Je fixai le ciel, il me fixa en retour, et je compris qu'il était temps de me plonger dans mon rêve. L'imaginaire n'attendait pas, il m'aspirait en lui et me guidait dans mon idéal.
Il y avait un rêve que j'avais toujours voulu réaliser : celui de devenir poète.
Poète, ou slameur pour le dire de façon plus moderne. Malheureusement l'image du rap, du slam, était comme une photo que l'on avait roulée en boule puis dépliée : elle était toute froissée, et certains continuaient de lui donner des coups de ciseaux.
Moi, je voulais entendre le piano derrière moi, la batterie qui commençait à instaurer un rythme, et une guitare nuançant chacun de mes mots. Je voulais voir un public, qui ne criait pas des atrocités, mais qui pleurait sous le poids de mes propos. Je voulais qu'on entende ce que j'avais à dire, que mes textes fassent le tour du monde, qu'ils transmettent à chacun mes peurs et mes rires, et qu'au fin fond d'une île au milieu de rien, ils se sentent compris par l'air de mes refrains.
Le rap, c'est une rébellion, une révolte ! Ce n'est pas un sujet tabou, qui fait honte, c'est une musique marquante, qui doit changer les esprits, les ouvrir, et faire comprendre les choses dont le monde n'a pas pris la peine de se souvenir.
Être slameur, c'est être poète avant tout, et être poète, c'est maîtriser une langue et dompter des mots, c'est écrire en vers ce qui nous bouleverse, et faire rimer nos révoltes et nos fiertés. Être slameur, c'est prôner la liberté d'expression, c'est faire un discours sous les instruments et leurs acclamations, c'est être honnête avec ses valeurs, c'est écrire des phrases qui en jettent pour effacer ses peurs.
Je vous laisse imaginer la tête de mes parents si je leur disais que je voulais me convertir dans la chanson, et en plus dans ce genre avec une telle réputation... Jusque-là, je les laissais croire en mon avenir de grand homme et continuais à m'appliquer dans mes études. Si jamais ma carrière musicale ne prenait pas, alors j'aurai de multiples choix de reconversion, et si elle marchait, alors je serais un slameur instruit, je ne passerais pas des théorèmes aux paronomases, mais j'userais de mon savoir pour écrire des textes toujours plus poignants et proches du réel !
La question, celle que tout le monde se pose, c'est : "Comment ?".
C'est beau les rêves, ça donne le sourire, mais si on ne veut pas que la déprime nous atteigne, il faut vite répondre à la question. Une fois la réponse en bouche, il faut y croire, y croire plus que tout, parce que plus les convictions sont fortes, et plus elles deviennent réelles facilement.
Moi, pour réaliser mon rêve, je voulais me faire connaître pour mes textes, je voulais qu'on se dise en voyant mon nom : "Eh ! Ce serait pas le gars qui écrit trop bien ? Il a une plume de dingue, un vrai poète !". Contrairement à ce que l'on pourrait penser, je ne suis pas narcissique.
D'ailleurs, ce genre de pensées m'était totalement interdit auprès de mes parents. Ils me répétaient en boucle "Marcelin, sois fier de toi, mais jamais au point de t'en vanter, s'applaudir, c'est dire au revoir aux succès. »
C'était l'un des seuls points dont j'ai toujours été d'accord avec eux. Jamais je ne serai tourné vers moi-même, toujours vers les autres, je prônerai l'altruisme et la modestie. Ces valeurs, pourtant, n'allaient pas avec mon rêve. Être connu ne m'importait pas vraiment, mais comment vivre de ses mots sans l'être ? Et comment rester altruiste si l'on voulait le devenir ?
Je trouverai une solution, en attendant, il me fallait une réponse à la question. Sinon j'allais rester bloqué, et même si je tentais d'avancer je serai comme sur un tapis de course, à m'essouffler sans but, et à perdre mes moyens sans n'avoir rien parcouru.
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Rêveillé
Poetry« Qui êtes-vous ? - Une plume qui cherche à se détacher de sa cigogne. » Eux, le voient médecin ou avocat. Lui, se voit slameur et poète. Quand le monde réel est moins attrayant que celui de nos songes, pourquoi ne pas se plonger dans nos rêves pour...