7. Confrontation (2/2)

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Varney arpentait fébrilement l'usine désaffectée, à la lisière du quartier rouge ; zone de non-droit où seules les vermines se risquaient. D'ordinaire, il gardait ses victimes au chaud dans les sous-sol du Hot Blood. Mafieux, vampires et loups-garous s'y entassaient pour s'affronter dans des combats sanguinaires et s'adonner à une passion commune : planter leur bouche visqueuse dans de la tendre chair. Mais cette fois, Varney s'en était pris à l'un des siens, il avait donc été contraint de délocaliser sa planque.

Sa victime était bâillonnée, ligotée à une colonne centrale. Varney s'approcha, le faciès venimeux. Ses pas lourds résonnaient dans ce lieu désert et humide, interdit de lumière, infesté de rats. Il souleva le menton du garçon pour l'observer avec attention.

— Un garçon peut donc en cacher un autre... Qui aurait cru que je te retrouverais en vie ? Tu aurais dû mourir avec tes parents.

Le gosse aurait dû disparaître dans l'accident de voiture. Si son Maître apprenait qu'il vivait encore parmi eux, il le payerait cher. Et les conséquences seraient désastreuses. Varney l'examina de longues minutes, comme s'il pouvait lire les réponses à ses trop nombreuses questions dans les traits délicats de Suni. Il renifla, lubrique, puis se lécha les lèvres tel un serpent prêt à fondre sur sa proie.

— Pourquoi tu sens si bon ?

Le jeune homme gémit en se débattant en vain. Varney s'inclina pour humer son cou, parfumé d'une délicieuse odeur ; une trace de son passé, aussi ancienne que le paradis. C'était effrayant mais surtout euphorisant, plus puissant qu'un shot de sang de vierge.

— Si ton chevalier servant ne se hâte pas, je pense que je vais croquer un bout, appétissante créature.

Suni paraissait si inoffensif, comment pouvait-il représenter le moindre danger ? Varney pourrait le tuer d'un seul coup de croc, ou de griffe acérée. Pour l'heure, il désirait lui infliger une tout autre torture.

— Alors, où est ton protecteur ? Tu crois qu'il me laisserait te goûter ?

Suni tremblait tandis que Varney caressait son cou, bestial. Ses crocs percèrent ses gencives ; excroissances de désir.

— Maître, il ne devrait plus tarder à présent, déclara Hmapa, son ombre fidèle.

— Quel dommage, regretta Varney sans quitter Suni de ses yeux fielleux.

— Alors c'est vraiment lui ? C'est le garçon ?

— Oui, c'est lui.

— Bonne prise, maître.

— Très bonne. Je pensais avoir pêché un petit poisson d'eau douce... Mais dans mes filets, j'en ai trouvé un bien plus gros.

— C'est vrai, ce qui se dit ? À son propos ?

— Je ne sais pas. Mais je ne dois pas le laisser filer. Si la prophétie se confirme, un grand malheur nous guette.

Hmapa se tourna vers Suni, comme s'il le voyait pour la première fois :

— Pourquoi t'as pas crevé dans l'accident comme tes saletés de parents, hein ?

— Ne t'inquiète pas, Hmapa, il est toujours temps d'arracher la mauvaise herbe.

Un fracas strident ajourna les plans du ravisseur pour sa tendre victime. Synchrones, tels deux frères siamois, Chayan et Kao soulevaient à mains nues le rideau métallique du parking abandonné, offrant une entrée des plus théâtrales.

Une grimace hypocrite étira le visage sournois de Varney.

— Enfin, on a failli attendre.

— La cavalerie est là pour sauver le petit cul de l'humain, se gaussa le loup-garou.

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