CHAPITRE 1

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  Là où il se trouvait, il faisait nuit noire. A première vu les passants auraient pu penser qu'il était mort, mais sa cage thoracique continuait de se soulever au rythme de sa respiration. Ses doigts commencèrent à bouger alors qu'il était étendu au sol ,dans une impasse pratiquement déserte. Il entrouvrit les yeux mais la lumière des néons extérieurs les lui brûla. Il entendit non loin de lui des voix s'élever aux alentours, de fortes voix. Il supposa qu'il s'agissait de gens qui sortaient de rues adjacentes. Cependant, il ne savait pas où il était, quel jour il était ni quelle heure. Il décida de se lever, non sans mal, et avança plus loin dans la ruelle. Il avança vers la source d'une lumière rose qu'il voyait au loin et finit par reconnaître l'enseigne d'un des clubs de la ville: Le Kitten's. L'angoisse qui l'avait envahi un peu plus tôt commença à redescendre lorsqu'il comprit qu'il était encore à Seattle, là où il habitait depuis sa naissance, du moins selon ses souvenirs. Il continua son chemin et inspecta le videur qui se tenait devant le club, un androïde.


     En continuant de marcher vers le cœur de la ville, il passa devant un bar, le Hailey's. Il scruta la devanture du bar mais il semblait fermé, aucune lumière n'émanait des minces fenêtres. Soudain, il reçut un coup sur le nez, la porte du bar venait de s'ouvrir violemment. L'homme qui venait de sortir fût surpris. Il avait environ 40 ans et était plutôt grand. Il portait un manteau en cuir noir et avait une barbe imposante. Dès qu'il se rendit compte qu'il venait de blesser l'autre homme, il s'excusa directement:

- Oh mon Dieu, excusez-moi, c'est tellement peu courant que des gens s'aventurent jusqu'ici que j'ai pris l'habitude de faire comme-ci j'étais seul. Et puis dans l'état dans lequel je suis, je n'ai pas fait attention. Excusez-moi encore. Vous allez bien ?

- Oui, ne vous inquiétez pas, je suis seulement un peu perdu.

- Qu'est-ce qu'il vous est arrivé mon pauvre ? A voir votre tête et votre allure on dirait que vous sortez d'un coma de 6 mois. Ou que vous avez passé un peu trop de temps dans la ruelle des Crackhead.

- Je viens de me réveiller en plein milieu de cette impasse et je ne me souviens de rien. Sauf de quelques détails personnels bien sûr, mais j'ai l'impression que pratiquement l'intégralité de mes souvenirs se sont volatilisés.

- Si ne vous m'aviez pas précisé que votre mémoire avait été effacé, j'aurais fortement pensé que vous aviez fait un badtrip. Mais si vous voulez je peux vous aider, mon métier repose sur la connaissance de la mémoire. Et puis bon, je pense que vous n'avez pas d'autre endroit pour ce soir, surtout à 00h30. Suivez-moi jusqu'à mon appartement. Vous vous appelez comment d'ailleurs ?

- Moi c'est Paco, et vous ? 

- Carter, suivez-moi, j'habite à deux pas d'ici.


     Après avoir marché pendant environ 5 minutes, ils arrivèrent devant un immeuble qui ressemblait à tous ceux de la ville. Sur le chemin ils ne discutèrent pas beaucoup mais décidèrent de se tutoyer, la seule chose qu'ils apprirent c'est l'âge de chacun et quelques passions. Carter avait 46 ans et été un amateur de lecture et d'art. Quant à Paco il se souvenait seulement qu'il venait d'avoir 29 ans. Ensemble, ils montèrent jusqu'au 6ème étage de l'immeuble et Carter sortit un trousseau de clés de sa poche. Paco fût un peu surpris, cela faisait des années qu'il n'en avait pas vu. Aujourd'hui toutes les portes étaient équipées de serrures digitales. Sur le moment il trouva ça étrange mais ne se posa pas davantage de question.


     En entrant dans l'appartement, Paco fut d'autant plus étonné. Le studio été très peu éclairé, et les meubles étaient d'une vétusté inégalable. Cela lui changeait de ce qu'il avait l'habitude de voir. Les habitations étaient à la pointe de la technologie depuis maintenant plusieurs années et il n'était jamais entré dans un appartement de la sorte. Cependant, il s'y senti bizarrement en sécurité et l'atmosphère était reposante. Il vit une bouteille de Bourbon posé sur la table basse devant une télé qui devait être là depuis au moins 20 ans. Des piles de dossiers, de papiers et de cartons reposaient dans un coin. Paco avait l'impression que Carter été bloqué 20 ou 30 ans en arrière et que depuis il ne s'était pas modernisé. Curieux, il demanda :

Seul avec toiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant