Jour 2

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La matinée démarra sur les chapeaux de roues. En effet, lorsque Louis alla rejoindre son groupe pour le petit-déjeuner, il s'agaça d'apprendre par les jeunes que l'animateur était toujours sous la douche. L'un des adolescents, Tom, lui confia que Baptiste avait tourné en rond une bonne partie de la nuit, le dérangeant dans son sommeil. Même si cela expliquait son retard, Louis ne l'entendait pas de cette oreille.

- OK. Je vais vous le faire sortir de là, moi, grogna-t-il.

- Besoin d'aide ? proposa Brandon, toujours partant pour embêter Baptiste.

- Vas-y, Crazy Frog, viens avec moi.

- J'suis plus Kermit ?

- C'est un peu plus de ta génération ça, non ?

Brandon haussa les épaules, ayant déjà compris que rien de ce qu'il pourrait dire ne changerait quoi que ce soit et le suivit jusqu'à l'entrée de la pièce qui regroupait les différentes cabines de douches.

- S'il traîne aussi les autres jours, tu n'auras qu'à ouvrir ce boîtier et baisser cette petite manette, expliqua Louis en joignant le geste à la parole. Ça coupe l'arrivée d'eau.

Moins d'une seconde plus tard, un cri de protestation s'éleva de l'endroit où se situait Baptiste tandis que Louis et la dizaine de gamins partaient d'un pas tranquille jusqu'à la cantine.

- Il va l'avoir mauvaise, ricana Tom.

- La prochaine fois, il fera en sorte d'être à l'heure.

Baptiste les rejoignit une dizaine de minutes plus tard, regard noir et mine à faire peur. Heureusement qu'il avait eu le temps de se rincer les cheveux. Pour le reste, il s'était débrouillé comme il le pouvait.

- La douche était bonne ? questionna Louis avec un rictus satisfait.

- Je me disais bien que tu étais dans le coup. Ça t'amuse de faire ce genre de blagues débiles ?

- Honnêtement, non, mais tu es l'animateur, tu dois donner l'exemple à ton groupe. Tu es censé être le premier prêt le matin pour gérer les gosses, pas l'inverse. La prochaine fois, au lieu de te balader dans les couloirs la nuit, dors !

- Désolé d'avoir passé une nuit de brun* ! J'aurais aimé mieux dormir et plus longtemps.

- Nos matelas de bouseux ne sont pas assez confortables pour sa seigneurie ? se moqua Louis.

- C'est surtout d'être au même endroit que toi qui m'empêche de dormir correctement, confessa Baptiste en soupirant. Surtout quand on a l'air de deux étrangers...

- Il ne fallait pas venir, répliqua Louis, sans se laisser attendrir.

- Je remplace un collègue malade sinon, je ne serai pas venu.

- Tu peux toujours t'en aller, c'est ton truc ça, non ?

Piqué au vif, Baptiste reposa un peu trop brutalement sa tasse de café qui déborda sur la table. Son mouvement d'humeur attira quelques regards dont il ne se soucia pas, préférant faire face à Louis, qui arborait une mine satisfaite.

- Je te rappelle que c'est toi qui es venu me chercher en disant qu'on pouvait partir alors, excuse-moi d'en avoir eu ma claque d'attendre un type qui ne savait pas ce qu'il voulait !

Un partout.

Baptiste n'avait pas tort. Même s'il avait pu monter dans ce train avec lui, Louis n'était pas certain qu'il aurait tenu l'intégralité du voyage. La ferme lui aurait trop manqué et réciproquement. Il était déjà indispensable à son bon fonctionnement à l'époque et l'était devenu davantage avec les années. D'ailleurs, quand il avait dit la veille que Baptiste et lui auraient pu partir dès le lendemain s'il l'avait écouté, il avait menti, même s'il n'en avait pas eu conscience sur le moment. Le malaise de son père était tout à fait bénin, mais il n'aurait pas pu prendre la route aussi vite. La crainte que les choses s'aggravent l'aurait retenu à Desvres et peut-être que sa relation avec Baptiste en aurait pâti aussi. Il l'aurait perdu dans tous les cas...

Se Retrouver [ Édité ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant