Chapitre 4 : Silence

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Alors que le paysage Monégasque défile, je ne parviens pas à dénouer mes lèvres et engager une quelconque conversation.

Je suis tendue, sur la réserve et à fleur de peau. Son attitude agressive m'a quelque peu déstabilisée. Pourtant, j'ai déjà connu ce genre de comportement. Toutefois, je ne les ramène pas à mon domicile avec moi pour les prochaines semaines à venir. Je l'épie du coin de l'oeil, et remarque qu'il pianote sur son téléphone. À la manière dont il appuie frénétiquement sur les touches, j'en déduis que sa colère est toujours d'actualité.

— Putain, fais chier ! S'énerve-t-il.

— Quelque chose ne va pas ? 

— Rien qui ne te concerne ! Il y en a encore pour longtemps ? J'ai vraiment besoin de prendre l'air et de fumer !

— Et bien, il faut d'abord récupérer tes médicaments, mais on sera à la maison d'ici vingt minutes je pense.

Je le sens à bout, prêt à imploser, alors je tends la main vers le tableau de bord pour diffuser de la musique à l'intérieur de l'habitacle. Apparemment, nous avons la même intention car nos doigts se frôlent aux abords du bouton on. Je les retire précipitamment, comme si je m'étais brulée et il émet un rire narquois.

— Ça va, détends-toi, les blessures par arme blanche ne se refilent pas ! Il me darde d'un regard mordant.

— Désolée, euh ce n'est pas ça, je ... 

— C'est bon, ne dis rien ! Je m'en tape !

Milann semble posséder ce don de glacer l'atmosphère rien qu'avec son attitude. Mon pouls bat dans mes tempes, et j'ai moi aussi hâte de fouler le sol, loin de l'ambiance de cette voiture qui me comprime le thorax.

Je gare mon véhicule tout près de la pharmacie, et récupère l'ordonnance sur le siège arrière. Je me précipite vers la croix verte qui clignote tout en cherchant mon souffle. Décidément, je pressens que ce jeune homme va rendre mon quotidien invivable avec sa conduite exécrable.

Je présente l'ordonnance à la jeune femme souriante qui m'accueille avec un sourire chaleureux.

— Bonjour Mlle Kazarev, tout va bien ? Vous êtes un peu pâle ! me demande-t-elle.

— Tout va bien merci, je lui réponds. Je suis simplement pressée de rentrer. Journée épuisante.

Elle prépare le tout pendant que je me ronge les ongles.

— Voilà, il faudra repasser dans deux semaines pour le renouvellement des antibiotiques de ce fameux Milann. Est-ce que vous avez eu de nouvelles crises depuis la dernière fois ?

— Non. Aucune.

— Bien, c'est une bonne nouvelle, les thérapies cognitives sont souvent plus efficaces que les antidépresseurs. Je vous invite à poursuivre et surtout à rechercher le calme et la sérénité. Bonne fin de journée Mlle Kazarev. Passez mes amitiés à Thomas.

— Merci beaucoup. Au revoir.

Le calme et la sérénité ? Avec l'énergumène effronté qui m'attend ? Cela semble fortement compromis. Je retourne à reculons vers ma voiture, prends trois longues inspirations tout en posant ma paume sur ma poitrine et en visualisant mentalement un panorama agréable. L'irritabilité qui émane de lui, et le fait de parler de mon trouble sont des situations qui me rendent nerveuse. Au bout de quelques secondes, légèrement apaisée, je rouvre subtilement les yeux et constate avec surprise que Milann me fixe.

Je baisse la tête, encore, et récupère ma place derrière le volant, ses iris sombres toujours posés sur moi. Je déglutis et dépose son paquet sur le siège arrière.

Lose Me To Love YouOù les histoires vivent. Découvrez maintenant