Prologue

98 10 5
                                    

Le soleil se levait à peine sur les rues d'un petit quartier calme qu'il brillait déjà de mille éclats annonciateurs d'une chaleur extrême en ces périodes estivales. Dans une maison au jardin bizarrement verdoyant pour la saison, une jeune femme aux étranges boucles rousses éparpillées n'importe comment dormait à poings fermés, poitrine découverte et les fesses à peine cachées par la minuscule culotte qu'elle portait. Son corps suait à grosses gouttes et elle gémissait quelque peu d'inconfort sur son lit aux draps fleuris. Hier, son climatiseur n'avait pas pu supporter la chaleur des jours ensoleillés et l'avait abandonnée à son triste sort.

Elle s'agitait déjà quand son réveil produit un son désagréable pour la tirer de son sommeil. Sans trop résister, elle se redressa sur son seyant, évitant de donner un coup brusque à son ordinateur qui se révélait être son compagnon de nuit. Les pieds posés sur son tapis aux poils confortables, elle bailla grandement et étira ses bras avant de regarder autour d'elle. Tout en se frottant les yeux, elle fit un petit état des lieux et sa bouche fit une petite moue face à son propre désordre. Elle avait encore passé quelques heures à tenter d'écrire quelque chose de potable, mais rien de bien ne lui était venu à l'esprit. Se gardant de se donner une gifle, elle abandonna enfin son lit. Les yeux cernés, la peau grasse et les cheveux en nid, elle se rendit dans la salle de bain aux carreaux blancs et à la belle douche italienne où, sans se mirer une seule fois, elle fit sa toilette quotidienne d'un seul trait avec le strict nécessaire des produits d'hygiène qu'elle possédait.

Propre, elle sortit de la salle d'eau aussi vite qu'elle y était entrée pour retrouver l'ambiance nerveuse de sa chambre où pendait sur les murs gris des dizaines et des dizaines de post-it de toutes les couleurs, appuyées dans chaque coin de la pièce des étagères contenant des livres qu'elle avait personnellement écrits et publiés et ceux d'auteurs anciens et modernes qu'elle chérissait, ses vêtements s'entassaient dans la penderie qui pourtant était grande, mais elle n'avait jamais eu le courage de les ranger depuis son aménagement qui remonte à six mois déjà. Son lit, quant à lui, trônait fièrement dans la pièce et prenait appui à côté d'une des grandes fenêtres. Disposition qu'elle adorait car elle aimait bien voir l'extérieur lorsqu'elle se concentrait sur ses romans.

La rousse s'habilla sans prendre en compte si le mariage des couleurs ou même des vêtements choisis était possible. La jupe paysanne ultra-fleurie, la chemise à carreaux et les mocassins qu'elle avait enfilés pouvaient en témoigner. Ses mèches rebelles, quant à elles, n'eurent droit qu'à un rapide coup de brosse qui ne fit que les ramener au hasard en arrière et qui fit tomber certaines des fibres devant le visage aux multiples tâches de rousseurs de la jeune femme qui poussa un soupir de désespoir avant d'abandonner.

Une barre de céréale et une porte qui refuse de se fermer plus tard, la voilà au volant de sa voiture, le moral au plus bas. Pour cause, non seulement elle avait dormi dans une chaleur atroce, mais de plus la date de l'échéance pour rendre son manuscrit arrivait et elle n'arrivait pas à écrire quelque chose de bien. Rien de ce qu'elle avait mis sur papier ou dans son ordinateur ne lui plaisait et cela avait le chic de la foutre en rogne. Lorsqu'elle s'était mise, plus jeune, à l'écriture de roman érotique, ça avait été comme dans un rêve. Elle pouvait produire à l'infini. Bien qu'elle écrivît sous anonymat, elle se sentait si libre, si captivée. Ses mains semblaient frappées d'eux-mêmes sur le clavier. Mais maintenant, elle se retrouvait dans des impasses incroyables entre deux livres.

La jeune femme n'eut pas trop le temps de penser plus que ça à l'œuvre qu'elle devait mettre en page puisqu'elle fût devant son travail plus officiel, celui que sa famille connaissait, celui dans lequel elle l'encourageait. Pourtant elle, ce n'était pas ce qu'elle rêvait de faire. Elle s'imaginait plein de fois le lâcher et devenir écrivaine à temps plein parce qu'après tout et malgré son anonymat, elle avait assez de notoriété et de succès pour pouvoir en vivre sans se soucier de ce qui pourrait se passer demain.

Office Love [En pause]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant