrouvée au poste de cuisinière pour jeunes délinquants dans une faculté... évidemment l’autocar retombe dans un nid-de-poule nous projetant les uns sur les autres, ce qui fait redoubler les hurlements.
— Hé Jimmy regarde par-là ! s’écrit soudainement Bénash en pointant du doigt le paysage.
Il a l’air ahuri, pourtant il riait des blagues de MK il y a quelques secondes ; ce qui me rend un peu inquiet.
— Il me semble avoir vu une chose là derrière, on aurait dit un homme estropié avec du sang sur son visage, étalé par terre. Je l’ai bien vu je t’assure ! Sa peau était verdoyante parcourue d’un épais trait hideux.
— N’importe quoi. Qu’est que tu racontes Bénash.
— Je suis sérieux Jimmy ; je t’assure que j’ai vu un homme-là par terre. Je ne suis pas paranoïaque quand même.
— Ah, tu crois ?
— Oui !
Je me retourne et fouille des yeux les bouquets d'arbres et les rochers mais je ne remarque pas l’ombre d’un homme meurtri au sol.
— Je n’ai rien vu Bénash. Tu devrais dormir si tu es fatigué.
— Il a certainement disparu derrière les rochers. Bon dis-moi, toi tu as vu quoi quand tu t’es retourné ? Tu n’as pas vu quelque chose de ce genre ?
— Non. Je viens de te dire que je n’ai rien remarqué. Si ce n’est la forêt avec ses arbres et ses rochers.
L’expression de son visage montre explicitement qu’il est très inquiet, comme si son âme était parcourue par un odieux pressentiment. Il baisse la tête et prend le temps de bien réfléchir et revient à moi :
— Je pensais que l’IRAD devait être à proximité d’une ville !
— Je ne pense pas Bénash. Diane m’avait fait comprendre un jour au campus que cet institut est loin de la circulation, au milieu d’un vaste champ de culture.
Il garde son regard sur moi et reste silencieux un moment. Ce qui m’intrigue davantage.
— Mais alors, si on veut avoir des nouvelles de nos parents ou d’un ami, comment allons-nous faire ? Vu qu’on nous a recommandé de ne venir avec aucun appareil électronique hormis nos ordinateurs ? Le Dr avait même ajouté qu’il n’y aura pas de connexion internet non plus.
— Il y en aura certainement dans ce chalet ; l’IRAD c’est un très grand institut et je crois que les ingénieurs qui y travaillent ont chacun au moins deux téléphones. De plus j’ai aperçu le Dr avec le sien. Hé calmes-toi mec ! On nous a tout expliqué au campus. Tu étais assis près de moi lors du briefing vieux. C’est un voyage de deux jours uniquement.
— Je ne sais pas pour toi Jimmy mais ce voyage n’a rien de rassurant. D’ailleurs je ne sais même pas comment j’ai fait pour me retrouver ici. J’ai un mauvais pressentiment.
Mon ami est un garçon à l’esprit droit, exact, mais peu soudain, s'ouvrant avec difficulté. Ses intuitions sont pour la plupart du temps vraies.
Soudain, deux garçons derrière nous, Stephler l’anglophone qui ne s’exprime pas très bien en français et Daniel, entament une chanson connue de tous mais en transformant les paroles à leur manière. Inutile de préciser que leur manière est quelque peu grossière. Les autres s’amusent à reprendre le refrain à chaque fois. Promptement, l’autocar stoppe dans un horrible grincement de freins, ce qui me projette violemment contre le siège de devant.
— Aïe ! hurlé-je.
Le chauffeur  ôte ses deux mains du volant et se lève lentement, un cri d’horreur nous échappe quand il tourne vers nous son visage. Sa tête est devenue énorme, sa peau est verdoyante parcourue d'un épais trait hideux. Ses yeux sont jaunes, d’un jaune vif on dirait la lune, avec des crocs luisants qui pointent sous sa lèvre retroussée. Dans l’échange de silence qui suit le hurlement d'effroi, le chauffeur renverse en arrière sa tête monstrueuse émettant une sorte de long feulement suivi d’un affreux cri inhumain. L’horrible cri résonant encore dans mes oreilles, je plonge par terre dans le but de me dissimuler derrière les sièges devant moi. Bénash se couche aussi tôt sur moi, tremblant comme une tondeuse à gazon. Je l’entends me chuchoter à l’oreille :
— Mais putain c’est quoi ce délire ! Le…le chauffeur s’est transformé en…
Quelques secondes après la remarque intrigante de Bénash, un rire triomphant éclate alors dans l’autocar. Je suis étonné d’entendre des gens rire au l’éclat à la vue d’un monstre pareil. Je risque donc un coup d’œil prudent, juste à temps pour voir notre chauffeur empoigner de deux mains l’espèce de tignasse verdâtre qui lui couvre le crâne, et retirer d’un geste brusque le caoutchouc dont il s’était affublé. En dessous, il y a son visage tout à fait normal avec un sourire carnassier.
— Haha ha, se moque Diane. Ça marche à tous les coups ! Vous y avez cru bande de peureux. Regardez MK celui qui aime se prendre la tête, il est mort de peur.
Quelques-uns d’entre nous se mettent à rire, mais, bon nombre sont encore sous le choc, ne s’en remettant pas encore de la blague qu’ils ne trouvent évidemment pas drôle. Je ne comprends pas encore ce qui se passe quand le chauffeur prend un air sérieux et vocifère à haute voix :
— Terminus ! Tout le monde descend !
Les portes s’ouvrent automatiquement en chuintant. Nous sortons nonchalamment et les mêmes questions s’échappent de nos bouches.
« Où sommes-nous ? C’est quoi cet endroit ?  Nous sommes arrivés ? Il est où l’institut de recherche ? »
Le chauffeur ne nous prête aucune attention mais, met la pression à ceux qui se trouvent encore dans l’autocar pour qu’ils se dépêchent de sortir. Dr Youta sort à son tour et brandit un téléphone à son oreille avant de s’aventurer dans les bois, d’où nous l’entendons animer une conversation corsée de rire et de suspense : avec qui ? Nous ne savons pas. Le regard des autres me fait comprendre qu’ils s’imaginent des choses les plus horribles. Je soulève la tête, le soleil me fait plisser des yeux tant sa lueur est vive. Autour de nous, il n’y a que des arbres de grande taille à perte de vue, tellement élancés qu’on se croirait dans un décor de film reîtres. Le mauvais pressentiment de Bénash était apparemment contagieux. Par ailleurs, je ne comprends pas pourquoi les gens s’inquiètent autant. Nous sommes avec deux responsables de l’établissement et ils savent très bien ce qu’ils font.
— Pourquoi nous faites-vous descendre ici ? demande Nairobi au chauffeur.
— Quoi ? Tu ne trouves pas que c’est un joli coin pour le travail ? réponds MK en descendant de l’autocar.
— Désolé mais c’est au chauffeur que je m’adresse, pas à toi.
— Tu sais, c’est tout à fait normal que tu aies peur mais, je pense que tu devrais arrêter de te faire des cheveux blancs. Tu ne crains rien tant que je suis là.
— Tu es sourd ou quoi ! Ce n’est pas à toi que je m'adresse, ajoute-t-elle en s’éclipsant de lui.
— Nous devons être à un point de rencontre ou quelque chose du genre, émet Joberno.
— Un point de rencontre ? Depuis quand on fixe un rendez-vous avec des jeunes en pleine forêt ? Nous ne sommes pas dans un film de Stephen King si ?! Le Dr n’a jamais signalé ce détail, réplique Vanek.
— Arrêtons de nous inquiéter inutilement. Le professeur nous expliquera certainement la situation après avoir fini de téléphoner ; vu que le chauffeur fait le muet, les rassuré-je.
Les secondes s'épuisent, les minutes aussi et notre professeur est toujours au téléphone, attisant en nous la flamme d’une émotion qu’on aurait préféré ne pas ressentir.
— Où sommes-nous bon sang ?! Pourquoi personne ne nous répond ! Monsieur ! Monsieur ! scandale nerveusement Linda.
Le professeur l’entend gindre, se retourne, fait quelques pas en avant et fait signe de la main pour nous demander de patienter. Le chauffeur retire du fond de la soute le reste de notre équipement de travail et ne prête pas la moindre attention aux questions qui fusent.
— Vous parlez français monsieur ? persiste Linda.
L’homme ne lui prête aucune attention et continue de vider les soutes. Elle revient vers moi l'air ahuri, les sourcils froncés. Personnellement, je trouve bien cet endroit bizarre par rapport à ce qu’on nous avait laissé imaginer mais je ne me sens nullement inquiet. Le chauffeur continue de nous ignorer, il est confiant et a l’air de savoir ce qu’il fait.
— Pourquoi est-ce que ce mec ne veut pas nous répondre ? me demande Linda. D’où sort’il d'ailleurs ? Je ne l’ai jamais vu au campus.
Son angoisse commence à avoir quelque chose d’épidémique qui me met mal à l’aise. Je la laisse ruminer toute seule et cherche Nairobi des yeux ; un court instant, l’éclatant innocence de son regard d’ange rencontre le mien, et ni les arbres, ni les bouquets d’herbes ne savent comment se tenir face à ce déferlement d’amour qu’un seul regard a entrainé. Je me dirige alors vers elle, me voyant arriver, elle sourit et passe derrière l’oreille, ses longs cheveux blonds qui pendent. J’ai de la chance d’avoir une fille aussi belle comme petite amie. La personne qui avait façonné son visage avait atteint un tel niveau de perfection que s’en est inquiétant.
— Comment tu vas princesse ?
— Hormis les frissons que cet endroit glauque sans aucune lueur d’élégance me procure, tout vas pour le mieux, merci. Et s’il te plaît Jimmy : arrête de m’appeler ainsi, dit-elle en feignant un air colérique.
— Tu ne serais pas fâchée contre moi par hasard ?
— Ça te surprendrait si ma réponse est positive ? Je suis au courant de tout ce qui se dit à ton sujet je te rappelle. Et ton silence dans l’autocar depuis le début du voyage montre bien que c’est vrai.
Je grince des dents et commence à me justifier quand deux de ses amies, Emma et Elsa se joignent à nous.
— Dis Jimmy, c’est quoi cette histoire qui court à ton sujet dans tout le campus ? me demande Elsa. C’est par ta faute qu’on a remplacé la doctorante qui nous dispensait les cours de travaux pratiques. On vous aurait surpris en train de vous envoyer en l’air dans un amphi à ce qu’il parait. Tu sais très bien que les relations intimes entre professeurs et étudiants sont proscrites, ajoute-t-elle.
Je tourne le regard vers Nairobi, l’émotion qui se crayonne sur son visage me donne envie de crever les yeux à Elsa. Je garde mon sang froid néanmoins et lui réponds avec assurance :
— Ce ne sont que des rumeurs. Et elles sont fausses.
— Pff ! Parce que tu t’imagines qu’on va te croire ? Je te connais très bien mec ; même si je n’ai aucune preuve réelle, je suis certaine que celui qui vous a dénoncé n’avait aucune raison de mentir.
— Ecoute Elsa : dis-toi bien que tu ne connais rien de ma vie ok ? Alors, la prochaine fois que tu viens m’insulter, pèse tes mots.
— Ohhh. J’ai peur. Tu crois m’effrayer avec ton air de Bad boy ? Arrête de faire du charme à mon amie et là peut être que j’arrêterai de te dire des vérités non digestes. Elle ne mérite pas de sortir avec un pervers comme toi.
Je garde mon sang froid une fois de plus et me contente de grincer des dents. Une chose est certaine, c’est que son addition sera salée. Elle ne perd rien pour attendre.
— Ça suffit s’il vous plaît. Ce n’est ni le moment, ni l’endroit pour se chamailler. Arrête de le provoquer Elsa, réagit Nairobi. Je me demande toujours pourquoi on nous a fait descendre ici, ajoute-t-elle.
Nous haussons simultanément les épaules. Je tourne la tête et remarque Bénash qui me cherche du regard, toujours avec son air anxieux. Je jette un coup d’œil malsain à Elsa avant de me détacher du groupe pour rejoindre mon ami devenu comme un  frère.
— Regarde Jimmy, dit-il en pointant l'autocar du doigt. Tous nos bagages ont été sortis.
Je me retourne juste à temps pour voir le chauffeur fermer les soutes.
— Mais putain ! fulmine-t-il. Nous ne sommes pas des enfants nous ! Pourquoi nous a t’il fait descendre dans ce coin perdu ?! On veut des explications maintenant.
— Calme-toi mon pote. Je vais me renseigner, lui dis-je.
Je me dirige à petits pas vers notre chauffeur farceur dingue qui essuie son front plein de sueur avec un mouchoir de poche. Il est adossé sur la portière, me voyant arriver, il grimpe vivement dans le véhicule et se glisse derrière le volant. Je m’approche un peu plus et me place devant la portière avant.
— Est-ce qu’une autre voiture  va venir nous chercher monsieur ?
La portière automatique se referme en chuintant sous mon nez, le moteur rugit et je sens l’odeur âcre de la fumée sortir du tuyau d’échappement. Je commence à taper fort des deux mains sur la portière.
— Hé !! Attendez !
Je dû faire un bond en arrière car l’autocar vient de démarrer dans un crissement de pneus.
— Putain c’est quoi votre problème monsieur ! hurlé-je furieux. Vous voulez m’écraser ou quoi !
Je me tourne en direction du professeur : nada, rien du tout, il n’est plus là, il a disparu de mon champ de vision. Je me retourne en direction de l’autocar et il n’est pas à l’intérieur non plus. Mon cerveau ne capte pas encore ce qui se passe. Je me fige, la bouche et les yeux béants, regarde impuissamment l’autocar faire demi-tour et disparaitre dans un nuage de fumée blanche. Je me retourne, cherchant Bénash des yeux ; il est près des autres, tous étonnés, empreints d’inquiétude et de peur; défilant sans doute mille questions dans leurs têtes.
— Quoi ! prélude MK. Ils nous laissent ici ?! Abandonnés à nous même ! …
— Ils nous ont vraiment laissé ici ?! Tout seul au milieu de nulle part ? s’exclame Nairobi.
Dans le silence et l’inquiétude totale, nous regardons l’autocar disparaitre vers un horizon incertain. Je promène mon regard autour de moi et me rends compte que le jour commence à lever l’ancre et que le paysage s’assombrit : c’est alors que des bêtes se mettent à hurler.

l'épée de DamoclèSOù les histoires vivent. Découvrez maintenant