La Genèse

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-Avez-vous entendu les rumeurs ? Il paraîtrait que le roi est sur le point de mourir.

-Oui, ils ont même fait venir les clercs pour lui donner les derniers sacrements.

-Pauvre homme. Il ne laissera donc aucune descendance légitime au trône.

-Sa Majesté la reine était dit-on infertile, c'est d'ailleurs pour ça qu'elle était à l'autre bout du royaume depuis quelques années, soit-disant pour se soigner, mais la vérité est que le roi l'aimait trop pour la répudier, mais pas assez pour la garder à la cour. Et étant déjà malade à l'époque, avoir une seconde femme aurait été plus un ennui de plus qu'autre chose.

-Mais qui pourrait donc reprendre le trône ?

-Plusieurs personnes sont sur la liste ma chère : certains de ses cousins, bien entendu Monsieur le frère du roi et aussi le fils de son autre frère, décédé il y a quatre ans.

- Vous parlez de La Freyja ? La Freyja sur le trône ? Vous n'y pensez pas !

Les médisances des deux femmes cessèrent alors qu'un homme s'était arrêté devant elle, les fixant avec une froideur qui n'était que trop connut à la cour.

-Madame de Venom, Madame d'Orm, non pas que ce genre de discussion me regarde, mais il serait préférable pour vous de ne pas profaner les membres de la famille royale.

Les deux femmes, se cachant derrière leurs éventails de plume, rirent nerveusement avant de se justifier comme elles le pouvaient :

-Bonjour Capitaine ! Vous avez l'ouïe fine, ces couloirs n'y sont pourtant pas propices.

-Madame de Venom, les couloirs ne sont pas non plus propices à de telles discussions. Maintenant si vous voulez bien me laisser passer, le roi m'a fait demander.

La jeune Marquise sursauta à la requête du militaire. Sans dire un mot de plus elle se poussa elle et sa comparse, laissant le Capitaine rentrer dans l'antichambre du roi. Aussitôt qu'il disparut derrière la grande porte, elle se remit à battre rapidement de son éventail devant son visage, faisant frétiller les plumes de son chapeau :

-Mphf ! Il pourrait au moins nous appeler part nos titre, comme nous le faisons pour lui.

- Vous avez tout à fait raison ma chère...Est-il marié ?

- Non pas encore.

- Cela ne m'étonne même pas.

C'est avec le poing serré que le Capitaine referma la grande porte, en un lourd claquement qui raisonna dans toute la pièce. Il resta là quelques instants à la contempler, en silence. Depuis quinze longues années maintenant qu'il servait le roi. Il lui avait juré fidélité quand il n'était qu'un jeune homme encore, et pensait le servir jusqu'à sa mort. La discussion des deux marquises avait fait naître en lui une angoisse, une incertitude qui lui arracha un soupir un peu tremblant. Quel genre de roi allait-il maintenant servir ? Pourra-t-il suivre ses propres principes tout en lui étant fidèle comme avec le roi sortant ?

L'écho des dernières phrases d'une prière en latin lui fit reprendre pied. Le roi. Il l'avait appelé et voilà déjà les prêtres qui finissaient les sacrements. Il ne doit pas lui rester beaucoup de temps.

Il se remit alors à avancer, reprenant peu à peu sa froideur et son impassibilité, fier et droit, avant d'entrer dans la chambre du roi. Les clercs qui s'en retournaient déjà à leurs occupations, quittant la pièce, ne firent même pas attention à lui, sortant comme un troupeau qui quittait un enclos dans lequel ils étaient restés des jours durant. Le regard du Capitaine se posa de suite sur le lit du roi, qui était entouré de ses conseillers et de son frère. Il fit quelques pas de plus, ce qui suffit pour que toutes les personnes ici présentes se tournent vers lui. Il s'inclina un instant avant de venir au chevet du roi.

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