Chapitre 3

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Waliis, le village aux mille songes, était un lieu charmant : le soleil, le ciel bleu, les paysans gais et chantants ravissaient la jeune elfe bleue. Un petit sourire s'établissait sur son visage clair et nacré. Elle tourna sur elle-même, heureuse de respirer le bon air frais d'une belle journée ensoleillée. Mais ce qui embellissait le plus la journée de Mira était le fait que Waliis se trouvait juste à côté de la cachette de Randalph. Mira se souvenait du soir, sous un ciel noir et constellé d'étoiles brillantes, où son protecteur lui dit : « Rends-toi à Waliis, suis le cours d'eau jusqu'à une petite cascade. Une fois que tu seras près de la cascade, lève les yeux. Tu trouveras un chêne centenaire et tu me trouveras, moi, par la même occasion ». Ces phrases résonnaient en elle depuis ce moment, il y a déjà des années. De très nombreuses fois, Mira avait pensé sauter le pas, elle voulait le rejoindre et l'aider dans sa quête car, elle le savait au plus profond d'elle-même, l'humanité entière avait besoin d'elle. Mais elle s'y refusait, essayant de croire que son destin était déjà tracé avec Daren, tentant en vain de l'aimer ou du moins d'apprécier sa présence.
Perdue dans ses pensées, Mira suivait la rivière, chantonnant doucement une mélodie de son pays. Malheureusement, ce doux moment fut de courte durée.

Un son de trompette retentit . Mira connaissait ce son si familier. La garde royale d'Enkiel. Les soldats étaient là pour elle, pour la ramener au château et faire d'elle une femme rangée, mariée à un homme qu'elle n'aimait pas, feintant d'ignorer le mal qui rongeait depuis des lustres son pays ; ils pouvaient toujours courir.
L'un d'eux, le commandant Brutus, descendit de cheval. Il enleva son casque et se dirigea vers les couturières. Celles-ci rougirent à son approche. Il est vrai que Brutus ne laissait personne indifférant avec son air fier, ses cheveux bruns brillant au soleil et ses yeux bleu acier soulignés par des sourcils épais qui rendaient son air sévère. Brutus avait l'air contrarié. Il tenait son casque bleu et argent sous le bras, et, une fois arrivé devant les trois femmes, il fit une courbette bien maîtrisée pour leur adresser son respect. Brutus engagea la conversation. Mira, trop éloignée de lui, ne put l'entendre. Elle ne possédait malheureusement pas le don de l'hypersensibilité. Et comme un problème n'arrive pas seul... La paysanne aux cheveux blonds semblait intéressée par la conversation et s'avança vers le commandant. Elle allait parler de Mira, c'était sûr.
La jeune elfe ne devait pas se faire remarquer. Et pourtant, il y avait du monde au village.
L'elfe pensa à sortir de l'allée principale, elle marcha plus rapidement, à l'opposée des soldats.
Une ruelle se trouvait à sa droite ; parfait. Elle bifurqua donc à droite, il n'y avait personne dans cette rue. Elle se mit à courir. Ses mollets la faisaient souffrir. La course de la veille avait laissé des traces mais peu importait, elle devait sauver sa vie, et celle du monde entier par la même occasion.

Au bout de la rue, Mira aperçut une petite auberge fermée, faite de pierres grises mélangées à de la chaux. Sa porte était bleu clair et juste au-dessus était clouté un écriteau. Mira lu le nom de l'auberge : « Le verre vide », un nom bien paradoxal. Elle frappa à la porte une fois, deux fois, trois fois, mais personne ne lui répondit.
L'angoisse commençait à monter. Des soldats étaient à ses trousses et si elle ne pouvait pas demander refuge, cela allait être compliqué de les semer.
L'elfe réfléchit quelques instants. Les soldats pouvaient survenir d'une minute à l'autre, elle était seule et dépourvue d'aide. Elle ne pouvait compter que sur elle-même et sur ses talents avec l'eau. De l'eau, mais oui bien sûr ! Elle pouvait parfaitement se camoufler dans la rivière ! Mais pour cela, il fallait qu'elle retourne dans la rue principale qui bordait le cours d'eau, et potentiellement se retrouver nez à nez avec Brutus...

Mira prit son courage à deux mains et commença à rebrousser chemin tout doucement. Arrivée au coin de la ruelle donnant sur la rue principale, elle s'arrêta un instant, passa sa tête et vit les soldats continuer de parler aux paysans.

Tout à coup, elle entendit derrière elle la voix nasillarde d'un homme âgé. Celui-ci criait : « Eh fillette ! C'est toi qu'as frappé chez moi ? T'veux quoi ? ».

Shanon, un des soldats de la garde détenant le don de l'hypersensibilité, leva la tête directement vers Mira. Il fronça les sourcils. Mira n'eut pas le temps d'en voir plus. Elle se mit à courir, se précipita vers la rivière juste en face d'elle et plongea dans l'eau claire et fraîche. Une seule idée en tête : se cacher dans les profondeurs de son élément.

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