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Enfant de la lumière

Mes pas frappent doucement le sol, laissant derrière eux de petites traces dans l'herbe humide. Les bruits des oiseaux se mêlent au chant de la forêt. Elle laisse sa joie voleter autour de moi. Elle est belle ma forêt ! Pleine de couleur et de musique enjouée. Est-elle seulement réelle ? J'en doute. Mais moi, je suis bien là, avec elle, au milieu de ces arbres qui balancent leur épais feuillage.

Un petit écureuil saute de branche en branche. Vole, noble créature de la forêt ! Saute, cours, envole-toi ! Laisse le vent te guider au travers le ciel sans nuage qui nous enrobe de sa beauté azur.

Je ferme les yeux, laissant mes pieds nus glisser sur les tapis de mousse et de brindilles, de feuilles mortes et de petites fleurs. Un parfum si doux plane dans l'air. Enivrant, il me ferait oublier jusqu'à ma propre existence.

Une folle envie de courir me prend soudain. Pourrais-je m'envoler, comme ces oiseaux que je vois tourner au-dessus de la cime des arbres ? Peut-être bien. Je m'élance et laisse le vent claquer contre mon visage.

Ça y est, je vole. Je ne suis plus un être parmi les autres. Mes pieds ne touchent presque plus le sol. Non, ils bondissent gracieusement dans l'air. Ô, merveilleux rêve, ne t'en va pas ! Laisse-moi savourer encore ta douceur plus longtemps.

Le parfum, la douce musique de la forêt, le vent, ils décollent avec moi. Ils m'entourent et me portent, puis viennent me déposer au milieu d'une petite clairière. Et alors j'ouvre les yeux.

Les rayons du soleil traversent les arbres et viennent déposer sur l'herbe leur lumière dorée. Je me croirai au centre du monde. Au centre du paradis.

La lumière s'agite. La lumière tourne et s'enroule, brille et danse. Quel beau ballet ! Au son des oiseaux et du vent dans les feuilles des arbres, les rayons se tiennent par la main et forment un cercle de joie. Ils tournent et sautent, avant de retomber dans une pirouette. La fin de la danse sonne soudain. Les éclats de lumière s'inclinent, je perçois comme des applaudissements dans les craquements des branches. Dans un ultime tournoiement, ils repartent vers le ciel, en chantonnant le refrain d'une petite chanson.

Mais je ne suis plus seule dans la clairière. Auraient-ils oublié un de leurs amis ? Un petit rayon de soleil aurait-il oublié de remonter, trop entraîné par la danse effrénée ? Non, ce n'est pas de la lumière, pourtant. On aurait pu le croire, en contemplant une telle beauté. La lumière est belle sous toutes ses formes. Et même ici, en face de moi, cet enfant du soleil resplendit de grâce.

Quelle magnifique créature ! Je suis enivrée. Ça y est, on ne peut m'arrêter. Mes pas m'entraînent vers cet être inconnu. Cher ami, cher enfant de lumière, pourquoi à ta contemplation je ne peux me soustraire ? Je ne contrôle plus, c'est un instinct qui me pousse. Une faim débordante. Une envie irrésistible.

Je m'approche et tend la main. Tu es si beau, enfant de lumière. Enfant ? Tu sembles si sage pourtant. Tu es si beau. À quoi ressembles-tu seulement, créature des cieux ? Je ne peux te discerner, et pourtant mes yeux ne se détournent de toi. Quel délicieux paradoxe !

Qui es-tu, hôte de mes pensées, unique lumière de mon monde ? Serais-tu perdu ? Serais-tu venu pour moi ? Je t'attends et m'incline devant toi, désormais nous ne faisons qu'un.

Quelle étrange créature, tout de même ! Tu n'as pas de forme et pourtant je peux te sentir, te voir. Tu es là, devant moi. Une créature du soleil ! Sur ta peau les rayons dansent encore.

Mes doigts s'avancent et se posent sur toi. Se posent-ils vraiment ? Je ne suis pas sûre qu'on puisse toucher de la lumière. Mais mes doigts s'enroulent autour de toi. Ton souffle chaud me rassure et me détend. La vie semble t'appartenir. Moi aussi, je suis tout à toi désormais.

Recueil des mots perdusOù les histoires vivent. Découvrez maintenant