Chapitre 4 : Je te vois

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Ma vision est trouble, mais j'essaie de fixer un point dans la brume qui m'entoure. J'espère qu'on ne va pas encore m'injecter une drogue quelconque qui me ferait sombrer à nouveau. Il me semble entendre des sanglots. Ma mère est sous le choc et elle n'est pas la seule... J'entends qu'on se racle la gorge et le silence prend place. Je me concentre pour restaurer ma vision, mais elle reste trouble pendant quelques instants...

— Excusez-moi, mais je dois vérifier les constantes de Mary, vous permettez madame Girard. Je vais devoir vous demander d'attendre dans le couloir un instant.

— Bien sûr, madame. Je reviens dans quelques minutes, me chuchote maman.

Il est hors de question que je reste seule avec cette femme qui me veut du mal. Elle ne doit pas avoir la moindre chance de me mettre en danger. Je me focalise sur un point au loin et je commence à voir les contours d'une porte. Ma mère se tient au centre. Je la reconnaîtrais entre mille. Elle est toujours vêtue de couleurs improbables. Aujourd'hui ne fait pas défaut, elle porte du vert et du rose.... mouais je sais, c'est pas top comme mélange ! Elle me fixe et j'essaie de lui faire comprendre qu'elle doit rester pour me protéger. C'est une question de vie ou de mort, littéralement parlant. J'essaie de froncer les sourcils, de lui lancer un regard pour qu'elle comprenne. Je pense qu'elle se pose des questions, car elle reste là à m'observer sans un mot.

— Mary, nous allons commencer. Il va falloir être courageuse, ça risque de piquer. Je vais nettoyer tes blessures et changer tes vêtements.

Elle est étrangement calme étant donné ses projets macabres. Fabienne n'a pas l'air perturbée le moins du monde alors qu'elle criait il y a peu quand elle a vu que j'avais les yeux ouverts...

— Je vais rester pour ses soins, prévient ma mère.

— Bien sûr, madame Girard, je vais juste vous demander de rester en retrait.

Je l'observe de loin. Elle a l'air stressée, mais je la fixe. Je veux qu'elle comprenne que je suis en danger. Ma petite maman, si tu savais ce que je traverse. Si seulement je pouvais remuer les lèvres et te raconter tout ce que j'ai vécu depuis mon réveil. Quel cauchemar je vis actuellement.

Les soins commencent et c'est un supplice... j'ai tellement mal que j'en tremble. Je sens mes joues se nimber de larmes. Je suis blessée au visage, aux bras et aux jambes. Ce ne sont que des égratignures pour le corps, mais mon visage... je n'en suis pas aussi sûre. Mais je souffre surtout de cette situation impossible.

— Encore un effort, c'est presque fini. J'irai chercher le Docteur Marek juste après, me dit Fabienne.

Je subis les assauts des produits désinfectants sur ma peau ultra sensible. Ma mère me donne toute la force nécessaire pour me permettre de garder le contrôle de la situation. Si tant est que je puisse garder le contrôle de quoi que ce soit en cet instant. Une fois les soins terminés, Fabienne sort de la pièce non sans un dernier regard dans ma direction, comme pour s'assurer que la situation est bien réelle. Mais elle l'est et je suis consciente de tout, même enfermée dans ce corps qui ressemble à une prison... mais dont je m'évaderai. Je le sens au fond de moi, le réveil est proche. J'ai déjà franchi un cap en ayant réussi à ouvrir les yeux. Ce n'est que le début. Une fois seules, je lance un regard sur ma mère. Elle me fixe, les larmes aux yeux. Les épaules secouées de spasmes... elle pleure en silence. Comme je la comprends, la situation doit lui paraître bien étrange et elle doit se poser mille questions. Auxquelles je voudrais lui répondre... mais l'heure n'est pas à la parole. Du moins pas encore. On frappe à la porte doucement. C'est le Docteur Marek. Elle entre sans un mot. M'examine. Le regard sombre... Je ne me sens pas rassurée... une sensation étrange s'insinue au fond de mon esprit. Ma mère sursaute quand elle prend enfin la parole.

— Votre fille a une commotion cérébrale. Elle risque d'avoir les idées un peu confuses pendant un temps. Si elle pouvait nous raconter ce qui s'est passé et qui l'a enfermée dans le placard... cette situation est très inquiétante... Nous avons prévenu les services de police pour qu'ils mènent l'enquête. Nous devons comprendre ce qui a bien pu se passer... En attendant, je ne saurai que vous conseiller d'être prudente.

— Merci Docteur, c'est très prévenant de votre part. Je ne comprends pas non plus ce qui a pu se passer et qui en voudrait à Mary... elle n'a pas bougé depuis trois longues années...

— Nous allons attendre les forces de l'ordre pour tirer ça au clair. Vous n'êtes pas seules. Nous allons également restreindre le personnel affecté aux soins de votre fille.

À ce moment, dans ma tête, tout devient confus. Comment expliquer ce qui m'arrive sans pouvoir prononcer un seul mot ? Comment exprimer quelque chose que je ne comprends pas moi-même ? J'observe tour à tour ma mère et le Docteur...

Réfléchies Mary ! Tu ne peux pas rester sans défense comme ça, ça n'est pas possible. Il faut que tu bouges ! Allez bouges ! Tu peux le faire !

Une brûlure me parcourt tout le corps et mon bras droit se tend en direction de ma mère. Ça y est ! Les sensations commencent à revenir dans mes membres. Mais ça fait un mal de chien ! Des brûlures se diffusent dans tout mon membre et irradient tout sur leur passage, c'est bon signe, non ? Mais je ne peux toujours pas parler... Après ce mouvement aussi inattendu qu'épuisant, je sombre de nouveau dans un abîme infernal.

Into The Darkness (en pause)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant