Chapitre 4

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Ils sont de retour et ils grandissent ^^ 

Bonne lecture !

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Kay, 15 ans

— Monte ta garde, Kay ! Voilà ! Deux pas en arrière. Accroupis-toi ! Esquive ! Pas mal !

J'entendais les mêmes paroles depuis deux heures. Mon cerveau s'était fait la malle. Je ne réfléchissais plus. J'obéissais comme un soldat. C'était le but. Que je réagisse aux ordres plus vite que mon ombre et sauve ma peau le jour où il le faudrait. Je dégoulinais de sueur. Sans savoir pourquoi, Papa avait été plus agressif aujourd'hui. Ses coups pleuvaient et si je ne parais pas assez rapidement à ses attaques, je prenais une beigne la seconde suivante. Quand il me permit de m'arrêter, je m'affalai sur un tronçon de bois, épuisé, essoufflé et la gorge sèche.

— Tu t'es bien débrouillé, me félicita-t-il.

Il me tendit une gourde d'eau que je saisis et vidai d'un trait. Mon père me scruta. Que voyait-il ? Son adolescent de quinze ans bientôt recouvert de bleus ou son futur guerrier implacable ? Le serai-je un jour ?

— Je n'ai peut-être pas été tendre... Mais il faut que tu sois prêt à toute éventualité. Si quelqu'un de mal intentionné venait à entrer dans le village avec des troupes, tu feras partie de la première ligne de protecteurs.

Autant dire les plus expérimentés. Mon père s'efforçait d'enseigner aux femmes, hommes et enfants à se battre ou à se défendre. Il n'y avait aucune restriction. Quiconque désirait se battre était le bienvenu dans son escouade. Mellée savait coucher des gabarits plus gros qu'elle. Ma mère déboitait des épaules, plus vite qu'un clignement d'œil.

Je détaillai les soldats de mon père. Il y avait là une dizaine d'adultes plus musclés les uns que les autres - Bathy les surpassait tous d'une tête – et trois mecs qui auraient bientôt dix-neuf ans. Au village, seul Nino avait quinze ans comme moi. Si au départ, Mellée n'avait pas su donner un âge à mon meilleur ami à cause de sa malnutrition, elle avait revu son jugement l'année suivant son arrivée. Nino avait grandi, s'était épaissi, et même s'il ne me rattrapait pas en terme de carrure, il s'élevait maintenant à la même hauteur que moi. On faisait la même pointure, le même périmètre crânien. On aurait pu passer pour des frères si seulement il n'avait pas des yeux et des cheveux si noirs.

On avait donc quinze ans. On était tout le temps fourrés ensemble. La seule différence entre nous : j'étais passionné par le combat au corps à corps, la maîtrise des armes que les technologues rapportaient, et lui préférait s'occuper de son potager. On passait deux à trois heures éloignés par jour. Ensuite on se retrouvait. On partait dans la forêt et on explorait. C'était notre truc et personne ne nous demandait de compte là-dessus.

J'avais hâte de rentrer le voir, me demandant s'il serait toujours auprès de ses plantations de fraises. Depuis qu'il en avait trouvé en forêt et avait surveillé durant des jours ses boutures, il bichonnait ses pieds comme des enfants. Parfois je m'inquiétais pour sa santé mentale. Puis, mes yeux tombaient en général sur Bathy, son père adoptif, et je comprenais d'où lui venait cette passion.

— Je retourne au potager, tu m'accompagnes ? m'interrogea justement le soldat aussi large qu'une montagne.

Est-ce que j'avais vraiment besoin de répondre ? Je sautai de ma souche et le rejoignis en deux enjambées. J'avais grandi ces deux dernières années mais Bathy semblait aussi grand et inébranlable qu'un séquoia. Je ne le rattraperai jamais. J'espérais déjà rattraper mon père une fois adulte. Devenir aussi large, robuste et fort que lui.

— Pourquoi mon père était plus dur aujourd'hui ? questionnai-je sur la route.

Le soldat hésita, me toisa d'un œil, jaugeant peut-être de ma capacité à entendre l'information.

Absolu [sous contrat d'édition]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant