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- Je passe devant! annonça Niall, surexcité par le programme.

Dépassant ses amis, il grimpa le premier par la fenêtre laissée ouverte de la maison abandonnée. Ils étaient arrivés comme prévu en début de matinée et avaient la journée devant eux pour visiter et se faire peur. Les autres entrèrent à la suite de Niall et soudain, tous étaient dans la  maison.

L'endroit par lequel ils étaient arrivés ressemblait à un vieux salon. Equipé d'une cheminée de pierre blanche sur laquelle était gravé un blason -sûrement celui de la famille qui vivait ici- il devait avoir été confortable. Un des murs de la pièce avait été tapissé, ou même peint, de façon à ce qu'il représente un paysage local, avec des arbres et une rivière. Les murs étaient peints en vert sapin et des lambris de bois terminaient de décorer la pièce. Les lampes accrochées aux murs verts étaient dotées d'abat-jours jaunis par le temps. Des tapis de couleurs et de matières différentes jonchaient le sol dont on ne distinguait même plus le  carrelage. Des portraits aux cadres dorés, représentant sûrement les  anciens membres de la famille, décoraient les murs à différents endroits très peu esthétiques. On aurait dit qu'ils n'avaient leur place qu'ici, dans cette pièce, mais qu'on n'avait pu dégager assez de place pour les y accrocher, et qu'on les avait donc mis ici au dessus d'une porte, là de travers, au dessus d'un vieux meuble dont on avait oublié l'utilité. Plusieurs sièges rembourrés dotés d'accoudoirs faisaient le tour d'une table ronde où était disposé un jeu de carte. Celles-ci étaient posées de sorte à ce qu'on aurait dit qu'une partie de carte était en route. Ce dernier détail donnait plus de vie à la pièce et Liam ne savait pas s'il  trouvait cela rassurant ou encore plus terrifiant.

Harry prit la tête du groupe et une expression de surprise se peignit sur son visage alors qu'il apercevait la seconde pièce, après le couloir dans lequel il s'apprêtait à poser le pied. Sûrement une salle à manger, dotée de murs roses et d'une longue table où les habitants devaient prendre la majorité  de leurs repas.

Les garçons se pressèrent derrière Harry et débouchèrent à leur tour dans le couloir. Avec ses murs jaunes et son parquet, il aurait pu paraître banal, si des crânes d'animaux cornus ne prenaient pas toute la place sur les murs. Liam ne parvenait pas à reconnaître la moitié d'entre eux, mais il remarqua que tous étaient datés. La plupart avaient été chassés en 1905, et Liam s'imagina la maisonnée, plus de cent ans plus tôt. Habitée par une famille, avec un père chasseur, qui passait plusieurs années de sa vie à fréquenter la forêt. Avec une mère qui lisait dans la  bibliothèque, leurs enfants jouant dans le jardin ou apprenant à jouer  aux cartes. Peut-être même y avait-il des domestiques à l'époque, qui  s'assuraient que le feu restait toujours allumé, la maison toujours  propre et qui préparaient de bons petits plats à toute la famille. Cette  idée apaisa un peu Liam et il sourit, se faisant la réflexion que la maison avait soudainement l'air beaucoup moins effrayante. Elle n'était qu'une bâtisse qui avait un jour connu la vie, l'amour, la chaleur. Aujourd'hui, tout ce qu'elle connaissait était ce petit courant d'air qui la traversait de part en part à cause de ses nombreuses fenêtres fissurées par des années d'effraction. Plus personne n'y vivait, mais le mobilier était resté totalement intact. La vie l'avait soudainement  quittée et tout était resté en place, attendant désespérément que la  famille continue à faire marcher le foyer. Mais cela était évidemment  impossible ; la maison était abandonnée depuis des décennies.

Liam songea alors que la famille qui y habitait n'aurait sûrement pas  souhaité cela. Que la maison dépérisse. Qu'elle tombe aux mains de jeunes en recherche de sensations, qui ne tenaient pas le moins du monde compte du fait que cette bâtisse était un sanctuaire. Voilà ce qu'elle était ; et elle perdurait le souvenir de sa famille aimante. Mais elle était dérangée dans sa tranquillité par des petits imbéciles qui ne  cherchaient qu'à se faire ridiculement peur. Liam avait l'impression d'avoir violé le spectre de cette famille, et il se sentit soudain mal à l'aise, comme un intrus.

- On ne devrait pas être ici, murmura-t-il, le visage grave.

Niall et Louis se tournèrent vers lui, moqueurs.

- T'as les chocottes Payno? Si tu veux, tu peux nous attendre dehors. Enfin... à condition qu'on revienne!

- C'est pas marrant, Louis. Cette maison a appartenu à des familles, et on entre dans leur  intimité comme si ce n'était qu'un détail. Des gens ont vécu ici, et je doute qu'ils auraient voulu qu'on s'amuse à leurs dépens.

- Liam a raison, intervint Harry. C'est pas très moral de faire ça.

- Sérieux, Haz, tu te dégonfles? lança Niall, déçu. Je croyais qu'on pouvait compter sur toi... Tant pis, toi et Liam n'avez qu'à ressortir. Perso je continue avec Louis et Zayn. Tiens, d'ailleurs, où il est?

Les quatre garçons se regardèrent, interloqués ; le brun n'était plus là. L'inquiétude commençait à s'installer dans leurs poitrines. Envolées, les réflexions morales : Liam voulait  seulement retrouver Zayn.

- Zayn? appela doucement Louis, désormais effrayé de briser le silence des lieux. Zayn?

Tous l'appelèrent à leur tour, mais sans réponse. Alors ils décidèrent d'un même mouvement de partir à sa recherche. Ils suivirent Louis qui avançait le plus vite possible dans le dédale de pièces sombres pour trouver de son meilleur  ami. Niall prit soudain les devants en tournant dans un couloir après une sorte de bibliothèque, et Liam le suivit pour être sûr de ne pas rester seul. Le souffle du jeune homme se coupa lorsqu'il entendit des bruits de pas qui n'étaient pas les siens ou ceux du blond qui le  précédait. Il n'était pas sûr de reconnaître ceux des bottes militaires de Zayn, et cela le fit angoisser encore plus. Niall et lui avancèrent dans un étroit couloir, le plus silencieusement possible. L'ambiance était si tendue que Liam avait bandé tous ses muscles, prêt à détaler à la moindre alerte. Les deux garçons avancèrent encore un peu jusqu'à ce que les bruits de pas s'alourdissent de plus en plus. Liam se figea, paralysé par la peur, et il sentit Niall faire de même. Ils se trouvaient au bout du couloir, tout près de l'encadrure d'une porte qu'ils ne voulaient pas franchir. N'osant même  plus respirer, Liam s'apprêtait à faire demi-tour, ou bien à rester sur  place et se transformer en statue, au choix, quand une silhouette apparut à l'encadrement de la porte.

NIGHT CHANGES [ziam]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant