Prélude : - EUROS -

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Euros huma l'air.

- Même aussi près du port, on ne sent rien, grommela-t-elle pour elle-même.

Aucune odeur de poisson, aucune odeur d'iode. L'atmosphère, figée, ne transportait plus rien.

Elle se dirigea vers la basse ville, vers les quais.

Euros était souvent de bonne humeur mais aujourd'hui ce n'était pas le cas. Une grande partie de son plan dépendait de maintenant, de ce qu'elle allait dire et de ce qu'il allait lui répondre. Et Euros détestait l'idée que tout cela puisse dépendre d'une seule et même personne et pourtant ...

Cela faisait six ans que le Vent avait disparu de l'Ouest du monde. Six ans que les oiseaux peinaient à voler, que les montgolfières ne transportaient plus personne et que les bateaux restaient au port. Plus de brise, plus de rafale, pas même le plus petit courant d'air.

C'était insupportable.

Les habitants désertaient peu à peu la région, excédés, parfois rendus presque fous par l'atmosphère pesante. L'exil des gens de l'Ouest était si important qu'on commençait déjà à parler du «Grand Vide » pour désigner sa région littorale. Pêcheurs, marchands ou contrebandiers ainsi que la vie qu'ils induisaient avaient presque disparu.

Les tavernes s'étaient vidées lentement avant de fermer tout comme les auberges, les échoppes de poisson ou de marchandises venues d'ailleurs.

Sans marins, les villes portuaires de l'Ouest mouraient à petit feu.

Euros ne venait pas l'Ouest mais c'est ici qu'elle vivait.

Elle n'avait pas vraiment eu le choix.

Au bout de quelques mois à contempler les paysages mornes et immobiles, dans la petite cabane qu'elle habitait dans les terres, Euros avait décidé que le mieux était encore de tenter de rendre le vent à sa nouvelle terre d'accueil.

C'est donc ce qu'elle comptait faire.

La port apparut au bout de la rue escarpée qu'elle finissait de descendre et un sourire se dessina sur son visage crispé. Des voiles, des mâts attendaient à quai. Le dernier bateau du Nord-Ouest.

Elle l'avait attendu, elle l'avait guetté, de port en port, au fil des mois qui venaient de passer.

Il n'était pas facile de voir le Sedna et encore moins de rencontrer son équipage. Cela demandait du flegme et une certaine capacité d'anticipation.

Heureusement pour elle, Euros était quelqu'un de patient et de profondément déterminé. Elle savait qu'il ne servait à rien de forcer le destin ou de se précipiter, au risque de mal faire. C'est ce qui faisait d'elle une excellente stratège militaire, la meilleure de tout l'Est. C'est aussi ce qui faisait qu'elle ne pouvait plus y mettre les pieds.

Le dernier bateau du Nord-Ouest. Un miracle dont ses hôtes prenaient toute la mesure. Le Sedna était ardemment convoité et tout le monde espérait réussir à faire partie de son équipage, d'une manière ou d'une autre. Cela faisait du capitaine Shina un des hommes les plus méfiants de la planète et pourtant c'est lui qu'Euros devait convaincre. Pour cela, Euros avait observé les marins du Sedna des mois durant, toujours dans l'ombre, en se gardant bien de dire ou de proposer quoi que ce soit sans apprendre à les connaitre. Elle voulait être sûre de mettre toutes les chances de son côté et pour cela elle avait de solides arguments.

Le Sedna se dressa finalement devant elle, de toute sa hauteur. Il était immobile, ou presque, à peine ballotté par la houle du port. Euros sentit son cœur battre à tout rompre tandis que ses yeux se posaient sur la silhouette du vaisseau. C'était son seul espoir de retrouver le Vent.

Elle prit une grande inspiration et cria :

- Puis-je avoir une audience avec le capitaine ? 

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⏰ Dernière mise à jour : Mar 20, 2022 ⏰

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