Hestia
—Fuis, Hestia ! Fuis ! Il arrive !
Je me réveillai en sursaut, le cœur battant à cent à l'heure et le souffle court. J'agrippai fébrilement ma couette pour la rabattre sur le lit, en quête de fraicheur. L'air lourd faisait perler sur mon front des gouttes de sueur et aplatissait mes cheveux sur ma nuque.
Je me levai pour aller me rafraichir un peu, mon pyjama collait à ma peau. Au passage, j'ouvris la fenêtre qui donnait sur la rue, tout était calme, un peu trop même. Je m'accoudais un instant sur la rambarde pour contempler le paysage. Je percevais de douces effluves marines qui venaient chatouiller mon nez, je fermai les yeux apaisés et ressassai le rêve que je venais de faire. Il avait pourtant bien commencé...
J'étais avec Eyton au bord d'un plage, nous contemplions le coucher de soleil qui nous caressait de ses chauds rayons. Il avait passé un bras autour de mes épaules, et j'avais blottie ma tête contre son torse, énivrée par son parfum, un mélange boisé et musqué. Il me susurrait des mots doux et m'embrassait amoureusement. C'était un moment romantique et magique.
Tout à coup, une tempête s'était levée, l'océan c'était déchainé et des éclairs avaient déchirés le ciel. Je fus séparé de mon aimé et j'entendis une voix qui me disait de fuir, l'urgence dans le ton utilisé m'avait effrayé. Eyton, fut emporté, par une vague et...—Croac
Je me tapai la tête sur la vitre surprise par ce croassement strident. Je le cherchai du regard et l'aperçu perché sur le poteau électrique en face de la maison. Un corbeau.
—Ahhh, sale bestiole, tu m'as fait peur.
Je posais la main sous ma poitrine, on aurait dit que mon pouls avait participé à une course de vitesse.
—Croac, croac, croac, continua le volatile en s'agitant.
Je fronçais les sourcils face au comportement pour le moins étrange de la bestiole. Je fouillai ma chambre pour trouver quelque chose n'importe quoi, afin de lui faire peur. Rien sur mon lit à baldaquin blanc, recouvert de draps en soie mauve et gris. Rien non plus, sur ma coiffeuse remplie de parfums et de vernis. Rien de spécial sur mon bureau – un bic, trop petit, des cahiers trop légers, le dico trop lourd. Rien dans la garde de robe, mis à part mes vêtements.
J'eus soudain une illumination, j'entrai dans la salle de bain, toute de grise vêtue, pour saisir ma brosse à cheveux. Une fois l'objet en main, je retournai à la fenêtre. Hors de question que cet oiseau de mauvais augure reste là. Il me faisait froid dans le dos. Je visualisai bien la position du volatile, c'était important pour que mon tir soit parfait et atteigne sa cible. Il fallait lancer ni trop fort, ni trop doucement, je devais trouver le juste milieu.
L'oiseau déploya ses grandes ailes, c'était vraiment un gros spécimen, il faisait ployer le câble électrique. Je le trouvai vraiment bizarre, il avait l'envergure d'un gros chien, c'était pour le moins inhabituel. J'avais peur qu'il ne s'agisse d'un espion d'Artémis. Si c'était le cas, il ne fallait pas qu'il m'aperçoive.
—Croac, Croac, fit-il menaçant.
—Ouste, va-t'en !
Ses yeux croisèrent les miens. Il avait l'air intelligent et ses mirettes aussi noir que l'obsidienne. Il ouvrit encore son bec pour croasser et je cru un instant qu'il allait se mettre à parler. Prenant mon courage à deux mains je lui balançai ma brosse à cheveux avec maladresse. Je n'étais pas experte en lancer d'objet. Mon arme de fortune effleura l'oiseau. Cela fut suffisant pour lui faire perdre quelque peu l'équilibre, mais il parvint à ne pas tomber en prenant son envol. Il fusa dans ma direction, en semant de puissant croassement lugubre, et je fermai la fenêtre juste à temps. Il fut arrêté en plein avant même d'atteindre la maison par quelque chose d'invisible qui le repoussa. Je rouvris la fenêtre et me penchais ver l'avant pour mieux voir. Mon regard fut attiré par une ombre noire qui se cachait dans les ténèbres. Le corbeau ne semblait pas l'avoir aperçu car il continuait à croasser inlassablement en devenant de plus en plus agressif. Un éclat argenté attira mon attention vers la silhouette cachée derrière une voiture. Elle était vêtue d'une sorte de long manteau noir et la large capuche dissimulait ses traits. Mais à n'en point douter au vu de la carrure il s'agissait d'un homme. Je commençai à avoir sacrément peur de cette filature à mon encontre. Si ça continuait, j'allais devoir avertir Décerto de ma rencontre avec Artémis, elle n'allait pas être contente. L'inconnu lança un projectile sur le choucas, un sang pourpre jaillit de la gorge du volatile là où la lame s'était fichée. Je ne pus m'empêcher de crier face à la violence de cet acte. Je posai mes mains sur ma bouche en regardant le corps sans vie du corbeau s'échouer en contrebas. J'avais surement attiré l'attention du tueur. Je risquai un coup d'œil pour voir s'il était toujours là. Il s'était encore avancé et se tenait juste devant le portail de la maison. A aucun moment, il ne fit mine de s'avancer plus, il se contenta de se saisir du cadavre avant de m'adresser un signe d'adieu de la main. Il savait que j'étais là. Les membres tremblant je refermai la fenêtre, tirait les rideaux et partis me réfugier sous mes couvertures.
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L'héritière du Tartare
ParanormalConnaissez vous le célèbre dicton : les murs ont des oreilles ? Eh bien, il s'adapte parfaitement à mon histoire. Quoique, je devrais plutôt dire les vagues ont des oreilles. Je ne m'attendais pas du tout à un tel bouleversement, moi qui vivais tra...