Chapitre 5

35 6 42
                                    

– Tressie... murmura une voix douce à son oreille.

L'interpellée, plongée dans un demi-sommeil, ne répondit pas. Le soleil filtrant à travers les vitres du véhicule caressait sa peau de manière agréable, conservant ainsi son corps à une température idéale. En outre, elle était toujours dans sa position de départ, c'est-à-dire ses pieds appuyés sur le tableau de bord et un bras passé à travers sa fenêtre ouverte. Les légers cahots la berçaient. C'était si confortable comme conditions, pour dormir...

– Tressie, insista la voix, moins conciliante. Ouvre les yeux.

L'adolescente n'en avait aucune envie. Pour une fois que son rêve était agréable ! C'était rare quand elle ne faisait aucun cauchemar. En fait, ses terreurs nocturnes étaient tellement fréquentes qu'elle avait appris à passer au-dessus. Elles ne la réveillaient même plus, sauf cas exceptionnel.

De quoi traitaient ses mauvais rêves ? Oh, de tout un tas de choses... Ce n'était bien souvent rien d'autre que des bribes de souvenirs de la bataille de Thanksgiving, de la centrale, des vers carnivores peuplant les champs, de la mort de l'un ou l'autre de ses proches... Parfois, tout ça se combinait et créait des scènes d'une telle atrocité qu'elles parvenaient à lui coller des frissons tout au long de la journée qui suivait. Son cerveau la terrifiait, parfois. Il avait la faculté d'inventer des abominations qui feraient pâlir Drake de jalousie...

Dernièrement, les réminiscences de la mort d'Howard, de sa descente dans la caverne et de sa longue errance dans le désert plongé dans des ténèbres insondables prenaient le pas sur ses autres cauchemars. Ils étaient même parvenus, pas plus tard que cette nuit-ci, à la tirer du sommeil en hurlant. Chose qui n'était plus arrivée depuis bien longtemps.

Mais... en cet instant, ce n'était pas le cas. Non. Tressie rêvait d'un très gros gâteau au chocolat que Jeanne Oxford lui avait préparé juste pour elle. Il y avait aussi du soda, des chips, des bonbons et... C'était une pizza, là-bas ?

– Oxford, putain, réveille-toi !

La voix en avait assez de se faire ignorer. Une claque à l'arrière du crâne manqua de faire tomber la meneuse de son siège alors qu'elle se réveillait en sursaut. Elle regarda autour d'elle d'un air alarmé et, quand elle comprit que cette montagne de nourriture n'était qu'un doux songe, elle se laissa choir contre son dossier avec un profond soupir. Elle frotta ses yeux bouffis de sommeil.

– Pas trop tôt ! râla Triss. T'es tombée endormie en quelques secondes. C'est la nuit, que tu dois faire ça !

Tressie, comprenant que la rouquine était responsable de son violent éveil, lui lança un regard mauvais en se frottant l'endroit où elle l'avait frappée. Si ça avait été quelqu'un d'autre, elle se serait déjà mangé un éclair. Mais elle possédait assez d'importance à ses yeux pour que son amie ne lui tienne pas rigueur de son... manque de tact. Triss le savait et en jouait. D'où ce sourire mielleux qu'elle arborait.

Laissant son bras retomber le long de son corps, elle dirigea son regard vers la fenêtre pour constater qu'ils étaient dans Brace Road. Même carbonisées, elle était capable de reconnaître ces maisons. L'école publique de Perdido Beach devant laquelle ils passèrent la conforta dans cette idée.

– On est arrivés, à ce que je vois ?

– Oui, confirma Josh. Je vais jusqu'à l'hôtel de ville ?

– Ouais... C'est sûrement là que Caine se trouve.

Il hocha la tête, les mains crispées sur son volant. Il peinait à manœuvrer la voiture entre les débris de l'incendie s'étant éteint de lui-même trois jours plus tôt et les carcasses d'autres véhicules toujours disséminées çà et là. C'était un beau désastre.

Light [Gone T.6]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant