Le langage des fleurs

Azalée

Lentement, des amitiés se nouaient entre Gryffondor et Serpentard.
C'était lent et laborieux, mais la cohabitation forcée de Minerva obligeait à communiquer et le but recherché était atteint : les élèves se redécouvraient sans les préjugés dus aux maisons.

Harry avait pensé que ce serait Ron le premier à protester, mais la première objection vint de Hermione. Zabini était... différent de tous les autres binômes qu'elle avait pu avoir. En règle générale, quand elle travaillait avec quelqu'un, elle prenait d'autorité les choses en main, et dirigeait. Sans compter que la plupart du temps, elle finissait par faire tout le travail elle même : à force de vouloir tout contrôler, elle décidait que c'était plus simple de s'en charger...
Le Serpentard n'était pas vraiment en accord avec cette façon de faire : il luttait pied à pied avec elle, pour imposer ses idées et donner son avis. Zabini était peut être un Serpentard, mais il venait d'une famille neutre, qui n'avait jamais pris part à la guerre. Il était donc probablement le seul Serpentard à ne pas craindre de donner son opinion, et il s'opposait à Hermione Granger, héroïne de guerre sans ciller.

Harry réfléchissait à une réponse appropriée pour ne pas braquer son amie - Hermione était adorable mais pouvait se montrer terriblement susceptible dès lors que les compétences intellectuelles étaient dans la balance - mais Neville le prit de court en répondant doucement.
- Et bien, hors de Poudlard, tu devras apprendre à composer avec des gens de tous horizons. Que ce soit d'une autre maison, ou même d'une autre école ! Tu ne pourras pas toujours décider même si tu penses avoir raison.

Hermione s'était renfrognée mais elle n'avait pas répondu, et Harry avait pu constater qu'elle réfléchissait sérieusement aux paroles sages de Neville.

Ron ne s'était pas plaint de son binôme. Pourtant, Théodore Nott était tout ce qu'il détestait : fils de Mangemort, ami proche de Drago Malefoy. Riche héritier, sang-pur, attaché aux traditions.
Mais Nott était aussi un élève discret et sérieux.

Dean laissait Millicent diriger leur groupe, trop effrayé par la jeune fille à la carrure de lutteur pour oser la contredire.
Seamus observa Adrian Pucey avec méfiance, jusqu'à ce qu'ils entament une conversation sur le Quidditch. Tous les deux passionnés, ils trouvèrent un parfait terrain d'entente.

Neville était plutôt mal à l'aise avec Daphnée Greengrass. Il avait gagné en assurance durant la guerre et il avait prouvé sa valeur. Avec un serpentard bagarreur, il aurait su s'imposer sans peine, grâce à sa nouvelle confiance en lui. Cependant, face à une héritière sang-pur, il était plutôt démuni. Il ne savait pas vraiment sur quel pied danser, et il s'affolait dès que Daphnée semblait sur le point de fondre en larmes. Il n'y avait que lui pour ne pas se rendre compte que la jeune fille avait en jouait pour faire ce qu'elle voulait...
Harry avait hésité à prévenir Neville qu'il se faisait manipuler, mais tant que la manoeuvre restait bon enfant, il gardait le silence pour voir ce qui allait se passer.

Quand à Lavande... sa première rencontre avec Pansy Parkinson avait failli tourner au drame. Les deux filles s'étaient pratiquement battues, sous le regard exorbité de tous leurs camarades. Après s'être hurlé dessus et s'être lancé des noms d'oiseaux à n'en plus finir, elles étaient parties furieuses chacune de leur côté.
Deux heures plus tard, elles étaient installées ensemble à une table et chuchotaient furieusement, désormais les meilleures amies qui soient. Elles venaient de découvrir qu'elles avaient en commun l'amour des ragots, et elles s'en donnaient à coeur joie...

Lorsque le cataclysme Lavande - Pansy avait eu lieu, Harry était juste à côté, en compagnie de Drago Malefoy. Le brun était frustré de se trouver face à son ancien ennemi apathique, le laissant tout diriger, incapable de le contredire. Visiblement il était persuadé qu'il avait perdu tous droits parce qu'il portait la marque des ténèbres.
Pourtant, il avait été absout de ses péchés lors de son procès. Tout le monde avait convenu qu'il n'avait pas eu réellement le choix. Qu'il avait fait de son mieux pour survivre et que même si ses actes étaient contestables, il avait suivi l'éducation donnée par ses parents.
Harry lui même avait témoigné, racontant sans la moindre hésitation comment Malefoy avait refusé de le livrer alors que les rafleurs le tenaient. Comment il s'était laissé désarmer, lui permettant de vaincre Voldemort puisqu'ainsi, il était devenu le maître de la baguette de sureau.

En voyant Pansy commencer à hurler comme une banshee, Drago s'était tendu et avait insulté son amie à mi-voix, visiblement furieux. Il s'était redressé prêt à intervenir mais Harry lui avait attrapé le poignet, avec un sourire amusé.
- Laisse les gérer.
- Mais...
- Tout va bien se passer.

Ils s'étaient défiés du regard, puis Drago avait sifflé entre ses dents, furieux, ses yeux gris brillants.
- Je ne tiens pas à ce que Pansy soit expulsée de Poudlard, aussi pénible soit elle.

Harry avait gloussé, amusé et lui avait adressé un clin d'oeil complice.
- Ne t'en fais pas. Tant qu'elles ne tentent pas de s'égorger mutuellement, ni l'une ni l'autre ne risque rien.

Ils s'étaient longuement fixés, puis Drago avait rougi, et baissé la tête. Puis, il avait soupiré et haussé les épaules.
- Si tu le dis.
Le Serpentard s'était aussitôt renfermé, jetant regard bref en direction de Pansy, et était redevenu muet.
Harry avait essayé de le faire sortir de sa réserve, mais quelques soient les provocations qu'il tentait, Drago restait muet, comme éteint.

Lorsque Pansy était revenue avec Lavande et qu'elles avaient commencé à rire ensemble, collées l'une à l'autre, Drago avait secoué la tête, incrédule.
Harry avait ri, amusé.
- Tu vois ? Il faut juste... trouver un équilibre.

Mais Malefoy n'avait pas semblé comprendre le message que Harry tentait de lui envoyer, la main tendue pour faire la paix et il s'était renfermé sur lui-même.

Drago était le seul Serpentard à ignorer les gestes d'amitié, à rester renfermé, persuadé de devoir être exclu à cause de la marque sur son bras. Sans l'obligation de passer ses Aspic, il se serait probablement enfermé chez lui, à dépérir.

La semaine suivante, il y eut un lourd silence lorsqu'un hibou blanc comme neige - qui fit immédiatement penser à Hedwige à Harry - livra un énorme bouquet aux fleurs en forme de délicates étoiles d'un jaune éclatant.
Drago le réceptionna et rougit légèrement, regardant immédiatement autour de lui, comme pour identifier l'expéditeur mystérieux. Cependant, la Grande Salle entière le regardait, lui et son superbe bouquet.

Il rougit un peu plus et se leva, fuyant presque, serrant les fleurs contre lui.
Neville gloussa et secoua la tête.
- C'est logique qu'il soit perturbé le pauvre...

Harry se pencha vers lui, curieux.
- Vraiment ? C'est quoi ces fleurs ? J'en avais jamais vu des comme ça.
Ron vida sa bouche et fronça les sourcils.
- Moi non plus ne ne connais pas !

Neville rit.
- Ce sont des Azalées. Des azalées de Chine. Elles sont magnifiques, avec leurs fleurs étoilées...
Hermione roula des yeux.
- D'accord, ce sont de belles fleurs. Mais pourquoi il serait perturbé ?

Harry remarqua Lavande se pencher vers eux, les yeux brillants pour ne pas perdre une miette de la réponse de Neville, mais ne il resta silencieux, attendant la suite.
- Et bien déjà, ces fleurs portent le nom de sa mère. Ce sont des azalées Narcissiflora.

Hermione sourit, amusée.
- Qui que soit son admirateur secret, c'est un joli geste. Il ne peut pas douter que ça lui est bien destiné... Et donc, que signifie l'Azalée dans le langage des fleurs ?

Neville prit son temps pour répondre, avec un sourire amusé. Il dévisagea chacun de ses camarades, un par un, avant de souffler, les yeux brillants.
- Ça symbolise un amour sincère, la joie d'aimer.