Chapitre 9 : Une renaissance comblée.

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25 décembre 1847


André n'avait pas revu Baptiste depuis ce soir-là chez lui. Vingt-et-un jours étaient passés durant lesquels il s'était forcé à ne pas l'aborder. Ho, bien sûr, il n'avait pu se retenir de l'observer de loin lorsque ce dernier se rendait à son travail ou en sortait ! Il avait ainsi pu remarquer que la personnalité de Baptiste était proche de celle de Guillaume et qu'ils étaient tous deux d'une grande gentillesse. André l'avait surpris alors qu'il aidait un homme alcoolisé à se relever après être tombé rudement sur le sol à la sortie du cabaret et que d'autres passaient en lui jetant à peine un regard. Une grande douceur se dégageait de lui comme pour Guillaume. 

Et puis André se souvenait encore de ses mots tellement loin du compte : « J'ai un visage assez commun ! ». Tout comme son amant, Baptiste n'avait pas conscience de son charme parce que tout ce qu'il voyait, était qu'il ne correspondait pas aux attraits virils et masculins désirés. Il ne voyait pas la beauté douce qui se dégageait de son fin gabarit, de ses cheveux rappelant de l'or, de ses yeux bleus comme l'océan, de son visage ovale. Mais André, lui, les voyait. Il en rêvait même. Ses attraits, il les voulait dans ses bras, dans son lit, dans sa vie...

André avait remarqué autre chose aussi. À chaque fois qu'ils se trouvaient en présence l'un de l'autre, le brouillard venait, les enveloppant de son coton gris et épais. Il se doutait que la magie du calice était derrière ce phénomène, se manifestant à sa manière. Ça ne l'aidait en rien à comprendre la situation. Il avait retrouvé l'homme qu'il aimait mais celui-ci ne semblait pas retrouver la mémoire ! Et pire, il l'avait rejeté et regardé avec tellement de dégoût ! André ne savait plus. Devait-il essayer de le reconquérir ? Était-ce peine perdue ? Ses souvenirs allaient-ils réapparaître d'eux-mêmes ou devait-il trouver un moyen de les réveiller ? Ou... Guillaume était-il condamné à n'être qu'une enveloppe sans âme ou avec une nouvelle personnalité ?... 

André avait peur. Il ne savait pas de quelle manière agir. Tout ce qu'il savait, était qu'il ne voulait pas le mettre mal à l'aise ou lui faire peur. Et surtout, qu'il ne voulait plus jamais revoir ce regard qui l'avait tellement blessé... Un regard qu'il n'aurait jamais pu imaginer sur le beau visage de son amant alors qu'il avait ses yeux posés sur lui. C'est pourquoi il ne s'était plus rendu au sein du cabaret. 

En journée, il s'était jeté à corps perdu dans son travail et le soir venu, dans l'alcool. Dans ses brumes bienfaisantes, il repensait à ses souvenirs si chers à son cœur et s'endormait en imaginant son amant dans ses bras, comme avant. Les jours puis les semaines étaient passés de cette manière et nous étions désormais arrivés aux fêtes de Noël. Des fêtes bien solitaires pour lui. Il ne s'attendait certainement pas à ce qui allait suivre et bouleverser sa vie...

Minuit avait sonné depuis déjà quelques heures et André somnolait tranquillement dans son fauteuil devant un feu de cheminée. Une bouteille de Whisky et un verre à moitié plein trônaient sur le meuble près de lui. Autre chose se trouvait sur la table. Un poignard dont il avait lui-même aiguisé la lame était posé et attendait d'être utilisé. S'il ne pouvait pas avoir son amant à ses côtés, plus rien n'avait d'importance dans ce monde. Chaque jour, il pensait à essayer de nouveau d'en finir mais quelque chose le retenait encore. Le mois de décembre n'était pas terminé et il voulait être sûr, partir sans regret si cette fois-ci cela fonctionnait. Si personne ne retirait rapidement le poignard, peut-être mourrait-il pour de bon. Sinon, il existait bien d'autres façons d'essayer de quitter cette vie. Il avait l'embarras du choix. Le premier janvier, son sort serait ainsi scellé...

-Guillaume... murmura-t-il d'une voix plaintive en se passant une main lasse sur le visage.

Toc Toc Toc

Un hiver éternel...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant