Le Roi des Elfes

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Le lendemain matin avant l'aube, Alfirin se leva. Deux jours de route l'attendaient pour se rendre au Royaume des Forêts, et le temps lui était compté. Elle n'avait que très peu dormi, mais les Elfes n'ont pas besoin de plus de deux ou trois heures par nuit pour se retrouver en pleine forme, ni même de dormir toutes les nuits. Cela facilitait grandement les longs voyages.

Elle s'habilla rapidement, et sortit de sa chambre. 

Tandis qu'elle marchait à travers les multiples couloirs et salles de la cité creusée, Alfirin croisa quelques Nains qui ne lui prêtèrent guère attention, trop occupés par leurs occupations. Ils portaient, pour la plupart, des pierres précieuses, des minerais brut, des outils de minage...

Au tournant d'une colonne, l'elfine rabattit sa capuche sur sa tête, et arriva devant la grande porte d'Erebor. Là, on lui rendit ses armes, et un Nain lui amena son cheval, Alwy, harnaché.

Alfirin les remercia d'un signe de tête, et monta en selle, avant de quitter au galop la Montagne Solitaire, en direction de la Forêt Noire.

Elle repassa par Dale, les rues encore vides en ce début d'aube. Les rayons blancs du soleil pointaient à peine à l'Est de la montagne, et une brume matinale couvrait la végétation, lui donnant un air fantomatique. La rosé de la nuit s'était déposée sur le sol, le rendant légèrement glissant.

Au sortir de la ville, Alfirin talonna Alwy qui réceptionna l'ordre et accéléra. Ses sabots battaient la terre régulièrement alors qu'ils avançaient, et au fil de la journée le soleil se leva. Quand il fut haut dans le ciel, une pause s'imposa, et l'elfine attacha son cheval avant de sortir un morceau de lemba, le pain elfique. Elle en prit une bouchée, et fut immédiatement rassasiée. Elle laissa Alwy brouter quelques minutes, puis se remit en selle.

Deux jour et deux nuit durant, Alfirin galopait. Elle faisait des pauses de temps en temps pour laisser son cheval brouter et se reposer, puis se remettait en route sans attendre plus.

C'est ainsi qu'après deux jours, elle arriva à l'entrée de Mirkwood. À l'entrée comme à la sortie de la forêt, un trou noir s'ouvrait sur le chemin, presque invisible au milieu des arbres aux branches grises et au feuillage touffu.

Ralentissant, la messagère entra dans la forêt. Elle savait qu'elle ne devait pas perdre de vue le sentier, ou elle serait à la merci de la forêt sans pitié.

Depuis quelques années, tous les arbres de la Terre du Milieu s'agitaient, elle le sentait bien. La colère se répandait parmi eux, et ils étaient devenu hostiles. Tout cela à cause du petit objet qu'était l'Anneau Unique. Petit, mais incroyablement dangereux.

À mesure qu'elle s'enfonçait dans les bois, la végétation devenait de plus en plus broussailleuse, impénétrable, et Alfirin dû mettre pied à terre et guider Alwy à la longe, et écarter les branches qui entravaient son chemin, prenant garde à ne pas les abîmer. 

Elle ne vit aucun animal, aucun oiseau. Un silence pesant planait sur la forêt. L'air était lourd, plein de tension, et rien ne bougeait. Pas un souffle de vent ne remuait les feuilles des arbres. Uniquement le bruit des pas d'Alwy et Alfirin. L'atmosphère oppressante de la forêt sans couleur créait en Alfirin un sentiment de confusion qui lui nouait les entrailles. Elle accéléra le pas, désireuse de s'extraire de cette sensation de faiblesse qu'elle détestait tant, et déboucha quelques heures après sur une clairière lumineuse. Ici, les oiseaux chantaient librement, et l'ombre présente sur le reste de la forêt disparut à l'instant où elle posa un pied dans l'herbe verte. Elle se retourna, mais ne vit qu'une forêt à la végétation luxuriante dont les nuances de gris lui laissaient deviner la richesses des couleurs, et où les écureuils couraient sur les branches. Elle sourit en les voyant, et se remit en marche. 

Elle parcourut encore quelques centaines de mètres, et enfin, elle vit les portes de la cité elfique. Lourdes portes de pierres, séparées de la forêt par une rivière grondante engendrée par un pont, qui reliait la cité à la rive.

Alfirin traversa ce pont, et lorsqu'elle arriva devant les portes, deux gardes elfes pointèrent immédiatement sur elle leur lance d'argent. L'un d'eux lui prononça d'une voix froide :

- Qui êtes-vous, et que voulez vous ?

Et Alfirin répondit la même chose qu'aux Nains d'Erebor. Mais, lorsque les Elfes lui retirèrent ses armes et prirent son cheval, et que la messagère s'apprêtait à pénétrer dans le royaume souterrain, deux autres gardes arrivèrent. Ils se placèrent de chaque côté de l'elfine, et elle comprit qu'ils n'étaient là que pour surveiller ses moindres faits et gestes, et intervenir en cas de problème.

Tandis qu'ils s'avançaient sur les sentiers de pierre taillée, les ponts, qui serpentaient entre les immenses colonnes de pierre sculptée qui soutenaient le plafond de la caverne, Alfirin admirait la caverne. Contrairement à Erebor, elle n'était jamais venue au royaume sylvestre, et en avait seulement entendu parler lors des discussions des Elfes de Fondcombe.

On disait de ceux qui habitaient ces cavernes des êtres plus sauvages que les autres de leur race, moins sages. Leur roi, Thranduil, était d'après les dires, quelqu'un de froid et d'impassible, qui n'hésitait pas à enfermer dans ses prisons ceux qui s'opposaient à sa volonté, comme la Compagnie de Thorin Écu-de-Chêne, venue plus de soixante ans auparavant.

À mesure qu'ils progressaient, Alfirin distinguait de plus en plus nettement une salle circulaire, immense et très haute de plafond, piquée de rayons de soleil qui perçait le plafond, et de piliers taillés directement dans la pierre aux décorations raffinées. Cela donnait à l'endroit une atmosphère particulière, partagée entre la froideur de la pierre et la chaleur du soleil. Au milieu de la salle était sculpté un trône niché au creux d'un chêne majestueux qui semblait s'élever à l'infini. 

La messagère posa un pied sur l'escalier qui permettait d'accéder au trône royal. Elle rabattit sa capuche et leva la tête, puis posa pour la première fois son regard sur Thranduil.

Il possédait de long cheveux qu'elle supposait être d'un blond argenté, sur lesquels était posée une couronne de bois, de baie et de feuilles pour l'automne installé. Ses yeux perçants, qu'elle s'imagina bleus mais voyait gris, noyaient quiconque aurait le malheur de s'y perdre. Il dégageait une prestance et une élégance à la fois ébranlante et intimidante. Alfirin se rendit compte qu'elle ne disait rien depuis plusieurs secondes et qu'elle dévisageait le roi, se reprit et s'agenouilla devant le roi en baissant la tête.

Un monde en couleur (Thranduil x OC)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant