Double Jeu [Levi Ackerman X OC]

Chapitre 13.

« Ah, Naho. Tu es là. Je t'en prie, installe-toi. »

L'ancienne détenue avait obéi et s'était nichée dans un des deux grands fauteuils du bureau du Major. Elle ne savait pas ce qui avait poussé ce-dernier à la faire venir en plein milieu de la matinée, mais ça devait certainement être important. Tout de même, il était rare qu'on fasse manquer l'entraînement à quelqu'un.

« Tu m'excuses, avec la dernière expédition j'ai pas mal de choses à gérer en ce moment, » lança Erwin tandis qu'il revenait s'installer derrière son bureau, après avoir fermé la porte, « Tu n'aurais pas par hasard oublié notre rendez-vous ? »

Naho se sentit blêmir. Effectivement, elle avait oublié. Ou plutôt, cela lui était sorti de la tête, peut être volontairement. Faire un compte rendu chaque semaine pour savoir si elle avait toujours ses deux jambes et ses deux bras était pour elle on ne pouvait plus contraignant. Elle n'avait pas l'habitude qu'on soit ainsi derrière elle, et cela ne lui plaisait pas. Elle se sentait enfermée, alors même que ses poings n'étaient plus liés, et qu'aucun barreau de cellule ne la retenait.

« C'est pour ça que vous m'avez fait quitter l'entraînement ? »

La jeune femme accusa le coup. Ce motif était ridicule.

« Entre autres. Il y a quelques petites choses dont j'aimerais te parler. Mais commençons par ton rapport hebdomadaire, s'il-te-plaît. »

Naho haussa les épaules. Que pouvait-elle bien lui dire pour qu'il lui lâche la grappe ? Elle n'avait rien contre le Major, mais cette manie qu'il avait de la materner comme un poupon souffrant la rendait folle. Ou peut-être réagissait-elle ainsi car elle n'avait jamais connu personne qui s'inquiétait pour elle.

« Ça a l'air de bien aller, depuis que tu es ici. Tu as meilleure mine. » poursuivit-il pour l'inciter à prendre la parole.

Le Major Smith n'avait pas tort. Depuis qu'elle était entrée au bataillon, elle avait moins de cernes, et son visage jadis pâle et maigre semblait s'être un peu plus arrondi. Elle avait repris des couleurs, et dormait mieux.

« Sauf votre respect, vous devriez vous occuper un peu moins de moi, et un peu plus de la centaine de blessés qui pourrit dans les tentes à l'extérieur. »

Une nouvelle fois - et Naho commençait à croire que c'était fréquent uniquement en sa présence - Erwin soupira longuement. Cherchait-il les bons mots ? Tentait-il de lui donner une bonne raison de constater autant de morts en une seule sortie ? La brune ne pouvait que constater les faits.

« Je sais que c'est dur à accepter pour des jeunes de ton âge. Mais l'avenir de l'Humanité dépend de nous, le Bataillon d'Exploration. »

« Très modeste, ça. » ironisa-t-elle.

« Comment savoir ce qu'il y a à l'extérieur si nous n'y allons pas ? Si tu as la réponse à cette question, tu es drôlement impressionnante. »

« Je pense que le problème n'est pas l'extérieur. Pourquoi vouloir savoir à tout prix ce qui se trouve hors des murs quand toute notre vie est cantonnée à l'intérieur ? Vous êtes suicidaires, ici. »

Le Major l'observa sans dire un mot. Songeur, il quitta son fauteuil pour regarder par une des deux fenêtres de son bureau. Elles donnaient sur une sorte de cloître, par lequel il fallait passer pour aller aux sanitaires. Le tout était éclairé d'un beau halo de lumière. La lumière du jour. Il réfléchit quelques instants à cette pseudo-liberté qu'il tentait sans cesse de revendiquer, pour le bien être de l'Humanité toute entière.

« J'ai accepté une mission qui n'est pas des plus simples. C'est vrai, je dois choisir chaque jour si j'envoie ou non mes hommes à la mort. Mais je ne le fais pas pour moi, et ils en sont conscients. Je ne pense pas me vanter en disant que, tous autant qu'ils sont, ils ont confiance en moi. Mais ce qui les rend plus forts encore, c'est leur hargne et leur volonté de fer. Tu sais Naho, tous ces gens dans l'enceinte de ce QG sont prêts à donner leur vie pour l'Humanité toute entière. »