L ' É C O U T E U R V I B R O N N A I T
en un grésillement familier et agaçant, avant de rendre l'âme. Le son — qui ne passait désormais que par l'oreillette gauche — murmurait dans un frémissement quelques notes de musique acoustique accompagnées de paroles bienveillantes et cordiales de Frank Ocean.Un soupir de lassitude s'évapora dans l'air chaud et agité qui oppressait tant le passager 31A du Boeing B747-127.
Lee Juyeon jeta vers le hublot un regard où incertitude et mécontentement se disputaient craintivement la place. Il observa pensivement la ville qui scintillait de milles feux, tel un diamant sous un rayon de soleil. Il en avait vécu, des emmerdes, qui lui en ont d'ailleurs fait voir de toutes les couleurs. Mais il pouvait s'en vouloir qu'à lui-même, car ça a toujours été principalement de sa faute.
Juyeon n'était qu'un orphelin caractériel et insubordonné qu'il a fallu au plus vite s'en débarrasser en maison de redressement dès son adolescence. Ensuite, il avait fait l'armée, pas forcément par choix mais vivement préférable que de finir à la rue. Dans cet emplacement qu'il baptisa affectueusement par « trou à rat », il fréquenta Mark Lee, un gamin venant d'un patelin perdu du Canada — dont le nom lui était complètement passé par-dessus la tête et Jeno Lee, un type un tantinet mature pour son âge et d'un sang-froid inaltérable. Ils furent nommés par le commandant « le trio des Lee ». Inséparables, imbattables et indécelables.
Et un splendide matin de Printemps — en mois de mai plus précisément, dans un ciel clairsemé et lumineux inondant le camp militaire grisâtre et morne, où Mark et lui se querellaient pour un briquet indigo introuvable (« Non, j'n'l'ai pas utilisé la dernière fois, ah fils d'ta mère ! Ça doit être c'trou du cul d'Junmyeon. J'l'ai vu rôder dans notre dortoir plusieurs fois ! ») sous le regard découragé de Jeno. Un jeune homme à la carrure imposante et impressionnante se présenta devant eux en tant que businessman du nom de Johnny Suh.
Des traits sévères, un regard significatif, une posture sérieuse, tout hurlait en lui l'aisance financière. Le trio n'avait pas hésité une seconde de plus. Morfler à l'armée coréenne ou gagner des sommes colossales en utilisant leurs capacités à des fins criminels ? Le choix était très vite fait et signé noir sur blanc sur le document. Ceci était, à des détails près, le parcours regrettable de notre protagoniste. De l'amertume noyait les prunelles esquintées de Juyeon.
C'est pathétique.
Il se trouvait pathétique.Il était calé contre la cloison de l'aéroplane et pour la première fois, il se sentait aussi déprimé d'effectuer une mission d'une telle envergure. Il sentait, comme il le disait si bien, une couille dans l'planning.
— Monsieur, que désiriez-vous boire? Interpella une voix qui lui était étrangement familière. Un timbre qui l'envoyait quinze ans en arrière, à ses dix-sept ans plus mathématiquement parlant.
— Jiu... Souffla-t-il hébété, balayant d'un regard circulaire son interlocutrice.
Sidérée, l'hôtesse lâcha le goblet qui par chance, était encore vide, au sol. Ses traits s'étaient affinés avec le temps, ses pommettes étaient légèrement marquées, rosées, et sa chevelure obscure avait poussé, lui arrivant jusqu'à le bas de son dos. Elle était toujours élégante malgré le temps qui s'était écoulé depuis leur dernière rencontre. Néanmoins, Kim Minji restait Kim Minji, avec sa manie de se ronger les ongles lorsqu'elle était angoissée, sa sensibilité exacerbée et sa générosité inégalable.
— Noona... Tu... Tu es... Hôtesse de l'air ? Interrogea Juyeon. Il sentit un pincement lui étreindre le cœur et lui nouer l'estomac. Son larynx s'était asséché comme le désert d'Atacama.
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𝐂𝓨𝐏𝐇𝟑𝐑₊nct
Fanfic𝔏e 5 avril 2018, le Boeing 747, du vol d'Asiana Airlines TY127 est porté disparu avec 236 personnes à bord, dont une majorité de ressortissants coréens. L'appareil de la compagnie Asiana Airlines, qui reliait Singapour à Séoul, faisant une escale à...