Chapitre 5

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Un camaïeu de couleurs recouvrait le lit face à moi. Les minutes s'égrainaient au fil des mots sur le papier. J'appréciai chaque lettre hâtivement esquissée, comme si l'on venait de m'offrir un mets d'une délicatesse sans nom. Quelques bribes de phrases s'alignaient les unes les autres, occupant mon esprit torturé. Le temps me manquait.

Une notification sur mon téléphone s'afficha, me hurlant de renoncer à mon inspiration inespérée pour ces vêtements éparpillés. Je les avais délaissés alors que l'anxiété m'avait tenu aux tripes. Dix-neuf heures vingt-quatre. Il me restait moins de trente minutes pour me préparer, si je ne voulais pas poser un lapin à Hope. Mon ventre se noua davantage. Ce rendez-vous était-il réellement une bonne idée ?

De la chemise la plus extravagante au smoking, je les avais tous essayés sans succès. Aucune tenue ne paraissait assez digne de lui, de sa bienveillance ou des sentiments étranges qu'il faisait naître en moi.

Ce tee-shirt bleu aux imprimés de pop culture me semblait d'un banal affligeant. Quant au costume trois pièces, il serait bien trop pompeux pour l'occasion. Je n'allais pas non plus le demander en mariage. Pourtant, je désirais faire sensation. Nous allions nous rencontrer pour la première fois hors de ce café de quartier. Mais si je continuais ainsi, à tourner en rond, sans trouver de quoi me mettre sous la main, je lui ferais la pire de toutes.

En dernier recours, j'appelai Ambre. Les longues sonneries brisèrent le silence pressant. Une. Mon cœur commença à tambouriner dans ma poitrine. Deux. Mon souffle se raccourcit. Trois. Ma langue s'assécha.

Allez, pitié, décroche, priai-je.

La quatrième retentit bientôt, comme pour m'enlever tout espoir. Toutefois, alors que le répondeur s'enclenchait, deux coups résonnèrent contre ma porte d'entrée.

Regardant une dernière fois la pile d'habits entassés sur la couette avec désarroi, je me dirigeai vers le battant.

La frimousse de ma meilleure amie se dévoila alors, m'ôtant un poids. Elle n'attendit pas que je l'invite à l'intérieur. Au contraire, Ambre se glissa dans l'ouverture et constata d'un œil critique le désordre que j'avais mis dans la pièce d'à côté.

— J'ai bien fait de venir. Tu es une vraie catastrophe !

Je tendis mon portable comme une preuve de bonne volonté, avant de raccrocher.

— J'allais t'appeler au secours.

Elle se retourna pour me faire face et ses yeux m'observèrent de haut en bas, critiques.

— On a du travail, si l'on veut tirer quelque chose de toi dans les temps.

Un sourire contrit assombrit mon visage, tandis que mes doigts empoignèrent mon maillot, nerveux.

— Commençons par le commencement. Tu t'occupes de cette barbe et moi, je vais te trouver une tenue.

— Qu'est-ce qu'elle a ma barbe ?

— Ton date ne s'attend sûrement pas à dîner avec un grizzli, ce soir. Tu es magnifique, mais tous ces poils hirsutes ne te rendent pas justice. Allez, fais-moi confiance et va tondre tout ça. On va te rendre à croquer.

Sans me laisser le temps de protester, elle me tourna le dos et partit à la conquête de la pile infernale de vêtements. Alors, je n'eus d'autre choix que de me diriger vers la salle de bain.

Quelques minutes plus tard, j'entrai dans la zone de guerre qu'était devenue ma chambre, la peau lisse et hydratée. Ambre me tendit un tee-shirt blanc accompagné d'une chemise en daim et un jean ajusté à ma taille.

— Tu sais, ce n'est pas un vrai rendez-vous. C'est juste... comme ça. Je lui ai seulement proposé de se voir parce qu'il m'a beaucoup aidé. En quelque sorte, c'est un prêté pour un rendu.

Espoir ne tient qu'à un café [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant