024 | Météore

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La tête appuyée contre ses poings, William était à la recherche de son souffle. Les perles de sueurs longeaient ses tempes, se mélangeant aux mèches de cheveux humides qui collaient à son visage. Il renifla péniblement, ses yeux verts contemplant le vide. Le néant envahissait son esprit.

Il se redressa lourdement lorsque son entraîneur entra dans le vestiaire de l'équipe.

Les boys, à partir de maintenant, notre seul objectif c'est les séries, motiva Robert Laberge. Je sais qu'on a du retard, mais on prend une game à la fois.

Le regard de l'homme aux cheveux grisâtres survola la pièce. Derrière lui, Vincent Bilodeau, le coach adjoint, avait la même fibre de détermination dans son expression.

Je vous veux au gym lors de vos temps libres. Je vous veux présents et en forme à toutes les pratiques, reprit-il, ses iris s'accrochant à ceux de Louis. On gagne et on remonte dans le classement. Est-ce que vous m'avez compris?

Oui, coach.

Après la conclusion de la rencontre, William se mit à défaire son équipement. Il aspergea son visage avec l'eau de sa bouteille, puis s'essuya avec une serviette à l'effigie du Junior de Montréal.

St-Pierre, héla l'entraîneur, alors que certains joueurs commençaient à quitter le vestiaire. Qu'est-ce que tu avais aujourd'hui?

Agité, l'assistant capitaine releva la tête. Il était toujours à court de souffle dû à l'entraînement.

Rien, juste un peu de fatigue.

L'homme d'une cinquantaine d'années fixa Louis, incrédule. Ses sourcils épais étaient froncés, accentuant son air sévère.

La prochaine fois que tu te saoules la veille d'un entraînement, ne prends pas la peine de venir.

Je, haleta le concerné, avant d'être rapidement arrêté.

Je ne laisserai pas un joueur mettre en péril le travail de toute une équipe, avertit durement Robert Laberge. Tu n'es pas plus important que le reste de l'équipe, St-Pierre. Si tu bois, tu ne joues pas, c'est compris?

L'interpellé hocha la tête, honteux que cette scène ait eu des témoins. Évitant tout contact visuel avec les autres, son regard noir suivit son coach quitter le vestiaire.

La colère fila le long des veines de Louis jusqu'à en hérisser ses poils. Sa mâchoire se contracta, au point où on pouvait presque entendre ses dents grincer. Ses yeux avaient été emparés par quelque chose de violent. Il se leva brusquement et lança sa bouteille d'eau sur le mur, poussant un cri de frustration.

C'était un sentiment étrange d'avoir l'impression que notre vie n'était qu'une succession de moments qui se répétaient. Depuis quelque temps, William était animé par cette émotion. Les journées se suivaient, mais il avait la sensation qu'elles se ressemblaient.

Deux caisses? s'étonna-t-il, en voyant Louis sortir du dépanneur, les bras encombrés par les caisses de bière.

Trois, le corrigea son ami, en se retournant vers le magasin pour aller chercher la dernière caisse.

Les prunelles sombres de William se mirent à fixer les bières au pied du siège du passager. Cette relation sournoise entre Louis et l'alcool faisait partie de ce sentiment de déjà vu qu'il ressentait. Le frisé avait toujours eu cet amour pour la fête et les joies qu'apportait l'ivresse, mais le capitaine du Junior de Montréal ne pouvait s'empêcher d'y voir un besoin malsain s'installer.

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