La nouvelle

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La nouvelle

      Elle s'appelle Marjorie. 2 semaines qu'elle travaille ici et je ne savais même pas son nom. A vrai dire, je suis son patron qu'indirectement. Elle travaille sous les ordres de Louise et Sam mais il lui arrive de nettoyer l'atelier quand Germaine ne peut pas se déplacer, une fois de plus. Son poste est un peu flou. C'est une sorte de servante qui s'occupe des clients haut de gamme, mais elle entretient aussi l'atelier du haut et comme je l'ai dit, l'atelier du bas parfois. Les filles n'ont pas résisté à lui confectionner un uniforme. Elles se sont inspirées d'un croquis de Lou. Une grande robe marronne avec un haut comme une chemise et un tablier blanc parfaitement assorti. Elle porte aussi des petites ballerines à la couleur de la robe. Elle possède aussi un petit chariot et un casier dans les vestiaires. Son emploi du temps est très varié. Cela dépend des rendez-vous, du travaille « salissant » qui a effectué ou si c'est tel jour pour les sols ou tel jour pour les tapisseries. Mais chaque matin, elle est rythmée par une sorte de rituel.

     Dès 7h00, elle ouvre la porte d'entrée pour accéder à la salle d'attente. De l'autre côté se trouve une autre porte blanche réservé aux personnels comme indiqué sur une pancarte. Elle entre dans un couloir. Elle tourne à gauche où se trouve un vestiaire. Un casier à son nom l'attend. Elle l'ouvre, y sort sa robe et se cache derrière un paravent pour se changer. Elle range ses affaires personnelles et sort un tablier qu'elle enfile. Grace au miroir plaqué contre le sol et une trousse remplie de chouchous et d'épingles, elle se fait un chignon très strict avec ses longs cheveux blonds. Après avoir vérifié une dernière fois son apparence sans aucune bavure, elle range le tous dans son casier qu'elle ferme avec une clé qui se retrouve ensuite dans la poche de son tablier. Après être sorti de la pièce, elle s'insère dans la salle à sa gauche où elle y prépare le café. Ensuite elle va chercher dans la troisième pièce servant de local un chariot avec des balais, des produits, des chiffons.

     Comme à son habitude, elle monte discrètement le grand escalier en chêne menant à la salle principale. Les marches grincent à chacun de ses pas pourtant si léger. J'entends la porte du haut s'ouvrir. Elle la referme mais aucun claquement ne fut prononcé. Elle écarte les lourds rideaux rouges pour y laisser passer la lumière. Ensuite, elle se met au travail. Elle dépoussière, range, lave avant l'arrivée de ses patronnes. Toujours de bonne humeur, elle semble enfermée dans ce qu'elle fait. Chaque recoin de la pièce, coussin, chaise y passe. Une fois le ménage fait, elle ouvre une autre porte plus simple menant à la salle de travail pour recommencer ce processus. Et ainsi de suite dans toutes les salles composant le haut

     Il m'arrive d'arriver tôt pour préparer des rendez-vous, alors je l'entends effectuer ses tâches tous les jours, comme si chaque mouvement qu'elle faisait la passionnait. J'entends le parquet grincer au loin depuis le bas.

     Un soir, je suis parti vers 22h00. Sur la route, je me suis rendu compte avec oublié un dossier important. J'ai fait demi-tour et me suis garé sur le trottoir en face de la boutique a quelque mètre. Soudain, je vis les portes s'ouvrirent. Curieux, je restai tapis dans l'ombre presque en face des portes. Quand elle s'ouvrit enfin complètement, une jeune femme en sort. C'est une femme d'une trentaine d'années. Elle était en jean basket et tee-shirt assez simple, une veste en jean délavé par le temps. Ses cheveux blonds étaient décoiffés et seul restait son mascara trop foncé comme maquillage. Elle portait dans son coude un grand sac à main fourretout noir. Elle Fermat les portes à clé, mit ses écouteurs dans ses oreilles et s'alluma une cigarette avant de partir vers la gauche. J'ai eu du mal à la reconnaître. Je n'ai jamais eu une aussi bonne preuve qu'une personne au travaille pouvait être complètement différent dans sa vie privée. Elle avait l'air d'être particulièrement attaché à leur distinction. Ce qu'on savait d'elle en termes de vie en dehors du travail restait résumé et superficiel.

     Je dois avouer que cette femme est assez intrigante. Je ne sais pas vraiment pourquoi, mais j'ai toujours eu envie de la voir bouger, parler, regarder le monde de ses yeux bleu pétillants. Je pense qu'elle a quelque chose en elle de particulier qui demande réflexion. Elle a l'air tellement dans son monde et ce monde change complétement quand elle passe les portes de la boutique. Un vrai fossé sépare vie privée et vie professionnelle. Depuis que je l'ai vu hors du cadre professionnel, je me demande qui elle est vraiment, dans la vie de tous les jours. Elle reflétait une personnalité tellement différente de ce que je me faisais d'elle. Cela en est même perturbant. Normalement, je devrais passer outre car je dois m'en tenir à ses compétences dans son travail, mais c'est plus fort que moi. J'essayerais de lui demander un jour.


Haut : boutique de couture


Bas : boutique de restauration

Les folles histoires de MarjorieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant