Lorsque je sors du restaurant, mon premier réflexe est de frissonner. Autour de moi, la nuit glaciale me crispe le corps et me gèle tant la gorge que je me dépêche de la recouvrir d'une jolie écharpe appartenant à Karine.
Derrière-moi, les lumières du café s'éteignent et j'entends le vrombissement de la voiture de Layla qui démarre. Jean doit être en train de rentrer dans son appartement, celui qui se situe au-dessus des Tiges d'Anis, et la serveuse rentre chez elle après sa nuit bien chargée.
Ma trachée se glace à chaque inspiration, je sens mes dents trembler tandis que je sers la mâchoire en me demandant si c'est à cause du froid ou des sentiments indéfinissables qui m'envahissent.
Apparaissant à la lumière des lampadaires, à nouveau, encore, soudainement, pour la troisième fois et pour le troisième soir de suite, j'aperçois une silhouette masculine qui se découpe dans l'obscurité.
Je n'ai pas besoin de réfléchir très longtemps pour savoir qu'il s'agit d'Arthur.
— Hey !, le salué-je avec un petit sourire, en me rendant compte que j'attendais intérieurement sa venue.
Il lève la main en guise de salut.
— Je vais commencer à croire que tu viens exprès pour me voir, ce n'est pas logique, sinon !, blagué-je.
Mais mon sourire disparaît lorsqu'Arthur se rapproche un peu plus de moi et que je remarque sa joue enflée et la trace de coup au niveau de son menton.
Je ne sais pas pourquoi, mais quelque chose me dit qu'il ne s'est pas fait mal en trébuchant, cette fois-ci.
Le jeune homme doit apercevoir mon trouble, parce qu'il se gratte la tête en m'interrogeant.
— Est-ce que tu sais si Jean est encore dans le restaurant ?
Je le fixe un instant sans répondre, et en regardant le sol, je marmonne.
— Qu'est-ce qu'il s'est passé ?
L'air serein et désinvolte du garçon disparaît soudainement, pour laisser place à un visage angoissé et à des yeux terrorisés.
— Il m'a giflé, avoue-t-il d'une petite voix rauque.
Je comprends immédiatement qu'il parle de son père.
J'attrape doucement sa main en guise de soutien, tandis que le garçon raconte d'une voix perturbée.— Il s'est énervé parce que son patron lui a rajouté des heures supplémentaires non payées, je... je crois... et puis, il a reçu un appel du lycée qui lui a appris que j'avais séché mon heure de colle, alors il a... voilà...
Il cherche dans mes yeux une réponse, et je cherche dans les siens quelque chose à dire, mais je ne trouve rien.
Je me sens inutile face à cette situation.— C'est vrai que j'avais séché la fin de la colle, balbutie le garçon, mais puisque tu es partie si précipitamment sans rien dire tout à l'heure et que Liam est aussi parti après avoir reçu un message, je voulais pas rester seul... je...
— Eh, c'est pas grave, le coupé-je gentiment en voyant qu'il commençait à paniquer.
Je jette un coup d'œil par dessus son épaule.
— Ton père t'a laissé t'en aller sans rien dire ?
J'avoue que je me sentirais plutôt en insécurité s'il s'avérait que cet homme-là l'avait suivi.
— Ouais, bredouille Arthur, il m'a même dit "Casse-toi chez ton deuxième papounet Jean le Con, ça me fera des vacances".
J'ouvre la bouche et la referme, en me mordant la langue.
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Reflection
ParanormalIl n'est inconnu de personne que chaque être humain cache en lui une part de monstruosité... Mais à quel degré ? Vous, comment feriez-vous pour savoir à quel point vous êtes une personne méprisable ? Lou Shroud est une lycéenne au joli petit sourir...