Ce fut un temps où le soleil brillait encore de toute sa splendeur, où les fleurs s'ouvraient sans craindre de perdre leur éclat ; ce fut un temps où j'étais encore Coré, la fille resplendissante de la déesse Déméter.
J'aidais beaucoup aux travaux manuels, j'aimais sentir cette satisfaction qui nous est propre lorsqu'on achève l'une de nos taches. Mère ne manquait pas d'ailleurs de me montrer sa fierté, et j'étais heureuse de pouvoir me montrer digne d'elle. Certes, moi aussi j'étais aidée par les nymphes des bois, avec qui j'ai passé toute mon enfance, mais son regard demeurait avec cet éclat de bonté et d'amour ainsi que de gratitude, telle une bonne mère envers son enfant.
Mère se plaignait beaucoup de l'Olympe. Se rendre à la demeure des dieux était pour elle un fardeau, du moins, c'est ce qu'elle ne cessait de répéter. Elle voyageait beaucoup également, mais jamais, jamais elle ne me laissait seule. Elle veillait à ce que je sois toujours entourée de nymphes. Une fois je lui ai demandé pourquoi. Elle a froncé les sourcils, me dévisageant, avant de poser un baiser sur mon front.
« Je ne tiens pas à ce qu'un de ces pervers de dieux mette la main sur toi » m'avait-elle murmuré à l'oreille.
Je grandis donc avec cette image des dieux, coupée de leur monde sur mon île de Sicile, dans l'insouciance et la joie de vivre.
Oh oui, quelle joie de gambader dans la nature, libre, avec cette sensation d'être vivante ! Si vivante. J'étais si vivante, mais tellement naïve.
J'aimais énormément sentir le soleil caresser ma peau qui demeurait pourtant d'un blanc divin. A mes quatorze ans, alors que je ne m'étais pas protégée des coups de soleil, je demandais à Mère de m'expliquer pourquoi je ne bronzais pas moi. Elle se mit à sourire, d'un sourire plutôt mélancolique je dirais à présent.
« Les divinités ne bronzent pas au soleil »
Sur ce, elle s'en allait, me laissant là, assise dans l'herbe, à l'ombre des arbres.
Mère ne parlait guère de mon père, d'ailleurs, je su son identité assez tard, vers mes seize, ou peut être dix-sept ans, alors que j'avais atteint ma maturité de femme. Maturité, oui, c'est le mot qu'employait Mère, mais je ne l'étais que trop peu mentalement.
Le jour de mes dix-sept ans, la peur se sentait dans son regard. Elle me regardait couper la brioche qui m'était fétiche à chacun de mes anniversaires, d'un regard triste et vide. Je ne su que peu après pourquoi.
Derrière elle se tenait un puissant homme. Ses yeux électriques se posèrent sur moi un long moment et je déglutis. C'était lui. C'était mon père. Il esquissa un léger sourire lorsque je lui proposais un peu de brioche et prit la tranche en inclinant la tête en signe de gratitude.
Zeus, souvent représenté avec sa barbe blanche et son air de sage, se tenait devant moi, mâchant de la façon la plus noble qui soit un morceau de ce gâteau préparé par les nymphes et Mère qui ne bougeaient pas d'un pouce.
Je n'étais pas à l'aise. Personne ne l'était d'ailleurs. Déméter restait bouche bée et cela me perturbait un peu. Zeus ouvrit les bras, son en-cas terminé, et les leva au ciel.
- Quelle belle femme avons nous là, s'exclama t-il. Vraiment Déméter, ta fille aspire la joie et l'insouciance même, un vrai rayon de soleil. Pourquoi nous l'avoir cachée ?
Mère ne répondit pas, elle se contenta de me fixer, de façon déterminée à présent. Zeus le prit mal, du moins semblait-il avant qu'il la prenne par les épaules, lui faisant une accolade.
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Une narcisse endiablée
RomanceCeci est une histoire reposée sur des faits mythologiques. L'histoire raconte celle du couple infernal (Hadès+Perséphone) du point de vue de la déesse qui finalement n'a pas eu beaucoup la parole dans ce mythe. Est ce une question d'attirance ? De...