Chapitre 3 : Le centre de rééducation

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Il y a quelques instants tout se passait bien. Comment avais-je pu me retrouver brutalement dans cette situation ?

Des arbres gigantesques s'étendaient à l'horizon. Le soleil allait bientôt se coucher, et Az était perdu en plein milieu d'une forêt dont il ne trouvait plus la sortie.

Son coeur s'arrêta. En un instant, le jeune homme se retrouva plongé dans le noir.

Des larmes brûlantes perlaient ses yeux. Il cria à s'en déchirer la gorge encore et encore. Plus le temps passait, plus Az perdait l'espoir que quelqu'un l'entende.

Malgré tout, il continua à s'égosiller. Ses hurlements résonnaient dans un vide qui semblait s'agrandir de minutes en minutes.

Il sentit subitement des bras l'entourer. Une haleine teintée de café lui parla doucement. Mais, le jeune homme ne pouvait rien entendre. Ses propres cris lui étaient inaudibles.

Puis, il se rappela pourquoi le monde était si noir. Et, ses pleurs s'arrêtèrent brusquement.

Quel genre d'abruti oublie un détail aussi important... que d'être aveugle.

Le cauchemar du jeune homme avait été si effrayant et réaliste qu'une crise de panique tenait son esprit en otage. Inquiets, les parents d'Azryël s'étaient arrêtés en plein milieu de la route. Des klaxons mécontents faisaient écho aux paroles rassurantes de sa mère.

Az lutta pendant un long moment pour reprendre son souffle. Des gouttes de sueurs froides glissaient le long de sa colonne vertébrale et lui donnaient des frissons foudroyants.

« Je vais bien, murmura le jeune homme en appuyant son front perlé de gouttes sur le siège devant lui.

— Tu es sûr ? demanda son père, un effroi non dissimulé dans la voix.

— Oui, je suis certain. On doit y aller de toute façon. Ils nous attendent, dit Az en bouclant avec difficulté sa ceinture. Les tremblements agitant son corps refusaient de cesser. Ses doigts étaient crispés d'une douleur imaginaire.

— On peut rentrer si tu veux... proposa avec espoir son père. Il ne voulait vraiment pas être seul avec sa femme.

— Il te dit qu'il va bien ! Pourquoi tu n'écoutes jamais quand on te parle ? le coupa acerbement sa mère. »

Le mépris coulant de sa mère était si douloureux à entendre. Même sans pouvoir le visage de son père, il savait qu'il était livide de peur. Az put entendre distinctement sa respiration se couper.

Putain, Papa ! Je ne peux plus t'aider... Défend toi un peu !

Ce fut avec sa voix d'avocate qu'elle reprit : « Allez, redémarre. Sinon, on va être en retard. On ne va pas retourner à la maison pour une simple crise d'angoisse. Il n'a pas deux ans. Arrête de le couver. »

Un silence de plomb régnait dans la voiture. Personne n'osait parler. Le voyage ne semblait pas vouloir en finir.

« C'est quand qu'on arrive exactement ? les interpella Az.

— Encore dix minutes. Tout va bien ? le questionna son père.

— Seigneur mais arrête un peu avec ton rôle de père poule. Personne n'y croit. Merde alors ! s'invectiva sa conjointe, outrée.

— Tu sais quoi ? On n'aurait pas ces ennuis si tu n'avais pas insisté pour qu'il aille dans un centre aussi loin, lui répondit avec ferveur son mari.

— Que voulais-tu que je fasse ? Aurais-tu préféré qu'il soit admis à notre hôpital de secteur alors que tu y travailles ? se moqua la mère d'Az.

— Bien sûr que non ! fulmina son père. La rage débordait de sa voix.

— Tu n'as pas honte de te servir de lui ? C'est ça que tu veux ? Que tout le monde te prenne en pitié car ton fils est av...mal voyant ? bégaya sa femme. Leurs regards remplis de dégoûts se croisèrent quant elle utilisa presque le mot interdit. Le terme AVEUGLE était devenu une sorte de poison pour eux. Leurs visages prenaient une couleur inhumaine lorsqu'il était employé.

— Mais, comment on va faire pour venir le visiter alors qu'il nous faut au moins quatre heures de route ? la questionna-t-il avec douceur.

Enfin, arrivés... Il était temps.

Après avoir uniquement senti pendant quatre mois l'odeur fétide des hôpitaux, Az était presque heureux d'être à la campagne. Le piaillement des oiseaux était une douce mélodie pour le jeune homme.

Mais, il préférait mourir que de laisser ses parents le savoir. Ils seraient bien trop heureux. Déjà qu'ils osaient l'envoyer à plus de trois cents kilomètres de la maison. Le jeune homme n'allait tout de même pas leur donner une opportunité de s'affranchir de leur culpabilité.

Quelle merde cet accident...!

Des bruits de pas se firent entendre dans l'allée. Pourtant, les parents d'Az sont bien trop occupés à se disputer pour le remarquer.

Pendant le voyage, la tension avait été étouffante. Et, elle n'avait sembler ne faire qu'amplifier au fur et à mesure qu'ils approchaient de leur destination.

Le jeune aveugle fut informé qu'il visiterait le centre de réinsertion demain matin avec son aide médicale. Ses bâillements répétitifs mirent rapidement fin aux au revoir larmoyants de son père.

Il allait enfin pouvoir se reposer dans un endroit où les gens n'auraient pas peur de lui. Az frémissait d'impatience à l'idée d'avoir à nouveau des compagnons d'aventure qui le comprenait.

Pourtant le soir venu, il ne reçut comme seul accueil qu'une lettre froissée sur son lit. Du bout des doigts, le jeune homme pouvait sentir des renflements sur la feuille. Du braille.

L'ennui broyant son esprit, Az chercha grâce l'assistante vocale de son téléphone ce que le message voulait dire. Rien que pour décrypter deux phrases, il lui fallut plus de cinq heures. Ses yeux le piquaient. Il était éreinté.

Cependant, il devait absolument tout traduire. Les phrases qu'il avait déjà lui glaçaient le sang : « Quel genre de personne ose accuser une femme innocente sans avoir aucune preuve. Quel genre de personne ose mentir à la police. »

Qui avait écrit cette lettre ? 

Et surtout, comment cette personne pouvait savoir ce qu'il avait fait ? 

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⏰ Dernière mise à jour : Apr 21, 2021 ⏰

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