Aspenn

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Je n'ai pas la force de courir dans les couloirs pour rejoindre ma classe, ce qui est d'ailleurs interdit dans le règlement intérieur. J'ai toujours rêvé d'étudier dans un château, il remplaçait le château dans lequel j'aurais aimé vivre. Mais aujourd'hui, à ce moment précis, je maudit chaque mètre qui me sépare de la salle de classe. En rentrant dans le bâtiment, j'ai de suite regardé le numéro de salle attribué à ma classe, par chance, ils étaient encore affichés, mais la salle dans laquelle je devais aller était dans la plus haute tour du château. Super. Je cavale donc en boitillant à moitié dans les couloirs, espérant – enfin – rejoindre ma classe. Je vérifie une dernière fois l'heure avant d'enter : il est 9h20, j'ai donc 35 minutes de retard dès le premier jour. Je prends mon courage à deux mains et frappe à la porte qui me fait face.

- Entrez !

J'ouvre la porte et entre sans me faire prier. Après avoir refermé la porte le plus discrètement possible derrière moi pour ne pas me faire remarquer, je me retourne pour trouver une place mais je reste tétanisée. Plus d'une vingtaine de visages sont tournés vers moi dans le silence le plus total, j'entends même une mouche voler, vraiment. Certains visages sont neutres, d'autres ont l'air agacés. Certains ont tout de même l'air de s'amuser de la situation. Une chose est sûre je ne connais personne, c'est ma première année à Blossombay Highschool après tout. Je ne reconnais personne sauf April, au fond de la salle, au bord des larmes tellement elle se retiens de rire.

- Mademoiselle, si vous voulez bien vous asseoir, il me semble que vous n'avez pas plus de temps à perdre. 35 minutes de retard le jour de la rentrée ? Remarquable. Vous êtes ?

Je sors de ma stupeur et bafouille :

- Aspenn Darkqueen monsieur

- Très bien mademoiselle, j'espère que vous vous rattraperez pendant le reste de l'année.

Il marque une pause avant d'ajouter :

- Vous-pouvez-vous-asseoir.

Je n'aime pas du tout le ton qu'il emploi avec moi, je suis en retard, je suis pas débile. Je lui lance un regard noir qu'il décide d'ignorer. Il enchaîne avec un discours sur l'assiduité et la ponctualité, mais je ne l'écoute plus, trop occupée à trouver une place et à faire la fière, ce qui est ridicule car au fond de moi j'ai honte d'être arrivée en retard à cause d'un stupide garçon. D'autant plus que je commence à connaître la chanson. Depuis mes 6 ans, c'est-à-dire l'âge où j'ai obtenue une bourse afin d'étudier dans les établissement privés réservés au enfants des personnages de compte de fée – bon ou mauvais- on nous rabâche l'importance de l'image qui émane de nous. Être présent, à l'heure, porter nos uniformes repassés... Tout ces trucs stupides qui me rappelle à quel point je suis différente d'eux, à quel point j'ai envie d'être comme eux et surtout à quel point je ne serais jamais comme eux, car je ne suis que la fille de la méchante reine.

Je passe le reste de la matinée perdue dans mes pensées, à ruminer ma mauvaise humeur... Quand la sonnerie de la pause déjeuné retenti, je le vis comme une libération. Je saute de ma chaise et fonce vers la sortie quand j'entends dans mon dos :

- Mademoiselle Darkqueen, une minute s'il-vous-plait !

Je me stoppe net dans mon élan. Je n'ai aucune envie de parler au professeur, mais j'ai conscience du fait qu'il faut que je redore mon image auprès de mon professeur principal. Je croise le regard d'April, et lui fait comprendre en un regard que je la rejoindrais plus tard. Elle me répond par un hochement de tête et un pale sourire. Elle est déçue c'est clair. On aurait dû se voir ce matin avant d'aller en cours, manger ensemble ce midi... Et finalement je ne lui ai pas adressé la parole de la journée. Ce n'est pas comme ça que j'imaginais notre rentrée au lycée, mais April est ma meilleure amie et je sais qu'elle comprend.

Nous nous sommes rencontrées pour la première fois le jour de ma rentrée en primaire, mon premier jour dans l'institution royale. J'étais seule, comme tous les enfants de « méchants ». Tous les enfants de « gentils » s'étaient ligués contre moi. Pas très royal et pas très gentil, mais ils ont eu la chance de naître du bon coté de la force. J'ai donc passé la matinée seule à subir les moqueries des autres, mais à la pause déjeuné April à pris ma défense contre tous le monde et est venue manger avec moi. Ce jour-là j'avais un sandwich rassi au thon et une pomme rouge , car j'adorais ça. April n'aimais pas ce que lui avait préparé sa gouvernante, alors je lui ai proposé mon dessert. J'ai regretté sur-le-champs : la fille de la méchante reine qui propose une pomme rouge à la fille de Blanche-Neige, quelle idiote ! Mais contre toute attente, April a rit, à pris ma pomme et à croquer dedans. Elle m'a fait un clin d'œil après m'avoir confié que les pommes rouges étaient son fruit préféré. Depuis, nous étions inséparables. Notre vie était rythmée de rires, de pommes rouges et malheureusement de mensonges...

Nos parents ont vites appris que nous étions amies et nous ont imposés une règle très stricte : nous n'avions pas le droit d'aller l'une chez l'autre. April n'avait donc pas idée de la vie que je menais hors de l'école et de nos moments en ville toutes les deux. Elle n'avait pas idée des difficultés que je rencontrais, mais au fond je préférais qu'il en soit ainsi. Je me sentais plus proche d'elle, comme elle, même si notre amitié était basée sur un tissu de mensonges. Cependant, depuis quelques temps, les choses étaient en train de changer. April était une future reine, elle serait bientôt à la tête du principal conté de Blossombay, et elle aurait de moins en moins de temps à m'accorder. Nous ne nous sommes pas vu de tout l'été, c'était la première fois depuis que nous étions amies. Malgré tout, je sens, je sais que des liens très forts nous unisse toujours. Et nous sommes tout à fait capable d'avoir une conversation sans parler.

Je me retourne pour faire face à mon professeur, armée de mon plus beau sourire d'élève studieuse.

- Oui monsieur ?

- Je voulais m'entretenir avec vous à propos de deux trois petites choses.

- Je vous écoute.

- J'espère que votre retard de ce matin a une bonne excuse et qu'il ne deviendra pas habituel. Je ne tolérerais aucune erreur venant de vous.

- Non, bien-sûr que non. J'ai eu des soucis de transports ce matin, mais cela ne se reproduira pas.

- Très bien, mais inutile de me mentir, je vous ai vu dans le parc avec Onyx, cette salle offre une très belle vue sur l'ensemble du parc et du terrain de polo.

Je tombe de 10 étages, si ce n'est 100. Je sens le rouge me monter au joue, et j'ai soudain terriblement chaud.

- Je... Ce n'est pas...

- « Ce n'est pas ce que vous croyez », je sais. Pour être honnête avec vous mademoiselle Darkqueenn, je ne suis pas pour la présence d'élèves issus de familles... néfaste pour la royauté. C'est une école royale, prestigieuse, ce n'est pas une école pour les pestiférés de votre espèce.

Je suis sincèrement choquée et outrée de ses propos. Je suis tétanisée, tellement la colère est intense et puissante. J'ai envie de lui hurler dessus, de le maudire, de lui dire à quel point il a tord et ne sait pas du tout de quoi il parle. Mais je suis plus intelligente que tout ça. Et pour ne surtout pas lui donner raison, j'affiche mon plus beau sourire, et avec le ton le plus mielleux possible lui répond :

- Bien-sûr monsieur, je comprends tout à fait !

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⏰ Dernière mise à jour : May 28, 2021 ⏰

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