14 avril : l'enterrement

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14 avril 2022,

PDV ALIX :

Aujourd'hui c'est le grand jour, nous sommes sur la route pour rejoindre le cimetière où mon grand-père sera enterré. Le trajet est pesant, personne ne dit un mot. Je durcis mon visage pour ne pas laisser échapper les quelques larmes de mes yeux. Je déglutis en entendant qu'à la radio, ils viennent de passer sa chanson préférée. Mon grand-frère assis sur le siège passager en face de moi baisse le son, nous ne sommes pas d'humeur à écouter ce genre de musiques, surtout pas aujourd'hui.

La route est plus longue que d'habitude, mais pas parce qu'il y a des travaux qui nous retardent ou quoique ce soit d'autre, simplement que nous ne sommes jamais préparés à ce genre d'éventualités. Nous sommes souvent pris au dépourvu parce que la mort n'attend pas, elle rentre de plein fouet dans la maison et ne prend même pas la peine de toquer. Elle vient s'immiscer au repas de famille pour tout chambouler sur son passage. Elle s'installe dans le confort de vie qu'on s'était créé, s'assoie sur notre canapé, et nous regarde droit dans les yeux comme pour nous défier.
"Êtes-vous capable de surmonter la perte d'un être aimé ?"
La mort n'est pas une fin en soit, mais elle est le commencement d'une chose qu'on ne connaît pas. L'inconnu.

Des milliers de gens meurent au moment même où j'ecris ces lignes sur ma feuille avec mon critérium, mais est-ce que j'ai l'air de m'en préoccuper ? On a l'allure d'une famille soudée qui surmonte des épreuves difficiles aux yeux du monde, mais la vérité et que nous faisons juste semblant de nous apprécier. Nous sommes les propres acteurs de nos vies qui endossons le rôle de la famille parfaite au quotidien. Je jette des regards aux voitures d'à côté.

"Pour d'autres on s'était déjà préparés au pire, mais certains partent sans prévenir." pensais-je à voix basse.

il fait si noir aujourd'hui,
le ciel n'a jamais été aussi gris.
les nuages sont en colère et déversent peu à peu leur rage sur moi,
ils sont un miroir,
alors je m'y plonge dans l'espoir d'y voir apparaître un bel arc en ciel.

je rêve d'effacer nos cicatrices et de revoir ses lèvres s'élargir,
appercevoir les rides sur son visage qui trahissaient son âge,
ses cheveux gris qui au fil des années se mélangeaient au blanc,
avec son vieux gilet usé qu'il portait souvent,
et ses lunettes qui lui donnaient un air sévère alors qu'il était sincère.

Je serre fermement le carnet où j'ai inscrit ce poème contre ma poitrine, en priant pour que lui aussi, ne disparaisse pas.

La voiture s'arrête, nous sommes enfin arrivés devant le cimetière. Les grilles du portail sont ouvertes pour célébrer cette triste cérémonie, je regarde toutes les voitures qui sont garées en face en espérant trouver une tête qui me soit familière dans la foule.

Nous avançons vers l'endroit qui sera sa nouvelle maison.

Lorsque le discours a commencé ; ma grand-mère s'est effondrée au sol en sanglotant devant sa tombe, elle criait :

- "Ne le laissez pas partir !"

Elle hurlait de douleur, le visage crispé.

Mon frère la tenait fermement pour qu'elle ne puisse pas tomber car à chaque pas elle manquait de s'écraser sur le sol. Il lui caressait l'épaule pour la réconforter dans l'espoir de l'apaiser. Lui qui ne laissait rien paraître habituellement, avait finalement fini par craquer en assistant à cette scène.

Laisse tomber la pluieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant