Chapitre 4

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Comment ces traces ont-elles pu disparaître d'elles-mêmes ? Plus rien ne coïncide... Toute la logique que j'essaie d'établir depuis deux jours non-stop n'a plus aucun sens. Je me rassure comme je peux, je me suis peut-être trompée, Jules m'a fait une blague ou bien maman est venue enlever les traces. J'essaie de rationnaliser cette histoire car je m'y perds, la panique me prend et je ne peux en parler avec personne.

- Maman, est-ce que tu es venue dans ma chambre cette nuit ou ce matin, pendant que je dormais ?

- Non Emy je ne vois pas pourquoi je serai entrée dans ta chambre, pourquoi donc ?

- Euh... Pour rien, j'ai égaré mon manuel d'histoire et j'en ai besoin pour ce matin.

- Cela fait à peine 24h que la rentrée est officielle et tu perds déjà tes affaires, si tu étais moins dans la lune peut-être que tu saurais où elles sont.

- Mhhhm, merci quand même.

- Tu vois, tu ne m'écoutes déjà plus.

Je pars en direction de ma chambre sans répondre à ma mère. C'est ridicule car ce matin je cogitais éveillée donc j'aurais entendu maman venir dans ma salle de bains. Même si je tente de trouver une explication réelle ou logique, je sais au fond de moi que tout ça relève d'autre chose, ce n'est pas une simple farce. Cette situation est insupportable. Je veux quand même m'assurer que ce n'est pas Jules qui est derrière tout ça. Je crois qu'il dort encore, j'entrouvre sa porte et passe la tête.

- Jules, tu dors ? Dis-je en chuchotant.

- Tu m'as réveillé.

- Ah mince, je suis désolée. Dis-est-ce que tu es venu dans ma chambre ?

- Non ? Il n'y a rien qui m'intéresse dans cette pièce à part, peut-être, trouver tes secrets.

- C'est bien dommage, je n'ai aucun secret !

Il me tire la langue, je le laisse se rendormir. C'est vraiment bizarre, si personne n'est venu, ça veut bien dire que les mots sont partis d'eux-mêmes, mon intuition se confirme. Je ne vais rien pouvoir avaler ce matin ; ces manifestations prennent trop d'ampleur. Ça me tracasse énormément, ma gorge en devient nouée. Il faut que je comprenne, ça en devient vital. Je repense malgré moi au décès de papa, je fais comme je peux pour ne pas pleurer. Je suis plantée sur le palier, le regard dans le vide ; je perçois à peine maman s'agiter entre sa chambre, celle de Jules et la salle de bains commune.

- Emy active un peu, tu vas être en retard au collège !

- Oui pardon maman, je vais me brosser les dents.

J'entends à peine maman marmonner que je devrais manger quelque chose avant de partir. Je suis perplexe. J'aimerais bien enfin en parler car j'ai passé deux jours à me tourmenter, mais au fond qui me croirait ? Qui prendrait au sérieux une fille de 14 ans qui prétend avoir été témoin d'un étrange message indélébile sur un miroir ? En plus, je n'ai aucune preuve n'ayant pas fait de photo...

Il faut que je me brosse les dents, je dois affronter et surmonter ma peur. J'appuie sur l'interrupteur et m'assure qu'il n'y a pas de danger, je m'avance prudemment jusqu'au lavabo. J'attrape ma brosse à dents d'un geste furtif, je fais de même avec le dentifrice que je manque d'échapper. Je tremble, à tel point que ma brosse à dents finit ensevelie de pâte blanchâtre et collante. Je m'efforce à ne pas poser mon regard sur le miroir. Je me rince la bouche et je lève la tête. J'aperçois mon reflet, jusqu'ici tout va bien.

Oh misère ! Les mêmes tâches qu'hier sont en train d'apparaître. Les lettres se forment sous mes yeux, je suis pétrifiée. Machinalement, je prends mon miroir de poche que j'avais laissé à gauche du vasque. Je tente de lire une première fois ce qui est écrit, comme pour me persuader que ce sont bien des lettres ; c'est trop petit je ne distingue rien. J'attends de longues secondes, les écritures finissent par s'épaissir. Malgré la petitesse de l'écriture j'arrive à déchiffrer les mots : « S.O.S., signé Séléa ».

SéléaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant