Chapitre 4

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Bayonne, le 2 septembre 2014

Ça fait 3 heures que je suis allongée dans mon lit et je ne réussi toujours pas à fermer l'œil, le rendez-vous chez le psychologue m'angoisse plus qu'autre chose. Je regarde l'heure: une heure trente... Il faut que je fasse quelque chose, si je reste une seconde de plus dans ce lit ma tête va exploser. Je me lève et descends au rez-de-chaussée, la maison est plongée dans le noir, j'ouvre la terrasse et m'assoie sur le transat, nous sommes en septembre, il fait encore bon. La maison n'est pas loin de la mer, si bien que j'entends les vagues se fracasser sur le sable. Je suis tentée de partir, de fuir et ne jamais revenir, je ne sais pas ce qui m'empêche de le faire d'ailleurs. Je remonte dans ma chambre et me rallonge dans mon lit, il faut que je dorme, que je me repose.

Des bras me secouent, Julia est à mon chevet, encore un cauchemar. J'ouvre mes yeux pleins de larmes, je suis essoufflée, fatiguée. Elle me prend dans ses bras et me berce, c'est devenue une habitude. Mes yeux commencent à se refermer petit à petit...

- Louise?
Je sursaute, où suis-je?

Chez ma tante, mes parents sont morts, je suis seule, ce n'était pas un cauchemar, c'est bien réel.

Julia est sur le pas de la porte.
- Je me suis dit que je pourrais peut-être t'accompagner chez le psychologue, histoire que tu es un soutien moral, puis faire l'école buissonnière ne me dérange pas tellement...
- J'aimerais beaucoup.
La vérité c'est que, que Julia soit là ou par je sais d'avance que ce rendez-vous va être une catastrophe. Mais il faut que je continue de vivre, du moins d'essayer d'exister.

Ça fait un quart d'heure que l'on est dans la salle d'attente du docteur Monssas. Je tremble, mes yeux me brûlent, je n'entends rien, je ne sens rien.
- Louise? Louise?
- Que...quoi?
Ma cousine me serre la main et un homme se tient devant moi. La quarantaine, cheveux grisonnant sur les tempes, 5 kilos en trop, il me sourit et me tend la main.
- Bonjour Louise, je suis Franck Monssas, tu me suis?
J'hoche la tête incapable de parler, mon cœur cogne dans ma poitrine, mes jambes sont en coton. Je suis le docteur dans une pièce très aérée avec de grandes baie vitrées.
- Assis toi Louise.
Je m'assieds.
- Très bien, alors comment vas - tu?

Comment je vais? Eh bien je ne me suis jamais sentie aussi seule. Je mange parce qu'il faut manger, je me lave parce qu'il faut se laver, je me lève parce que mes cauchemars me réveillent, je vis parce que l'on m'y oblige. J'ai la tête sous l'eau, je ne respire plus, je n'entends plus rien, je pleure tout le temps. Je ne peux plus vivre alors j'existe simplement et je m'efforce de ne pas me consumer. Alors non ça ne va pas bien. Ça n'ira plus jamais bien.

Je me lève et sort en claquant la porte. Julia se précipite vers moi et m'attrape le bras. Je me débats il faut que je sorte d'ici, il faut que je parte.

Respire.

Julia court après moi, nous sommes dehors dans les rues de Bayonne, je sais qu'elle m'appelle qu'elle me demande de m'arrêter, elle me supplie de le faire mais je ne peux pas. J'aimerais lui dire que je veux juste respirer, que j'ai besoin d'air. Mais je ne peux pas, mes jambes courent et ne s'arrêtent pas. Les gens nous regardent et se demandent sûrement pourquoi deux jeunes filles courent en hurlant. Je tourne dans une ruelle et m'effondre par terre. Je crie, hurle sans pouvoir m'arrêter.

Pourquoi moi? Pourquoi eux?

Julia appelle mon oncle et ma tante mais aucun des deux ne répond. Elle a les larmes aux yeux je le vois. Je me suis adossée à un mur et j'ai le regard perdu dans le vide. J'ai peur de ce qui va m'arriver. Je sais qu'il faut que j'avance mais je ne peux pas, ça fait tellement mal de se rappeler. De se rappeler que j'aurais dû être dans cette voiture, de se rappeler que je n'ai pas voulu les accompagner, de se rappeler que je n'ai même pas dit au revoir à mon père. Julia rappelle quelqu'un.
- Oui Jules... Non ça ne va pas du tout... Louise c'est encore pire que d'habitude... Je ne sais pas elle est partie en courant du psychologue deux secondes après être rentrée... Non ils ne répondent pas... OK... On est dans Bayonne... dans la ruelle à côté des galeries Lafayette... OK merci.
Elle s'avance vers moi et se penche.
- Ça va aller Louise, je te le jure.

HantéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant