Chapitre 2

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Je constatais l'absence de Frédérik, le cartographe, une fois arrivé dans ses appartements. Je me dirigeai donc vers la longue table de bois remplis de papier et parchemins pour m'emparer de la carte que le père Francis m'avait envoyé chercher.

Frederik apparaissait par surprise, sorti tout de derrière un mur, et m'empêcha de la prendre en le faisant avant moi. 

-Tu devrais essayer d'être gentil. Me sermonna-t-il, faisant allusion au fait que je ne lui avais pas demandé la permission de toucher à ses œuvres de travail.

Je n'avais même pas eu conscience qu'il était dans les parages, comment aurais-je pu?

Gentil. Être gentil. Je ne savais pas être gentil, moi. On ne me l'avait pas appris.

Comme s'il ne savait pas déjà. Je ne me plaignais pas qu'il était trop gentil, lui. Je ne lui disais pas qu'il avait intérêt à être un peu plus méchant.

-Tu t'attend à quoi? Un remerciement de ma part? Grognais-je presque.

Le cartographe me jugea de haut en bas avec réflexion.

-Je ne te la donne pas sans. Marchanda-t-il alors en relevant le menton.

Je roulais des yeux et grognais davantage. Il me faisait du chantage. Depuis le temps qu'il me connaissait, il était le mieux placé pour savoir qu'il n'y avait aucune chance pour que je change.

-Donne-moi la carte. Insistais-je en tendant la main.

Frédérik se mordilla l'intérieur de la joue avant de soupirer et me la remettre, vaincu.

Naturellement, j'eus envie de lui dire.

Merci.

Ce n'aurait pas été aussi difficile que cela. Certes, je m'en abstenais. Ce n'était pas l'image que je voulais projeter. 

J'ouvris le rouleau de parchemin comportant la map afin de l'étudier pendant quelques secondes de silence. Il l'avait soigneusement travaillée. 

-Elle est terminée? Demandais-je.

-Je n'aurais pas avisé le Père Francis de venir la chercher si elle ne l'avait pas été. Confirma-t-il avec une arrogance que je ne lui reconnaissais pas.

Je lui jetai une œillade suspecte sous mes cils et il serra les lèvres en se redressant.

Sur sa table de travail, une dizaine de parchemins différents y figuraient. Tous étaient des cartes. Certaines étaient à moitié entamées, d'autres à peine commencées. L'une d'entre elle était complètement terminée, il avait même pris la peine de colorer les zones forestières en vert et les courant d'eau en bleu. 

-Je vais le lui apporter. Déclarais-je en la roulant de nouveau.

Frederik acquiesça puis se retourna pour vaguer à ses occupations. 

Dos à moi, il ressemblait tout juste à un jeune adolescent que l'on aurait déçu. Il avait pourtant dans la cinquantaine, je ne savais pas pourquoi il prenait cet air. Ses épaules affaissées et sa tête qui se dandinait avec innocence me déconcertèrent.

-Je ne sais vraiment pas pourquoi tu veux m'entendre dire cela.

-Un vieil homme a ses raisons.

Mystère. Je n'aimais pas les mystères. Ils n'auguraient jamais rien de bon. Les mystères n'étaient pas mystères pour rien. Ils l'étaient pour cacher une vérité, qui parfois, pouvait s'avérer démentielle. Souvent, ils étaient sujet à une obsession dangereuse. Puis, après tous les dangers encourus pour les connaitre, ils n'en valaient pas tant la peine. Ou bien, ils étaient bien trop mystérieux pour être mis à nu et ils le restaient malgré les efforts données pour les dévoiler.

Seuls les démonsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant