𝒆́𝒑𝒊𝒔𝒐𝒅𝒆 𝟒. "he was holding this kid's hand"

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— Il y a deux ans, mes parents se sont mariés, et tu sais, j'avais dix-sept ans, et je pensais encore que pour un couple marié, surtout fraîchement, rien ne pouvait les séparer, rigolé-je doucement

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— Il y a deux ans, mes parents se sont mariés, et tu sais, j'avais dix-sept ans, et je pensais encore que pour un couple marié, surtout fraîchement, rien ne pouvait les séparer, rigolé-je doucement. Et puis le seul exemple de couple que j'avais, à part les miens, c'était les parents de ma meilleure amie, qui s'aimaient pour de vrai, tu vois... Celui que tu rencontres tout jeune et que tu sais que... eh bien, soit c'est la personne qui te rendra heureuse jusqu'à la fin de ta vie, soit la personne à qui tu penseras chaque soir avant de dormir, avec plein de regrets dans la tête... Donc bref, mes parents se sont mariés, et on était tous si beaux, si souriants ce soir-là... Je me rappelle, c'était aussi les quarante ans de ma mère.

— Qu'est-ce qui a tout changé alors ?

— Un an. Il a fallu un an à mon père pour tromper ma mère, alors qu'avant ce mariage, il était avec elle depuis plus de vingt ans. Tu te rends compte, vingt ans... On a vu mon père tenir la main d'une jeune femme et d'une petite fille, on a vu mon père sourire à cette personne. Et tu sais, on ne voyait déjà pas beaucoup mon père à ce moment-là, alors ma mère et moi, on a compris tout de suite, je crois. J'ai vu..., ma gorge se serre légèrement, j'ai vu ma mère tomber sur les genoux et regarder son alliance en pleurant toutes les larmes de son corps, pendant que moi, je regardais mon père dans les yeux. Je voulais comprendre pourquoi, comment, quand... Mais moi aussi, j'ai fini par pleurer en essayant de relever ma mère. Ses pleurs étaient... C'est la pire chose que j'ai pu entendre.

Ma main droite joue nerveusement avec le sable, cette vision de mon père tenant la main de ces deux personnes me détruira-t-elle donc à chaque fois ? Une sensation de fraîcheur sur mes doigts me fait alors regarder vers la gauche : Boby a posé son museau sur mes doigts, comme s'il avait tout compris. Alors je continue avec un léger sourire envers le chien : "Quand ils nous sont passés devant, mon père a gardé la tête droite, et ne nous a même pas adresser un seul regard, et cette femme... Elle souriait. D'un sourire narguant. Elle nous narguait, parce qu'elle avait notre bonheur, après ça."

— C'est horrible... commente-t-il si bas, je ne suis même pas sûre que ce soit réellement ses mots.

— Le plus blessant, c'est qu'il m'a jamais tenu la main, ou du moins, je ne m'en souviens pas... Et il tenait la main de cette gamine. C'est dur à comprendre, sur le coup, à assimiler. Ma mère s'est fait tromper, mais dans un certain sens, moi aussi, tu vois ? Enfin bref, il s'est passé tellement de choses depuis, et pourtant, il vit encore à la maison. Il avait promis qu'il n'irait plus voir cette femme, et ma mère savait que ce n'était pas vrai, mais, elle essaye encore. Elle croit encore que redevenir un couple marié stable, c'est possible, mes yeux s'embuent. Et il n'y a pas une semaine où ils ne s'embrouillent pas, et moi, au milieu de tout ça, je n'arrive pas à suivre, je ne sais pas où donner de la tête. J'ai l'impression que toute cette tension, toute cette colère et toutes ces insultes appuient sur ma trachée, une à une, soufflé-je alors ces derniers mots. Voilà pourquoi je suis ici. Parce que je supporte plus ce stress, alors je fais des crises de panique, ou je me dis simplement que parfois, j'aimerais ne pas me réveiller si c'est pour revivre le même scénario que la veille. Parce que c'est pareil tous les jours.

— Ça doit être... Insoutenable.

Il renifle. Je le fixe, pensant qu'il était potentiellement en train de pleurer, mais non, il regarde simplement devant lui, le regard vide.

— Ça l'est, mais je me dis qu'il y a pire, alors... j'essaye de relativiser parfois.

— Mais il y a mieux aussi, alors tu as le droit de pleurer si c'est trop dur pour toi, t'as le droit de penser que t'es la plus malheureuse du monde, surtout si ça peut te permettre de t'endormir la conscience tranquille. Parce que tu sais, au fond, qu'il y ait des gens plus ou moins à plaindre que toi, bah on s'en fou, dit-il avec entrain. Le plus important, c'est comment tu le ressens, si pour toi, c'est comme la fin du monde, alors t'as le droit de penser que ça ne va pas le faire du tout. C'est humain, ça, me souri-t-il doucement, en reniflant.

— Merci...

Je lui souris gentiment en retour et remets une mèche de mes cheveux derrière mes oreilles, avant de baisser la tête vers le chien, puis vers mes mains légèrement tremblantes. Je serre les poings, je refuse que ça recommence. Je n'ai pas envie de pleurer, pas encore. Pas cette fois. Je ne veux pas.

𝐎𝐍𝐄 𝐍𝐈𝐆𝐇𝐓 𝐒𝐓𝐀𝐍𝐃 - mini sérieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant