Chapitre 1 : L'éveil

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Un bruit...

Un murmure...

Une voix que je ne reconnais pas...

Je ne sais pas où je me trouve.

Je suis plongée dans l'obscurité la plus totale.

Je cherche à comprendre...

Rien...

Il n'y a rien !

J'essaie de ne pas m'affoler mais... je n'y arrive pas !

Non.

C'est foutu !

Soudain prise de panique, mon cœur se met à tambouriner dans ma poitrine.

Je me mets à crier aussi fort que je le peux au point d'en perdre la voix.

Du moins c'est ce qu'il me semble.

Puis, je m'évanouis.

C'est le trou noir...


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Dans le brouillard qui m'entoure j'entends des murmures, des bruits de pas, des cliquetis. J'essaie d'ouvrir les yeux, mais je ne peux pas. J'essaie de bouger, mais rien ne se passe. Je m'obstine, mais ne parvient qu'à gémir faiblement. Je sens une présence toute proche. Quelqu'un me touche l'épaule... tout doucement... un effleurement, comme pour essayer de m'apaiser. Mes muscles se détendent légèrement. Je me sens plus sereine, mais mes yeux refusent toujours de s'ouvrir. Je me concentre, cette fois, je me dis que je peux y arriver. Je dois y arriver. Mais je ne contrôle plus mon corps. Les murmures se transforment peu à peu en mots, puis en phrases. J'essaie de comprendre ce qui se passe autour de moi, qui est près de moi, où je me trouve tout simplement.

— Elle a gémi, dit une femme.

— C'est impossible, répond une autre. Personne n'a jamais refait surface après un tel traumatisme. Vous espérez tellement qu'elle se réveille que vous avez cru entendre quelque chose. Mais, je vous le répète depuis des semaines, votre fille est en état de mort cérébrale. Vous devriez vraiment songer à ce qui serait le mieux pour elle.

— Je ne peux pas, elle a l'air de souffrir. Elle est si crispée. Je sais qu'elle est là, quelque part, qu'elle m'entend ou sent ma présence. Soupire la femme, ma mère...

Ma mère ! Mais qu'est-ce qu'il se passe enfin ? Pourquoi je ne peux pas bouger ? Pourquoi je ne peux pas parler, ni ouvrir les yeux ? Je sens un liquide couler sur mes joues. Je pleure. Du moins j'ai l'impression de pleurer. J'entends des bruits de pas s'éloigner. J'ai envie de crier, de montrer que je suis bien là, que j'entends, que je suis vivante. Encore une fois mon corps me fait défaut et je sombre dans l'inconscience.


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Je me retrouve propulsée violemment de mon siège passager. Il est tard et on est sortis pour s'amuser avec Adam. Comme tous les vendredis, on a été chercher Lily à la Fac pour se faire un week-end entre potes. Sans oublier Cindy, sa copine qui a toujours de bonnes idées pour passer le temps. On revient de Belovely, la nouvelle boîte de nuit de la ville qui a ouvert il y a tout juste une semaine. On s'est tous bien amusés, on a dansé toute la nuit et on a aussi un peu bu. Trop bu. Adam n'aurait pas dû prendre le volant. En même temps, personne d'autre n'aurait pu ce soir-là. On ne voyait pas le mal, on n'avait que quelques kilomètres à parcourir pour rentrer chez moi. Une demi-heure plus tôt, la décision avait été prise... tout le monde dormirait à la maison. Mais tout ne s'est pas passé comme prévu. On a dû être plus fatigués et plus bourrés qu'on croyait. Il faisait si noir et la route n'était pas éclairée. On n'aurait pas dû prendre la voiture... Un camion est sorti de nulle part au détour d'un virage... Adam a freiné, mais trop tard... et la voiture a percuté de plein fouet le camion... On a fini par faire des tonneaux et je me suis retrouvée propulsée à travers le pare-brise avant. Comme une poupée de chiffon.

Je n'ai rien senti...

Mais voilà, il y avait du sang partout et on a commencé à entendre un bruit de liquide qui se répand... ça m'a inquiété et je me suis demandée d'où ça pouvait venir. Et puis les questions se sont bousculées dans mon esprit. Est-ce que tout le monde était sorti de la voiture ? Est-ce que quelqu'un pouvait appeler les secours ? Un bourdonnement a résonné avant qu'une onde de chaleur ne se répande. Comme une allumette... c'est ce à quoi j'ai pensé... puis l'odeur de brûlé est venue... des cris aussi. J'ai cherché les autres du regard, je ne voyais qu'une épaisse fumée. Je ne distinguais rien d'autre que des flammes qui s'élevaient dans le ciel obscur.

Je ne pouvais pas bouger ni même crier. J'étais paralysée par la peur... du moins c'est ce que je pensais. Jusqu'à ce que les secours arrivent... Des lumières aveuglantes ont surgi de nulle part éclairant le ciel sans lune. Une lance à incendie... des projections... des personnes qui s'affairent. Des personnes courageuses qui se battent pour nous... Je me suis sentie un instant soulagée. Nous allions être sauvés.


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Il fait toujours noir quand je me réveille. Je ne sais toujours pas où je suis, mais j'essaie de me concentrer sur les bruits alentour. Je ne peux toujours pas bouger. Je ne me rappelle de rien... ou plutôt je ne veux me rappeler de rien. Je sens qu'un grand malheur est arrivé. J'ai peur. Je me sens si seule que c'en est terrifiant. Une voix résonne au loin. Cette voix chaude et agréable ne m'est pas inconnue. Je me concentre sur cette voix masculine que je n'arrive pas à nommer. Quelqu'un s'approche de moi. Une femme me parle, mais je m'accroche à la voix qui disparaît peu à peu.

— Mais qu'est-ce qui te rend si triste aujourd'hui ? Tu pourrais me répondre quand même.

Des bruits de pas... Je sens qu'on s'approche de moi. J'essaie d'ouvrir les yeux, mais j'ai mal... j'ai si mal... Ma gorge brûle, je ne peux toujours pas parler ni bouger. J'ai de plus en plus peur. Je ne comprends pas ce qui m'arrive. J'entends, mais ne parle pas, ne bouge pas... Je sens une main sur mon front. Elle est fraîche et m'apaise. Maman. Je sais que c'est elle. Ça ne peut être qu'elle. Il faut que je lui parle, que je lui demande ce qu'elle sait et ce qui m'arrive. Un soubresaut... mon index se met à trembler légèrement... comme une décharge électrique qui me traverse le doigt. On me tient la main avec force. Je sais que je ne rêve pas. J'ai réussi à bouger. J'en suis sûre. Je sais qu'elle l'a senti. Elle attend sans me lâcher. Je sens son regard sur moi. Mais je ne peux toujours pas ouvrir les yeux... j'aimerais tellement pouvoir la regarder.

— Mary, tu m'entends ? Je suis près de toi. C'est maman.

J'essaie de lui répondre, de lui dire que oui je l'entends, que je sais qu'elle est là et que je suis là aussi. À l'intérieur. Emprisonnée...

Into The Darkness (en pause)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant