PROLOGUE

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Bordeaux, le 17 juin 2014

- Louise, nous partons dans cinq minutes! crie mon père de la cuisine.
- Tant mieux papa, mais je vous ai déjà dit que je ne venais pas avec vous, j'ai trop de boulot!

C'est la seule excuse plausible que j'ai trouvé pour rester chez moi.
J'entends mon père monter les escaliers et de diriger vers ma chambre, il entre alors sans frapper et me toise.

- Habille-toi, je ne te le redirai pas Louise! déclara t-il.
- Je ne veux pas venir à votre repas de profs, à chaque fois je m'ennuie papa... s'il-te-plaît? l'implorais-je.
- C'est pas sympa Louise, souffla t-il.

Il part en claquant la porte, ce qui fait tomber mon vieux poster de Lorie, ce qui n'est pas vraiment très grave. Je sais que ça lui passera, il est du genre boudeur mais pas rancunier.

Mes parents, tous deux professeurs dans mon lycée veulent que je vienne avec eux au repas trimestriel de l'établissement. Chaque fois c'est la même chose, mon père passe la soirée à parler de l'enseignement des maths et ma mère, de romans à étudier avec Sarah Collens sa meilleure amie mais aussi professeur de littérature, comme ma mère.
Je sais que j'ai gagné le combat quand j'entends les clés de la voiture tinter et ma mère grimper les escaliers. Elle frappe deux coups à la porte et passe la tête par l'entrebâillement.

- On y va Lou, à toute à l'heure ma puce, travaille bien, dit-elle.

Elle s'avance vers moi et dépose un baiser sur mon front.

- Il n'y a pas moyen que je te fasse changer d'avis? me supplie-t-elle avec une moue enfantine.
- Maman... soupirais-je.
- D'accord, d'accord... Je me devais d'essayer une dernière fois. On ne rentrera pas tard, minuit tout au plus, j'ai fermé les volets et tu as des restes de lasagnes dans le frigo. Papa a son portable si...
- Maman, file. J'ai 16 ans, je suis grande, dis-je en lui coupant la parole.
- Oui bien sûr, sourit-elle.

Elle sort de ma chambre, je sais que je devrais aller embrasser mon père mais je n'en ai pas envie car le fait qu'il veuille me forcer à venir m'agace. J'entends ma mère chuchoter à mon père que la bataille est perdue et la porte se referme par la suite.

Enfin seule... J'adore mes parents bien entendu, mais ma mère peut se montrer parfois étouffante. Depuis qu'ils m'ont appris qu'ils n'étaient que mes parents adoptifs, ils ont peur que je me rebelle ou je ne sais quoi, ce que je ne ferai jamais bien sûr! J'ai effectivement été adoptée à l'âge de cinq mois, mes parents me l'ont annoncé avec un air grave et apeuré à mon dixième anniversaire. Je ne sais rien de mes parents biologiques, si ce n'est qu'une lettre de ma mère naturelle m'attend dans le centre adoptif de Paris, lettre que je ne lirai jamais. Je vais profiter de ma solitude pour, non pas comme le feraient toutes adolescentes de mon âge, inviter des amis mais plutôt en me plongeant dans un bain bouillant avec un bon roman, sûrement un de Guillaume Musso.

Après ce moment de détente, je décide de m'avancer un peu dans mon travail, je n'ai pas vraiment menti à mon père quand je lui ai dit que j'avais du travail. Attachant mes longs cheveux blonds en un chignon informe, je me plonge dans un DM de maths.

Deux heures plus tard, DM bouclé dans une main et une infusion dans l'autre je monte dans ma chambre. Celle ci est tout ce qu'il y a de plus classique, des murs blancs, un lit double gris comme les murs. Je m'assieds en tailleur sur mon lit et allume mon ordinateur. J'écris deux trois articles sur Booknode, un de mes sites de livres favoris. En relevant la tête je m'aperçois dans le miroir, mon chignon informe l'est encore plus qu'avant, mes yeux sont trop grands pour mon visage, mes lèvres sont assez bien dessinées. Mes yeux dérapent sur mon pyjama, une longue robe blanche qui ferait fuir n'importe quel garçon, si seulement il y en avait un bien sûr, je n'ai jamais eu de copain, pas que ça ne m'intéresse pas, ni que je sois trop timide, mais je n'ai jamais eu le chic pour me faire des amis. La solitude en elle même ne me dérange pas, c'est plutôt tout ce qui va avec, surtout les aprioris qu'ont les gens. Pourquoi est-elle seule? Elle doit être timide? Je dirais seulement que je ne me suis jamais sentie à ma place. Je regarde l'heure, minuit et quart, j'ai passé plus de temps que je ne le croyais dans la baignoire, mes parents ne vont pas tarder. J'éteins la lumière et m'endort peu de temps après.

HantéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant