J'esquive un énième participant en avançant tant bien que mal tenant Aurora d'une main forte. Felipe et Sylvia sont sur nos talons, on est serrés les uns aux autres pour éviter de se perdre de vue avec le monde fou qu'il y a dans ces rues.
Apparemment je suis arrivée à Salou pendant une période assez mouvementée avec la tenue des « Nits daurades » (nuits dorées). D'après les explications de Felipe, c'est une fête qui dur en moyenne un mois plein avec des activités diverses tous les jours, toutes les heures.
Par chance, leur villa, qui est située sur la cote-est de la plage de Capellans, est assez loin du centre ville, ce qui l'isole du bruit. Ce soir, Aurora avait envie de participer comme ils le font chaque année depuis sa naissance, alors on est là.
Il y a un feu d'artifice toutes les demi heures, ce qui réussit à me faire sursauter à chaque fois, illuminant le ciel, déjà étoilé, de lueurs dorées. Une piste improvisée se trouve tous les 500m, avec des tambours assourdissants et des danseurs, à moitié nus, qui se dandinent au rythme de la musique produite par les tambours sous les étincelles de correfocs.
Ici et là on retrouve des castells, des hautes tours humaines faites de centaines de personnes. Des personnes déguisées, aurora se fait une joie de deviner le déguisement de toutes les personnes qu'on croise. Elle est émerveillée par tout ce qu'elle voit.
En avançant on tombe sur une scène, apparemment faites de bois et de palmiers, sur laquelle joue un groupe catalan, sous les applaudissements effrénés des spectateurs.
On reste des heures dans ces rues, coincés à chaque recoin par une activité ou une autre avant de se rendre dans un restaurant du coin, la taverna. On trouve finalement une table au bout de trente minutes, et elle est près de la fenêtre. Je m'installe à côté d'Aurora et Felipe et Sylvia s'installent en face de nous.
Je commande un solomillo a la pimenta et Aurora prend un tiramisu de la casa. On mange et je participe même à la conversation de temps en temps.
En sortant du restaurant je suis d'humeur plus joyeuse, les festivités environnantes ont finalement eu raison de moi. Du coup Felipe rentre avec Aurora pour la mettre au lit vu l'heure tardive et Sylvia me traîne jusqu'à la cala crancs.
Là il y a comme une sorte de feux de camp géant autour duquel des gens s'amusent à danser sur un rythme de salsa. Sylvia prend deux verres de tequila sur une table et me donne un.
"a la vida y amistades que duren (à la vie et aux amitiés qui perdurent)" dit-elle du bout des lèvres en levant son verre.
Je répète son mantra en levant mon verre à mon tour, puis on avale le contenu de nos verres simultanément.La tequila me brûle instantanément le larynx, ce qui me fait tousser. Ça fait longtemps que je n'ai pas bu de tequila.
"Allez viens" me dit Sylvia en déposant nos verres sur la table et en me tirant vers la piste de danse.
Sûrement à cause de la tequila, je ne résiste pas. Je la suis et une fois sur la piste improvisée je me déhanche au rythme de la musique si familière. Je ne sais pas combien de temps on danse mais ça me fait un bien fou.Tout ça, la musique, la danse, les gens autour, les repas, ce sont des choses que je connais. Je sens que j'appartiens à tout ça, que je suis comme la fille qui dans le ventre à l'air de l'autre côté du feu. La langue que tout le monde parle est la mienne, les repas sont connu à ma bouche, les danses sont inscrites dans mes gênes. C'est chez moi.....
Une boule se forme dans ma gorge et je me rends compte que ça m'avait manqué tout ça. Je ne l'aurais jamais avoué, par orgueil, mais ça me saute aux yeux maintenant.
En renonçant à tout ça pour vivre avec Lucas au Cameroun, c'est une partie de moi que j'ai amputé. J'ai sacrifié celle que je suis, ma nature, ma culture, mon patrimoine, mes valeurs.....
"Apparemment tu as un admirateur " me lance Sylvia le regard animé d'une lueur que j'attribue à l'alcool contenu dans les verres de cocktails que l'on enfile depuis tout à l'heure.
Je la regarde offusquée, comment ça j'ai un admirateur ? Elle se trompe sûrement.
"Et il est pas mal en plus" continue-t-elle en arquant les sourcils.
"Où ça ?" Dis-je prise d'un élan de curiosité.Je suis son regard et tombe justement sur un homme à la peau hâlé et aux cheveux noirs devenu presque dorés grâce aux reflets des flammes. Il croise mon regard et sourit, seulement je ne lui rends pas son sourire.
"Je crois que je vais rentrée" annonce-je à Sylvia, d'une voix ferme.
Sans attendre sa réponse je me faufile tant bien que mal entre les danseurs. Je marche d'un pas assuré en direction de la maison."¿A dónde vas bella?" (Où vas-tu beauté) Fait la voix d'un jeune homme derrière moi.
Je me retourne et tombe sur mon admirateur de tout à l'heure, je ne me suis même pas rendue compte qu'il me suivait. Il affiche un sourire charmeur, qui fait ressortir de légères fossettes sur ses joues."vuelvo" (je rentre) fais-je sans plus.
Sur ce je me retourne et continue de marcher d'un pas résolu.
*********
Je regarde l'heure sur mon smartphone, 7:25, j'ai pas vraiment dormis de toute la nuit. Après être rentrée hier, j'ai pris un bain et me suis forcée à m'endormir en vain.
Quand j'ai finalement fermé les yeux, j'ai rêvé d'yeux noisettes, ceux de Lucas. C'est la première fois que je rêve de lui depuis mon départ, c'est la première fois que je rêve tout court d'ailleurs.
C'est sûrement à cause de l'inconnu d'hier qui a essayé de m'aborder et que j'ai fuis comme la peste. Je me demande pourquoi d'ailleurs, je vais bientôt être divorcée et je devrais bien me recaser avec quelqu'un d'autre un jour ou l'autre...
Je sors de mon lit et enfile un leggings et un t-shirt ainsi que des baskets et je me décide à descendre courir histoire de m'aérer la tête.
Je cours d'abord à toute vitesse sur quelques kilomètres le long de la plage avant de ralentir, je n'ai plus autant d'endurance qu'avant...Je trottine sur quelques mètres avant de m'arrêter pour m'étirer. À peine ai-je commencé les étirements que je vois, du coin de l'œil, quelqu'un s'installer à ma gauche. Je me retourne et reconnais l'inconnu d'hier soir.
"Bella" fait-il simplement avec ce même sourire charmeur.
"No comprendo" fais-je dans une tentative désespérée en essayant en vain de masquer mon accent.
Il rit de bon cœur avant de se décider à répondre. "C'est pas grave. Français?"Je secoue négativement la tête tentant de ne pas rire moi aussi.
"English then?" Rétorque-t-il aussitôt sans se défaire de son sourire.
En plus d'être mignon il est trilingue? Je chasse assez vite cette pensée de ma tête, je me lève et le contourne pour regagner la maison. Il fait pareil et me suit."Tu sais qu'il t'es quasi impossible de masquer ton accent? Mais si tu préfères on peut parler dans n'importe quelle langue " dit-il en accélérant le pas pour me rattraper.
"Peu importe la langue il est clair que j'ai pas envie de te parler" Le rembarre-je sans conviction.
"C'est pas grave, je n'ai rien contre les monologues" répond-t-il aussitôt.
Je le regarde faussement offusqué, on l'éteint comment celui-ci? Néanmoins je me sens flattée qu'il n'abandonne pas aussi vite, je ne me rappelle pas la dernière fois que je me suis fait draguer.
Il me fait la conversation tout le long du trajet retour, m'arrachant au mieux quelques sourires mais je réussi à parler le moins possible. Une fois près de la maison, je m'y aventure sans même lui dire au revoir.
"Hey, bella. Tu pourrais au moins me donner ton prénom?" Crie-t-il se gardant néanmoins de me suivre."Bella, ça me va très bien" dis-je un demi sourire sur le visage sans pour autant me retourner....
————————————————————————
Alors c'est tout pour ce chapitre.
Je me rends compte que je ne suis pas très douée pour l'auto critique, SOS....
En attendant, une étoile et/ou un commentaire serait très cool 🥺😉

VOUS LISEZ
BROKE
RomanceLivia Martika Martinez, de nationalité Espagnole s'est installé il y a plus de douze ans au Cameroun par amour. Douze années qui n'ont pas été tout beaux, entre viol, abus de pouvoir et infidélités. Après toutes ces tragédies elle essaye tant b...