Chapitre 12 ~ Élections

177 14 0
                                    

Vendredi soir, Pierre se rendit chez Kate. Il avait demandé auprès d'une de ses amies ses cours de la semaine pour les lui apporter. Elle avait accepté, avec quelques réticences.

Seules les lampadaires éclairaient la ruelle sombre. Le mois d'octobre et l'heure tardive combinés, la pénombre et l'obscurité étaient de mise. Pierre rajusta son bonnet, l'enfonça un peu plus sur ses oreilles, referma son manteau avant de finalement trouver le courage de pousser le portillon. L'atmosphère semblait presque lugubre, cela suffit pour l'impressionner. Il mentirait si il disait que sur le chemin fait de pavé, il n'avait pas pensé plusieurs fois à faire demi-tour.

Il sonna à la porte d' entrée, et quelques minutes plus tard, la mère de Kate vint lui ouvrir.

"_ Oh Pierre, quelle surprise."

Pierre déglutit. Sa voix ne laissait pourtant transparaître aucun étonnement. La mère de sa copine m'avait toujours beaucoup intimidé. Ses lèvres maquillés d'un rouge mate formaient un "o" parfait. Ses cheveux blonds, aussi blonds que ceux de Kate, descendaient sur son épaule en cascade. Ses yeux clairs étaient plissés et le transperçaient. Les traits de son visage lui donnaient un air austère et sévère. Elle respirait l'autorité.

Elle était d'ailleurs l'une des principales raisons qui poussaient Pierre à ne jamais (ou que rarement quand la situation l'y obligé) venir ici.

"_ Bonjour Madame. J'ai les cours pour Kate."

Il désigna d'un mouvement de tête les feuilles qu'il tenait entre les mains.

"_ Super, dit-elle avec un sourire de façade."

Elle s'écarta de la porte pour le laisser passer.

"_ Elle est dans sa chambre, mais tu peux aller les lui apporter si tu veux."

Pierre la remercia silencieusement de l'avoir laissé entré. Le froid de l'extérieur commençait à sérieusement lui piquer les joues. De plus, il était satisfait de pouvoir remettre ses cours en mains propres et s'assurer qu'elle allait bien de ses yeux.

Il monta d'un pas rapide les escaliers et après un faible "toc toc" contre le bois de ma porte, il entendit un "entre" prononcé d'une voix aussi frébile que chevrotante.

Pierre trouva Kate emmitouflée dans la couette de son lit. Son volet était fermé et la piège était totalement plongée dans le noir. Seule la lumière du couloir éclairait le visage étonné de la blonde.

"_ Pierre ? Qu'est-ce que tu fais là ?"

Il posa le paquet de feuilles sur son bureau et s'approcha d'elle. Il lui expliqua d'une voix douce pour ne pas aggraver sa migraine (il se doutait que si elle était plongée dans le noir, ce n'était pas pour rien).

"_ Je suis venu t'apporter tes cours. Et voir comment tu te sentais.

_ Fatigué, grogna-t-elle. Et j'ai trop mal à la tête. Et au ventre. Et je tousse et je suis enrhumée.

_ Ah oui quand même..."

Pierre s'écarta imperceptiblement d'elle.

"_ Je ne pense pas revenir au lycée avant mercredi, souffla-t-elle d'une voix enrouée."

Une quinte de toux la prit.

"_ Ne t'en fais pas. Prends soins de toi."

Il lui serra gentiment la main. Quand il remarqua qu'elle commatait, il la lâcha et s'en alla à pas de loups. Il salua poliment la mère de Kate, qui lui renvoya un sourire tiré, et partit de chez elle.

~oOo~

Le week-end de Pierre ne fut pas le plus reposant de sa vie. Son frère, dont l'idée de partir à l' étranger ne n'avait pas quitté, avait commencé à faire des cartons. Où que Pierre aille, il y en avait ! Parfois, il trouvait des rouleaux de rubans adhésifs dans des endroits improbables, comme dans le réfrigérateur.

Pour échapper à tout cela, à tout ce déménagement qu'il s'évertuait à ignorer et à nier, il avait envoyé un message à Guillaume :

> à Guigui 🍺
Salut, on se retrouve au terrain de basket pour jouer ?

Bien évidemment, le dit Guillaume avait accepté sans poser aucune question, et sans monter la moindre hésitation à le rejoindre. Les deux adolescents s'étaient donc rencontrés là-bas toute l'après midi.

Cela avait permis à Pierre de s'échapper de la réalité de sa vie durant quelques heures.

~oOo~

Comme prévu, Kate fut absente lundi, ce qui permit à Pierre de passer plus de temps avec Fred et Guillaume. Ben se joignait parfois à eux, bien qu'il passait le plus clair de son temps au CDI.

Durant leur cours avec leur professeur principal, ce dernier leur parla des élections des délégués. Il leur annonça qu'elles auraient lieu dans la semaine et que ce retard était dû à une erreur de la part de l'administration. Il leur avait demandé ensuite qui voulait se présenter.

Comme l'avaient dit Ben et Pierre à Fred quelques jours auparavant, ils ne se proposèrent pas. Au contraire, on aurait dit qu'ils s'étaient ratatinés sur leurs chaises, pour se faire le plus petit possible.

Un certain Maxime leva la main pour se présenter, ainsi qu'un Fabien et une Léna.

Pierre les connaissait tous les trois seulement de vue et n'avait pour le moment aucune idée de pour qui il allait voter.

Il avait déjà discuté quelques fois avec Maxime et les deux adolescents s'entendaient plutôt bien, ayant des centres d'intérêts. Pierre allait certainement voter pour lui.

Pour Ben, ce fut davantage compliqué. Étant nouvel élève, il n'avait pas eu le temps de sympathiser avec toutes les personnes de la classe. Il ne savait d'ailleurs même pas leur nom !

Les élections eurent donc bien lieu le lendemain, sur le temps de leur cours avec leur professeur principal. Chaque élève prit les bouts de papiers avec les noms inscrits dessus, alla dans l'isoloir, vota, ressortir, donna leur enveloppe et finalement, signa le registre.

Avant que Ben n'aille à son tour voter, il s'était tourné vers Pierre, Guillaume et Fred.

"_ Je n'ai aucune idée de qui je vais mettre.

_ Moi non plus, avoua Pierre. Et puis deux jours, ça fait pas beaucoup pour réfléchir."

Finalement, Ben mit le nom de Lena dans l'enveloppe. Quant à Pierre, il vota comme prévu pour Maxime.

Une fois que tout le monde fut passé, on dépouilla les enveloppes. Ce fut Maxime qui fut élu dès le premier tour et Lena fut la seconde.

Le Verrecroce... au lycée ?!Où les histoires vivent. Découvrez maintenant