Chapitre 1 - Prelude

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♪Home – Edith Whiskers



Un léger clic retentit, la preuve que l'eau était enfin chaude. Il avait attendu impatiemment, devant la bouilloire, qu'elle daigne enfin émettre ce fameux « clic ».

À une époque un peu plus éloignée, c'était quelque chose qu'il faisait souvent pour se calmer : attendre patiemment, inlassablement devant son comptoir, que sa bouilloire fasse son travail. Il adorait laisser son regard se perdre le long de la vapeur d'eau qui s'échappait par le bec du samovar, se demandant à quel moment précis elle disparaissait complétement. À cette période, ce moment d'égarement l'apaisait, lui faisait oublier ses doutes, ses angoisses, ses longues journées de dur labeur, les horreurs qu'il avait pu voir au cours de ses nombreuses heures de travail. Il ne pensait plus à rien, juste à ces milliers de gouttelettes qui termineraient leur course folle dans l'air immaculé de son appartement.

Mais aujourd'hui, il avait la désagréable sensation que rien, pas même ce moment de divagation habituel, ne pourrait l'aider à se calmer. Il resta ainsi un bon moment. Il n'aurait pas su dire combien de temps exactement. Quelques secondes, quelques minutes, une heure peut-être, mais rien n'y faisait. Il restait là, le regard dur, figé sur l'engin de malheur, qui, ce matin, avait décidé d'abandonner son rôle et ne l'aidait pas du tout à retrouver le peu de contenance qu'il avait réussi à conserver depuis les événements de la soirée d'hier. Il laissa son regard dériver vers la cafetière positionnée à sa droite. Il crevait d'envie d'un café, mais il s'en était déjà enfilé une bonne dizaine en à peine douze heure, et il sentait que son palpitant lui en voudrait de se laisser aller à sa fidèle amie : la caféine. Il en était accro depuis qu'il était entré dans la police, quelques années plus tôt, et réservait les moments de calme et de tranquillité pour son amour de toujours, le thé. Mais en cette matinée de grisaille, il sentait bien que son binôme avec son Camellia sinensis ne suffirait pas.

Las, il poussa un long et bruyant soupir avant de se saisir de l'eau bouillante, et de la verser à part égale dans 3 des 4 tasses posées à sa gauche sur un grand plateau, accompagnés de 2 gélules bleues. Il alla jusqu'au frigo, l'ouvrit pour, sans grande surprise, n'y découvrir que peu de chose : quelques bières dans la porte, un ou deux yaourts sûrement périmés, un pot de sauce tomate à peine entamé et une bouteille de lait qui devait s'y trouver depuis un bon moment. Il se saisit de cette dernière, vérifia la date de péremption avant de décider si oui ou non, il pouvait s'en servir.

Ça fera l'affaire, se dit-il à lui-même. Il revint auprès du plateau et fit couler le liquide crémeux dans la dernière tasse avant de poser ses mains, à plat, contre le marbre froid du plan de travail. Le contact frais du matériau lui fit le plus grand bien, lui qui venait de passer plus de 24 h sans fermer l'œil avait grand besoin de ce petit frisson pour le maintenir encore un peu éveillé. Il fut rappelé à lui lorsque des voix distantes se firent entendre dans son dos. Avec un nouveau soupir, il se saisit de son plateau et fit volte-face pour voir les 3 personnes assises non loin de lui.

Il prit une grande inspiration tout en fermant ses yeux, essayant au mieux de retrouver un minimum de sérénité, et finit, non sans mal, par se diriger vers le salon, qui se trouvait face à lui, devant la grande cuisine ouverte.

« Eh bah ce n'est pas trop tôt ! Qu'est ce qui t'a pris tout ce temps ? »

Levi lança un regard empli de haine à sa collègue, ce qui ne la mit pas mal à l'aise pour un sou. Elle avait, depuis tout ce temps, prit l'habitude des regards assassins de son acolyte et ami de longue date. C'était même devenu l'un de ses nombreux passe-temps : essayer de pousser le jeune homme à bout. (Mal)Heureusement pour elle, les limites de celui-ci étaient difficiles, voir impossible à atteindre, ce qui ne l'empêchait pas de réitérer ses efforts malgré tout. Et aujourd'hui, elle sentait qu'elle frôlait presque son but. Elle le fixait, un léger sourire scotché sur les lèvres.

" MαTes " - RirenOù les histoires vivent. Découvrez maintenant