Chapitre 2

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Le soleil n'avait pas encore pointé le bout de son nez que déjà Aragorn était réveillé, ses yeux bleu océan grands ouverts fixant le large plafond blanc de la chambre qui lui avait été désigné dans la belle demeure d'Elrond. Cela faisait un certain temps maintenant qu'il restait ainsi immobile et il ne voulait pas descendre voir si quelqu'un d'autre était debout, car il voulait rester seul un moment, avant le long périple qui l'attendait.
Il essayait de faire le vide dans son esprit, de ne penser à rien, de se laisser aller. Le calme avant la tempête.
Avec un long et profond soupir, son regard quitta la surface plane aux moulures argentées pour venir se poser sur la vue qui s'offrait à lui de par la grande fenêtre qui illuminait faiblement l'intérieur. Elle donnait sur une cour à la terre brune, ferme et plate, et entourée d'arbres hauts et de plantes vertes, fleurs colorées mouillées par la rosée du matin. Quelques oiseaux y étaient perchés, chantant doucement et gaiement. Ce son délicat parvenait jusqu'aux oreilles d'Aragorn, de même que le bruit des eaux bouillonnantes et écumeuses d'un lac qui s'étendait sur quelques milles. L'endroit avait un effet reposant et bienfaiteur sur toute personne qui y pénétrait. C'était pour cela que l'Homme aimait Fondcombe, ou Imladris de son nom elfique.
C'était là que s'était tenu, il y a des jours, le fameux conseil d'Elrond. C'était à partir de cet instant que tout avait commencé...cette alliance. La Communauté de l'Anneau, comme ils l'avaient nommée. Depuis ce jour, le rôdeur le savait, il s'était enrôlé dans une situation dont il ne pouvait plus sortir désormais. Il ignorait ce qui l'attendait, mais il était sûr que cela n'allait pas être une partie de plaisir.
Sortant de ses pensées, Aragorn discerna une ombre qui se dessinait dans la vaste cour, la traversant lentement. Il reconnut aussitôt Gandalf le Gris. Après courte réflexion, il décida de partir le rejoindre.
Le magicien avançait, bâton à la main, pipe au bec. Quand Aragorn arriva jusqu'à lui, il s'arrêta et s'appuya sur son bâton.
-Bonjour à vous, cher ami! lança-t-il.
Le rôdeur sourit faiblement et s'approcha.
-Bonjour, Gandalf. Vous voilà éveillé de bonne heure! remarqua-t-il.
-J'allais vous dire la même chose, répliqua le magicien.
Aragorn ne répondit rien et regarda son ami tirer longuement sur sa pipe.
-Quelque chose vous tracasse, me semble-t-il, reprit Gandalf après avoir souffler la fumée prenant une forme ovale. Venez avec moi.
Sans broncher, Aragorn hocha la tête et tout deux se mirent en route, sans but précis. Pendant un moment, personne ne parla. Ils traversaient le domaine d'Elrond en silence, en tombant de temps à autre sur un Elfe qui passait par là.
-Savez-vous par où il conviendrait que nous partions ce soir? demanda finalement Aragorn.
-En quelque sorte, répondit Gandalf avec un sourire énigmatique.
L'Homme le fixa pour l'inciter à continuer.
-Nous prendrons la direction du Sud, dit Gandalf. Par delà les montagnes du Pays Sauvage. Vous verrez en temps voulu; mais la route est longue jusqu'au Mordor.
-Donc, nous y allons tous, fit Aragorn alors qu'ils se baissaient sous une branche basse qui leur barrait la route.
-Peut-être...ou pas, dit Gandalf.
Cela ne sembla pas rassurer Aragorn. Il s'inquiétait. Le Mordor n'était pas un endroit où l'on entrait et sortait facilement. Et puis, il se trouvait très loin.
-Ne vous inquiétez pas, mon cher ami, lui dit Gandalf. Je suis avec vous.
***
Le soir tombait. Il faisait froid et gris. Le vent d'est ruisselait à travers les branches dénudées et s'agitait dans les pins noirs des collines. Des nuages déchiquetés couraient dans le ciel, sombres et bas. Aragorn, enfermé dans sa chambre, rassemblait ses affaires. Il glissa son épée, Anduril, dans son fourreau et l'accrocha à sa ceinture.
Fin prêt, il contempla une dernière fois la pièce. Ses yeux s'arrêtèrent sur le petit pendentif bleu-argenté qui brillait sur son lit. Le collier de Legolas. Délicatement, Aragorn le prit entre ses mains et l'examina. Il était légèrement différent de celui d'Arwen, et il sentait comme l'Elfe qui lui avait donné; la vanille et le bois de sental.
Il semblait si fragile...et était étonnamment tiède. Enivré, il le porta à ses lèvres. Une douce chaleur s'y répandit. Puis, il se ressaisit et passa le pendentif autour de son cou et sortit de la chambre, après un dernier regard.

La Compagnie s'était rassemblée dans la cour aux dernières lueurs du jour. Elrond était avec eux, les pourvoyant d'épais et chauds vêtements. Un stock de provisions et de couvertures les attendait. Quand tout fut chargé, ils firent leurs adieux et quand Gandalf arriva enfin, Elrond parla.
-Voici mon dernier mot. Le porteur de l'Anneau part en quête de la Montagne du Destin. C'est sur lui seul que pèse une responsabilité: ne pas rejeter l'Anneau, ni le remettre à aucun serviteur de l'Ennemi, ni en fait le laisser toucher par quiconque d'autre que les membres de la Compagnie et du Conseil, et cela seulement dans le cas de la plus urgente nécessité. Les autres l'accompagnent comme compagnons libres pour l'aider en route. Vous pouvez rester, ou revenir, ou vous écarter dans d'autres chemins, selon l'occasion. Plus loin vous irez, moins il vous sera facile de vous retirer; cependant, aucun serment ni aucune obligation ne vous oblige à aller plus loin que vous ne le voudrez. Car vous ne connaissez pas encore votre force d'âme, et vous ne sauriez prévoir ce que chacun pourra rencontrer sur la route.
Aragorn hocha la tête. Il se sentait prêt.
Toute la maisonnée d'Elrond était sortie leur dire au revoir. Il n'y avait ni rires, ni chansons, ni musique. Chacun prit un sac et alors que le ciel devenait noir, ils s'en furent et disparurent silencieusement dans l'obscurité.

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⏰ Dernière mise à jour : Jul 16, 2015 ⏰

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Hannon LeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant