Chapitre 63 "L'ange de plomb"

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[Juno]

Menottée dans le dos, deux policiers m'escortent. J'ai l'impression d'être dans l'un de ces documentaires sur les ennemis d'Etat. Pélagie trottine derrière nous, Astérion en pleurs dans ses bras. Le secrétaire du tribunal nous dévisage alors que les policiers me forcent à m'asseoir sur une chaise. Ils m'accrochent aux pieds de l'assise :

"Mais enfin ! S'indigne Pélagie. Vous voyez bien qu'elle n'est pas récalcitrante ! Vous n'allez pas garder une mère menottée devant son propre enfant !

-Si vous ne l'aviez pas amené, rappelle un policier, il ne l'aurait pas vue ainsi.

-C'est la femme d'un de vos collègues !"

Ils haussent les épaules continuant de m'encadrer. Ils sont arrivés au château alors que nous parlions de l'école où je veux inscrire Astérion. Ils ont accepté que je m'habille. Mais depuis, aucun ne m'adresse la parole. J'ignore quelle tournure a pris les événements durant l'audition mais, je peux aisément le deviner. Une double porte s'ouvre. Alec se précipite vers moi mais les policiers lui barrent la route :

"Les gars, laissez-moi lui parler.

-C'est la procédure, Alec. Lance le premier. Si nous on la respecte pas, qui le fera ?

- Mais c'est...

-Alec. Le coupé-je. Occupe-toi d'Astérion."

Notre fils a les joues ruisselantes de larmes. Alec le voit enfin. Il se dirige vers lui. Dès qu'il est avec son père, il se calme. Alec le berce tout en me regardant. Il regarde mes mains contre la chaise :

"Elle va pas s'enfuir. Réplique-t-il.

-Une semaine de cavale."

Il roule des yeux au ciel. Je le remercie d'être derrière moi mais, je ne pense pas que ce soit la solution. Ses collègues n'ont aucun pouvoir. Ils doivent juste obéir :

"Juno, ma petite fille, tu aurais pu te passer un coup sur le visage. Tu as l'air fatiguée !"

Je me tourne vers mon père. Il m'a promis de m'aider mais je n'ai plus eu de nouvelles de lui, depuis. Comme il n'était pas avec Alec, j'ai pensé qu'il s'était enfui. Il s'approche pour me prendre dans ses bras mais avant même qu'il n'atteint le barrage de policiers, Alec le saisit au col :

"La touchez pas, la regardez même pas. Le menace-t-il.

-Alec... Soupire un des policiers. Pas dans un tribunal et tu portes ton fils !"

Ils les séparent. Je ne comprends pas cette animosité. Ils sont dans le même camp. Mon père n'a peut-être pas aidé à la hauteur à laquelle Alec le voulait. Après tout, il est fainéant et s'enfuit à la moindre difficulté. Mais, au moins il est présent pour moi.

Philippe et ce qui semble être son avocat sortent à leur tour de la pièce. Ils discutent quelques secondes avant de se tourner vers nous. Le regard froid de Philippe me cloue sur place. L'ombre d'un sourire machiavélique se dessine sur ses lèvres :

"M. Solonge, appelle son avocat, nous devons nous réunir.

-À bientôt, ma petite. J'espère que l'on pourra se revoir avant que tu ne deviennes une taularde."

Mon père m'accorde un sourire avant de s'éclipser avec Philippe. Il faut que je le vois entrer dans une pièce à sa suite pour que je comprenne qu'il m'a trahie. C'est lui qui a indiqué ma position. Mes yeux se posent sur Alec. Il fait les cent pas, Astérion contre son torse :

"Je... je ne pensais pas...

-Tout ce que vous direz pourra être retenu contre vous." Me rappelle un policier.

Virées nocturnesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant