Qui t'a fait croire que tu étais spécial?

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J’arrive vers vingt-trois heures à la salle de sport. J’ai eu une heure pour me calmer même si la haine est toujours là.

J’aperçois au loin Henry en train de faire des tractions, torse nu. Il est tatoué sur tout le torse, de plein de dessins différents.

“Tu es tatoué sur tout le corps?” dis-je en arrivant derrière lui

“Si ta question c’est est-ce que je suis tatoué en bas, la réponse est non.” dit-il en faisant une dernière traction

Je pose mon sac par terre et m’attache les cheveux, silencieuse.

“Un problème?” dit-il

“Non.”

Il me détaille du regard.

“Ok, alors dépêches-toi de monter sur le ring.” dit-il

Je le suis et monte dans une petite arène de boxe. On met des gants.

“Pourquoi tu ne veux pas me dire ce qui s’est passé?” dit-il en se mettant en position de combat.

C’est ridicule, je devrais être chez moi à pleurer sous la douche, comme je fais d’habitude.

“Parce que je n’ai pas envie de t’en parler.”

Il me met un petit coup dans l’épaule.

“Hé doucement!” dis-je outré

Il m’en remet un autre suivi d’un coup au niveau du menton. Il contrôle suffisamment mes gestes pour que ça ne me fasse pas si mal que ça. Mais quand même!

“Bon j'me tire.” dis-je en m’éloignant

“Tu choisis toujours l’option de la facilité à ce que je vois!”

Je m’arrête et me retourne.

“Qu’est-ce que tu viens de dire?” dis-je

“Je viens de te dire que tu ne te bas pas, que tu laisses toujours tomber quand ça devient trop difficile!” dit-il en haussant le ton

Je sers le poing.

“Tu ne sais rien de moi, pourquoi t’insinue un truc pareil?!”

“Oh si Auxane. Je crois même que je commence à bien te connaître et c’est pathétique.”

Je serre les dents et m’approche de lui.

“Répète?” dis-je, toujours énerver

“J’ai compris tu as abandonné Harvard, tes parents, ton ex blablabla. Mais pourquoi finalement? Pour abandonner une fois de plus quand une difficulté se présente?”

C’est trop. Je me dirige vers lui et lui envoie une droite qu’il bloque.

“J’en ai marre que tout le monde se défoule sur moi, alors lâche-moi”

“Qui t’a fait croire que tu étais spécial?”

“Tais-toi” dis-je en mettant un autre coup.

“Alors, la pourrie gâtée, voyons voir ton palmarès!” commence-t-il

Je le frappe sans m’arrêter.

“Auxane Davis, la fille de l’architecte talentueux! Auxane Davis remporte le concours de tennis junior de Nashville! Auxane Davis en charge de l’inauguration du centre pour les jeunes défavorisés!" dit-il

Je lui donne un coup de toutes mes forces qu’il prend. Il me pousse ensuite et je tombe à terre, laissant échapper une larme.

“Je t’en supplie, arrête.” dis-je crisper

“Tu as toujours eu tout ce que tu voulais dans la vie, et maintenant que tu as de vrais problèmes tu laisses tomber!"

“NON!” dis-je en me levant “Je me laisse du temps pour remonter la pente”

“Et tu attends quoi au juste, hein? Que quelqu’un règle la situation pour toi?” dit-il en hurlant.

“Je…”

“Tu quoi!” dit-il

J’enlève mes gants et les jette par terre.

“T’es qu’un sale con!” dis-je en m’éloignant

Je sors du ring et prends mon sac.

“Auxane” dit-il calmement

Je ne lui réponds pas et vais pour sortir. Il se met entre moi et l’entrée.

“Tu voulais m'énerver et me provoquer, tu as eu ce que tu voulais. Maintenant laisse-moi partir.” dis-je

Il m’observe et se décale. Je sors et vais à l’arrêt de bus. C’est un enfoiré. Anthony aussi. Mon père aussi. C’est à cause d’eux tout ça…

Je prends une inspiration.

Non c’est à cause de moi. Il a raison. Je m’enterre dans une routine parce que je ne veux pas affronter la réalité. Sauf que ça… ce n’est pas moi. Je suis une fille talentueuse, et je dois me donner les moyens de montrer mon talent. Je ne suis pas la seule à vivre ce genre de situation, et tout ce que j’ai fais, c’est ne penser qu’à ma petite personne. Henry ne voulait pas me faire de mal, il voulait me faire comprendre.

Au loin, je vois Henry sortir de la salle de sport. Il s’approche et s'assoit à côté de moi. Il regarde en face de lui, neutre et je vois que je l’ai pas loupé, vu qu’il a la pommette droite rouge.

“Désolé…” dis-je.

“C’est rien.”

Je reste silencieuse et pose ma tête sur son épaule.

DecisionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant