Chapitre I : Noir et blanc

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Parmi les petits bohneurs du quotidien, le plus plaisant selon moi est de sentir le doux parfum des lavandes et des rosiers lors d'une belle matinée de printemps. C'est toujours si agréable de pouvoir ressentir la fraîcheur du vent, entendre le chant des oiseaux, courir dans les champs. Entre autre, se sentir libre.
Libre, mais pas toujours.

Aujourd'hui est un jour spécial, Charles fête ses 17 ans. La tradition familiale exige depuis des siècles, une cérémonie mémorable pour remettre à l'individu une malle. Il est formellement interdit pour tous les enfants de moins de 17 ans de connaître le contenu de celle-ci.
J'admets faire preuve d'une curiosité débordante, mais le fait de songer au châtiment que je pourrais recevoir si je venais à désobéir me fait délibérément retomber sur terre.
Avant de rejoindre le sous-sol de notre manoir où se déroule la cérémonie, je voulus tout d'abord me rendre dans le jardin. Je fis un bouquet de roses blanches que je nouai avec un grand ruban noir. Enfin, je glissai à l'intérieur du bouquet un mouchoir sur lequel était brodé « À tes 17 ans ».
Avec quelques minutes de retard, je rejoignis finalement le sous-sol, toute la famille fut présente pour l'événement, même les oncles et tantes que je n'avais pas vu depuis des années.
J'ouvris la porte. Tous les regards furent posés sur moi pendant une seconde. Embarrassée, j'allai offrir à mon frère le bouquet.

« Bon anniversaire Charles... » dis-je d'une voix basse.
Charles, plus charmant et soigné que jamais, sourit et prit son cadeau. La cérémonie débuta.
Après quelques minutes de discours, la fameuse malle fut remise à Charles, évidemment, il ne l'ouvrit pas devant nous et tâcha de remercier toute la famille.
La cérémonie touchait à sa fin, les invités se rhabillèrent et partirent. Moi, je préférais être bercée par le vent tout en observant le monde qui m'entoure  de ma balançoire. Pendant un moment, j'eus l'impression de pouvoir tout contrôler, d'être puissante, aussi puissante qu'un pieu dans le cœur et aussi puissante que les rayons du soleil.
Je fermai les yeux un court instant. Un cri me réveilla, un cri dévastateur, un cri stupéfait, comme lorsque l'on doit faire face à une réalité qui détruit tout espoir, qui coupe toute envie de continuer.
C'était Charles.
Je sautai de ma balançoire et courus vers la chambre de Charles. Mes parents étaient présents, je décidai de me faire discrète et d'écouter derrière la porte.

« C'est impossible. Il m'est impossible de faire de telles choses ! Comprenez-moi ! S'exclama Charles
-D'où penses-tu que viennent toutes ces réserves ? Nous nous nourissons ainsi ! Que tu le veuilles ou non, reprendre cette affaire familiale n'est autre que l'objet de notre survie. Tu t'y habitueras, rajouta mon père.
-Ton père a raison chéri, nous sommes atteints de l'ancien virus, faisant de nous des êtres indirectement assoiffés de sang. Nous ne pouvons pas tuer n'importe qui dans le monde extérieur, nous sommes dans l'obligation ton père et moi, d'emprisonner tout être se montrant un peu trop proche de notre manoir, ainsi nous avons de quoi nous nourrir, c'est de la survie, pas de la cruauté. »

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