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Depuis petite, je ne possède aucun rêve. A part peut être celui d'en avoir un.
Dans la cour de récré ou même en classe, je voyais les autres enfants parler de leurs rêveries. Aussi loufoques soient-elles, ils en parlaient avec espoir, avec une lueur jaune et scintillante aux creux des pupilles. C'étaient leur motivation, leur but, le sol sur lequel était forgé leur ambition. Certains voulaient devenir pompier, d'autres voulaient voyager aux pays des licornes. Que cela réalisable ou non, c'étaient des idéaux à atteindre à tout prix.
Moi, je les regardais et les écoutais simplement. Mais surtout, les enviais. Ils avaient un objectif, limite une raison de vivre et moi, je n'en avais pas. Je ressentais ce vide de ne rien vouloir accomplir, de ne rien vouloir faire de ma vie.
Tous les ans, je regardais tristement cette demi-feuille où cela était écrit en gros "As-tu un rêve ?". Quand je devais rendre ma feuille, elle était toujours d'une pureté et d'un blanc éclatant. Aucune trace de gomme ou d'effaceur de stylo plume, signifiant que je n'avais même pas pris la peine d'écrire un seul mot.
J'en ai beaucoup souffert, je me sentais différente, et indirectement je me sentais seule. Je ne ressemblais pas à tous mes petits camarades, à tous mes amis. Ils possédaient quelque chose que je n'avais pas. Petit à petit, ça installa un vide en moi.
Il me manquait cette envie de me voir aboutir et accomplir des projets, cette envie de me projeter la personne que je désire être à l'avenir et cette envie de vouloir devenir un être que je devrais admirer tant. Mon futur et mes ambitions n'étaient qu'un vide. Un long couloir qui ne connaissait pas de fin, qui n'aboutissait à rien.
J'ai fini par m'y habituer, malheureusement ou heureusement d'ailleurs. Je n'avais pas le choix de toute manière. Au fur et à mesure, avoir un rêve a fini par me désintéresser. "Si je n'ai pas rêve, je vivrais au jour le jour" disais-je fréquemment. Il arrivait que j'obtienne des regards exprimant seulement de la pitié ou des regards perplexes. Pour les gens, je n'avais pas d'avenir. J'étais destinée à finir au chômage ou à vivre éternellement chez mes parents.
Malgré ma fierté, je devais admettre qu'ils avaient raison. Une personne sans détermination ni ambition n'avait aucune chance de survivre seul en ce monde. Pour obtenir de l'argent, il faut travailler et pour travailler il faut avoir un job. C'est comme cela que la société marche, et les "flemmards" comme moi, n'ayant pas l'ombre d'une piste pour le métier qu'ils pratiqueront adulte, n'y font pas long feu.
