Le paradoxe

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Le paradoxe de l'être humain. Où je m'efforçais, tous les dimanches, de retrouver la solution, la clef.

Alors j'engageais une danse, moi et l'écran, moi et les autres : moi contre le monde.

Une valse qui me rendais aveugle, qui m'empêchait de voir ce qu'il y avais juste là, à côté de moi : 

lui.

Je le regardais, il me regardais, nous nous regardions.

Et tout d'un coup je me rendais compte qu'il démarquais du papier peint.

Qu'il était là, oui, juste là, à m'attendre chaque dimanche, face à la même table, à la même tasse, le visage embuée dans la fumée que dégageait son café et ses cheveux qui avaient fait leur bataille quotidienne avec l'oreiller.

Sauf qu'aujourd'hui, aujourd'hui, je le remarquais : il se démarquait des lignes blanches et rectilignes du papier peint.

Il y avais cette chose si familière et inconnue dans son regard, qui me susurrait à l'oreille : « je suis à la maison ». À ce moment là, j'étais lui, il était moi, nous étions un.

Il a fallu 9 mois, 9 mois symbolique pour la naissance de cet amour, de cette danse, à deux.

Il avait délicatement posé un miroir devant moi, une toile transparente, réfléchissant ma silhouette, et criant ce que je suis : moi.

Il m'avais fait découvrir mon être, mon inconnue n'en était plus une : j'était pleine et entière dans cette danse et je me reconnaissait dans ses yeux comme lui dans les miens.

Voilà ce que c'était,

La clef.

Un miroir, objet pourtant anodin, que l'on pose dans le recoin d'une pièce pour vérifier que nous sommes présentables quand l'on s'apprête à rejoindre la société.

Pourtant anodin.

Et pourtant si précieux.

Le miroir, un simple reflet.

Un reflet qui hypnotisait Narcisse, pourtant.

Un autre monde.

En allant au cinéma, chaque dimanche, je me regardais dans le miroir.

Je prenais du temps à parcourir les moindres lignes que définissait ma silhouette, mon corps, mes traits, mes rides et les nombreux creux qui se trouvaient en relief sur ma peau.

Et enfin, mon regard.

Je l'étudiais, avec parcimonie : j'en découvrais la courbe si familière, la couleur si profonde...

Mais il y avais toujours quelque chose qui me bloquait dans mon étude : le fait de ne pas pouvoir cerner le mystère que reflétait ma pupille.

Alors j'allais au cinéma. Pour me calmer dans le jeu des émotions.

Et lui il était là,

Comme quand vous cherchez vos lunettes alors qu'elles se trouvent à l'endroit où elles devaient se trouver.

Et ce matin là, je l'avais vu : et un miroir m'était apparu : et mon rêve à la fois étrange et familier prenait vie.

Je pense que les personnes que l'on aime sont des miroirs, elle nous aide à nous connaître, à nous faire passer de l'inconnu au familier, avec le temps, nous laissant auparavant dans le doute, dans le paradoxe.

Je pense que nous sommes chacun le miroir de quelqu'un.

Et quand les âmes se croisent, se mêlent et s'entremêlent, une danse s'engage, à deux. 

Une danse à deuxWhere stories live. Discover now