Le Monde d'Avant

Arras et Tcheliabinsk (Isaac)

Arras, 2 juillet 2020

Le goût du monde avait changé depuis le déconfinement. Oui cela eut été l'amorce de notre renaissance, mais elle cachait une insidiosité plus grande et dangereuse. Savoir poser des mots sur de larges mouvements sociaux n'étaient pas mon point fort, au contraire, perché dans l'instant présent je m'étais rarement impliqué dans la construction d'un schéma mental me donnant les cartes de la compréhension. Néanmoins, ce qui se déroulait sous nos yeux et nos oreilles ébahis parfois même choqués et anxieux, enracinait un mal véritablement plus profond. Moi, cette poussière atomique, se jouait à vivre une vie morose au sein d'un appartement modeste, pouvait-on dire même très modeste. Anciens, d'autres de ces blocs architecturaux laids se juxtaposaient à celui qui daignait me loger. Les fameux Blancs Monts d'Arras dans toute leur splendeur. À défaut d'argent, les magasins aux pieds de ces bâtiments délités par les affres du temps peinaient à vivre. Ce dépérissement était à l'image de ma vie, bloqué dans un virage brumeux et orageux. Les ascenseurs odorisaient l'urine, la pauvreté et le crack. Finalement, cette ébauche à un non avenir pouvait se refléter dans la société d'aujourd'hui. Le Covid avait absolument absorbé toutes les moindres partielles d'informations, dans le seul but d'ériger son hégémonie lobotomisante. Enfin, cela va sans dire, les journalistes avides de clics et d'audience n'avaient eu de cesse d'engrainer cet état d'esprit ridicule.

Face à la télévision sans nuance, catégorisée dans tous les sens du terme, se délivrait peut-être un fait important. Puisqu'à l'orée de la sortie d'une crise sanitaire, une autre au ton plus grave se moquait de nous et de notre envie de renaître tel un phénix. L'Europe de l'Est était toujours en proie à un virus jamais réellement évoqué jusqu'alors. Un virus mis sur le devant de la scène seulement quelques minutes depuis la fameuse météorite de Tcheliabinsk en deux mille treize, induisant des conséquences fâcheusement bien cachées. Je pris la télécommande pour monter le son.

-Aujourd'hui de nouveaux cas suspects ont été recensés en pleine Sibérie occidentale. Le gouvernement Russe – ce qui en restait du moins – a d'ores et déjà annoncé avec l'aide de l'OMS et de la Chine son plan d'éradication massif des « infectés ». Le président Emmanuel Macron a fait savoir de son soutien matériel et financier créant ainsi une vaste polémique éthique. Ses détracteurs ont annoncé que le Président de la République ne respectait pas les valeurs humaines. Ce dernier, a répliqué que la pandémie mondiale que le monde venait de subir a été une leçon d'humilité, face au risque d'une nouvelle menace pandémique. Aux dires de certains, potentiellement plus meurtrière – Je baissai le son de la télé sous la curiosité d'en savoir plus

Internet ne donnait toujours que le même dessin de ce qui se passait en Europe de l'est et notamment en Sibérie. En comparant les différents journaux, comme Le Monde ou encore le Canard enchainé, il y eut sans cesse la même démarche de décrédibilisation des faits énoncés par les témoins des évènements. Toutefois, un journal un peu étrange édictait des évènements plus alarmants et terrifiants. Bien loin de ce discours rationnel, qui sans vraiment en douter, devait nous rassurer pour éviter la guerre civile qui se profilait à l'horizon. De fait, il énonçait que les infections avaient commencé quelques mois après l'évènement de Tcheliabinsk. Notamment chez ceux qui avaient manipulé les débris météoriques. Des signes de transformations superficielles avaient atteint la peau des patients, mais au-delà de ceci, c'était le caractère résolument agressif mais coopératif entre les infectés qui surprenaient, aux dires de l'article, les scientifiques et par la suite, les personnes confrontées à cela. Ça me paraissait saugrenues et tout bonnement de l'ordre de la fake news. Certains s'épanouissaient à alimenter l'hystérie collective. Mais, toujours sous l'influence de la curiosité, le petit lien laissé en bas de l'article m'invitait à aller jeter un coup d'œil sur ce qu'il voulut me dire. Je cliquai, m'envoyant sur une vidéo YouTube.