Chapitre III (3)

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- Bon, tu bouges ? J'ai pas que ça à foutre morveuse... me dit le Caporal Chef Ackerman, me sortant de mes pensées, même si je ne réagis pas à son injonction.

J'ai l'impression de ne plus rien ressentir. C'est trop d'un coup. Trop d'émotions. Je le suis sans rien dire. Il avance très rapidement, alors je trottine pour le suivre. Mon cerveau en profite pour se barrer.

- Tsh... si j'avais su qu'il était si simple de te rendre moins chiante, j'aurais commencé par la... grogne-t-il.

Je ne dis toujours rien. Que répondre à ça ? C'était la pure vérité... Sa réputation était juste trop importante pour que j'ose me la jouer. Et puis merde, j'ai cru qu'il allait me tuer il y a quelques minutes, alors c'est normal que j'aie peur et que j'obéisse !! Il ouvre une grille, et je rentre sans demander mon reste.

Avec des barreaux entre nous et la porte bien fermée à clef, je me sens bien mieux. Presque en sûreté. Il repart sans plus rien ajouter, ce qui est parfait.

Maintenant, toutes les questions qui s'étaient évaporées reviennent. Qu'est-ce qui a pu m'arriver ? Qu'est-ce qui va m'arriver ?? Je ne vais quand même pas finir ma vie dans une prison ?! Non non non non.... Ok, stop.

Respirer.

Je dois respirer et me calmer.

Aaaaaaahh fuuuuuuuck...

Aaaaaaaaaah fuuuuuuuuuck....

Aaaaaaaaaah fuuuuuuuck...

Ok, ça va mieux. Maintenant, prenons les problèmes un par un.

1) Si je suis enfermée, c'est parce que personne, et moi la première, ne savons qui je suis. Donc ils me soupçonnent d'essayer de les infiltrer. Ce qui, réflexion faite, est absurde. Ils m'ont trouvée de l'autre côté du mur Rose, et apparemment pas mal blessée. Il n'y avait presque aucune chance qu'ils passent précisément à côté de moi avant que des titans ne me trouvent et me bouffent. C'est donc illogique.

De plus, qui voudrait les espionner ? Bon, ok, d'accord, il ya du monde... comme les Brigades Spéciales, ou encore les dirigeants et ceux qui ne veulent pas d'un gamin qui peut se transformer en titan dans les murs.

Donc, il faut prouver mon innocence, par exemple en demandant à des personnes de la Brigade si ils me connaissent. Ou aller consulter les registres des recrues de ces dernières années, si ce genre de document existe.

2) Un traumatisme, plus ou moins récent, m'a fait perdre la mémoire concernant mon passé, et quand j'essaie de me souvenir, je ressens une vague d'émotions négatives destructrice. Et je ne suis pas sûr d'avoir envie de me souvenir...

Donc si je n'en ai pas besoin, autant repartir à zéro.

3) Je n'ai aucun endroit où loger, pas d'argent, de nourriture ou d'habits. En bref, je n'ai aucun moyen de survivre hors de ce QG. Ce qui est un problème si je suis innocentée puisque je n'aurais aucune raison de rester...

.
..
...

Alors même si j'ai les idées un peu plus claires, je ne peux rien régler seule. Et là maintenant tout de suite, des besoins humains urgents se font sentir... et rien dans la pièce ne pourrait me permettre de me soulager. Il ne me restait plus qu'une chose à faire, m'endormir jusqu'à ce que quelqu'un vienne et que j'expose mes arguments.

Donc je m'allonge sur l'espèce de banquette en bois fait pour, et essaye de dormir. Mais peine perdue, les souvenirs de ma chute du mur et du désespoir que je ressentais me hantent. De plus, si j'ai sauté, c'était pour mourir. Alors pourquoi suis-je vivante ?? On ne survit pas à plus de 50 m de chute avec seulement des contusions et quelques blessures. Et qu'est-ce qui a bien pu me pousser à sauter ?!

_ « * »_

Cette réflexion tourne en boucle dans ma tête. J'ai l'impression de devenir dingue. Je ne sais plus depuis combien de temps je tourne en rond dans cette cage, mais j'en ai marre. Je ne supporte pas d'être enfermée avec pour seule compagnie mes pensées. Alors pour me défouler, je commence à frapper un barreau avec la plante du pied. Un coup part, suivit d'un autre, et encore un autre, et encore, et encore et encore et encore et encore. Mon mouvement est fluide. Je prends un rythme, et commence à transpirer. Cet effort physique me fait du bien pour détourner mes pensées. Je ne m'arrête que quand je suis à bout de souffle.

- T'as fini ton boucan ? grogne une voix glacée.

Je sursaute. Je n'ai entendu personne venir ! Soit j'étais trop concentré, soit la personne est un Ninja. Et en analysant la voix, ce n'est ni l'un ni l'autre, mais juste Livaï Ackerman. Normal, donc, que je ne l'ai pas entendu.

Mais en travaillant mon corps, j'ai laissé partir ma raison puisqu'elle trouvait ça très con de frapper du pied à en saigner un barreau. Et quand ma raison n'est plus là, c'est la fierté qui dirige. Or, Fierté ne fait pas dans la demi-mesure...

- Vous êtes décevant, dis-je. Surtout avec votre réputation. Vous ne savez pas faire la différence entre du « boucan » et un entraînement...

J'aurais dû m'arrêter là. Vraiment. Ça aurait mieux fini. Mais ces fameux barreaux me séparaient physiquement de lui. J'avais malheureusement pris la confiance. Et puis quand c'est mon ego qui dirige, il ne fait pas dans la dentelle.

-... à croire que votre cerveau est proportionnel à votre corps : minuscule.

Très fière, je le regarde en face, les yeux dans les yeux. Je crois mourir. Son regard est du métal en fusion. Il me tue presque littéralement rien qu'avec ça. De plus, sa mâchoire s'est crispée, et une pulsation bat furieusement sur son front. Avec ça, il dégage une aura qui dit « même la mort est trop douce pour toi. Tu vas souffrir ».

Il avance, et ouvre la porte. J'ai envie de reculer, mais ma fierté m'y interdit. Je le fixe en retour, cachant ma terreur bien profondément sous des couches de fierté mal placée. Quand il entre dans la cellule et se rapproche de moi, j'ai l'impression que c'est la mort en personne qui vient. Il arrive tranquillement, un pas après l'autre. Je dois me mordre la lèvre au sang pour ne pas hurler des suppliques et plier devant lui. Je reste droite, et je supporte tant bien que mal son regard, fierté oblige.

Il est maintenant si près de moi que je sens son souffle sur mon visage. Mon cœur bat de façon irrégulière, j'ai l'impression de ne plus réussir à respirer. Je resserre mes dents, ma lèvre s'ouvre un peu plus.

J'attends l'inévitable coup. Mais rien. Dans le chaos de son regard, je vois une petite pointe d'étonnement et de respect. Toute minuscule, mais bien là. Il se penche sur moi, et parle très bas dans mon oreille. Mais sa voix est tellement chargée d'une menace de mort froide et douloureuse que je l'entends comme si il parlait normalement.

- T'as de la chance qu'Erwin ne veut pas te tuer p'tite conne...

J'ai ensuite l'impression de m'encastrer dans un mur. Il vient d'exécuter le même mouvement de pied que je faisais tout à l'heure, mais en beaucoup mieux : plus rapide, précis, efficace et violent. Je m'explose la tête sur la pierre froide. Je suis tellement secouée que je ne peux rien faire d'autre que tomber lamentablement parterre. Du moins c'est ce qui aurait dû arriver si le genou du caporal ne m'avait pas cueilli pour m'envoyer à nouveau m'écraser contre mon nouvel ami le mur. Et encore une fois, je ne peux rien faire d'autres que me laisser tomber, mais avec en prime une gorgée de sang à cracher. Et encore une fois, je ne rencontre pas le sol, mais un pied. Cette fois, c'est un chassé latéral qui m'envoie tout contre le mur de droite. Je hoquette et crache plusieurs fois du sang.

Avant que je ne commence à tomber, une de ses mains m'attrape à la gorge. J'ai beaucoup trop mal au ventre, qui a pris presque tous les coups. Je n'ai plus de force dans mon corps, alors je me fais étrangler par cette main qui me maintient debout. Je croise son regard, et le défi.

Pourquoi ai-je autant d'orgueil ? Je ne sais pas. Je peux simplement prédire que ça va me perdre, et même plus vite que je ne le pense. Peut-être même beaucoup plus vite.

- Votre cerveau est si atrophié que face à une provocation, vous faites usage de la force ? Je crois que si vous avez un seul neurone, c'est tout, Caporal Nain, je crache difficilement entre deux toux ensanglantées.

Livaï X Reader - IntrospectionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant