Une soirée très privilégiée - Pierre Gasly

Chapitre 91 : Disparaitre

J'étais tellement sous le choc face à la violence de la publication que je ne réagis pas. Ça me paraissait tellement énorme. Et bien évidemment, c'était un des comptes troll de notre promo, en tout anonymat, comme des bons gros lâches. Je phasai devant mon téléphone, incapable d'exprimer une quelconque émotion, me ressassant en boucle ces mots qui me donnaient envie de vomir de dégoût.

Je m'aventurais à lire les commentaires du post, qui avait bien évidemment buzzé, et vis mon groupe d'amis me défendre en insultant l'auteur du post, ce qui me rassura quelque peu. J'avais encore du soutien, et même de filles que je ne connaissais pas ou seulement de vue, qui dénonçaient le sexisme immonde en disant que j'étais encore libre de faire ce que je voulais de mon corps.

Mais le groupe des "populaires", ou plutôt des connards de ma promo, ne se gênait pas pour m'insulter et trainer mon nom dans la boue, disant que j'étais médiocre, et que j'avais réussi en vendant mon cul, comme pour mes années d'école où j'avais du faire pareil avec les profs pour valider. J'étais écoeurée. Je savais très bien que les écoles de commerce étaient sexistes et remplies de cons, mais je n'avais jamais été directement la cible de cette pression, me faisant presque honte d'être diplômée au même titre que ces tocards finis.

Je commençai à taper un commentaire rempli de haine mais Carla intercepta mon téléphone et le verrouilla, m'empêchant très probablement de faire une grosse bêtise. Je relevai la tête, le regard vide, et croisai le regard compatissant de Carla. J'avais quand même eu le réflexe de screener la publication et tous les commentaires, qui eux, n'étaient pas anonymes.

" Je sais pas si t'as envie d'entendre ça maintenant, mais ceux qui te critiquent sont des frustrés, jaloux de ce que t'as réussi à accomplir par toi-même. Et tu vois tes vrais amis qui te soutiennent. Dans deux jours, ce sera sûrement oublié, ils trouveront un nouveau scandale à se mettre sous la dent."

Je ne répondis pas pendant quelques instants, préférant rester en silence pour digérer ce qui venait de se passer. Les insultes de fans et d'inconnus sur les réseaux sociaux passent encore, mais l'humiliation publique devant 400 personnes avec qui j'avais vécu trois ans d'école, était bien plus difficile à affronter. C'était ma vraie vie, pas un monde qui ne m'appartenait pas.

Je pris mon coussin, le serrant le plus fort possible contre moi, avant de hurler dedans pour extérioriser ma rage.

- Tu sais qui a écrit ça ? dis-je à Carla en furie, la mâchoire serrée, à tel point que mes dents étaient prêtes à casser.

Elle baissa la tête, en hochant négativement.

- Non... Mais même si je le savais, ça sert à rien de lui donner du crédit.

- J'espère que tu me mens pas Carla, répondis-je froidement. Tu sais que si tu me le dispas, je le trouverai moi-même.

- Et tu vas faire quoi ? Tu vas l'insulter à ton tour ? Sortir des dossiers sur lui ? T'abaisser à leur niveau? répondit-elle en haussant le ton.

- Non. Je vais les attaquer en justice pour cyberharcèlement et incitation à la haine, et ruiner leur vie. Parce que s'ils sont capables de faire ça maintenant, pourquoi il s'arrêteraient en entreprise quand ils auront tous les droits ? J'ai de la chance d'avoir des gens qui m'aiment et qui me soutiennent, mais qui te dit que leur prochaine victime aura la même chance que moi ? Répondis-je calmement.

Carla me prit par les mains et dit simplement :

- C'est pour ça que je t'adore Marie. Si tu veux, je vais essayer de me renseigner, mais tu me promets que tu feras pas de connerie hein ?

Je hochai la tête pour la rassurer et lui souris doucement. La journée avait été longue, et je n'avais qu'une envie, c'était de dormir, pour oublier tout ce qui venait de se passer. Mais le sommeil tardait à venir, et mon esprit était torturé par tous les messages de haine qui passaient en boucle dans ma tête. Je pensais que j'étais forte, mais visiblement pas assez. Et cette accumulation allait avoir raison de moi.