13h53 : au centre de l'attention

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Chapitre 2 : "Au centre de l'attention"

1er Octobre 2021.

Nous sommes le 1 er Octobre 2021, cela fait maintenant quatre mois que Tom nous a quittés. Au lycée depuis la rentrée, tous les élèves ne parlent que de cet incident qui a soi-disant "entaché l'image de l'établissement." Pour camoufler ce tragique évènement, des cours de prévention ont été mis en place pour évoquer le suicide, qui est la première cause de mortalité chez les adolescents, puis pour poursuivre des psychologues ont également été mis à la portée de tous les élèves qui en ressentent le besoin.

- Ils croient qu'avoir collé des affiches de prévention un peu partout dans les couloirs arrangera vraiment les choses ? Soupira Alexia, exaspérée face à la situation,

- Il faudrait peut-être déjà penser à remettre en cause tout le système éducatif qui est une grande source de stress pour beaucoup d'étudiants, ça réduirait quelques pourcentages. Il faut s'attaquer à la source du problème, et l'école en est un pour beaucoup d'entre nous, affirma Maxence d'un ton sérieux. Il connaissait le sujet.

Je les écoutais parler sans vraiment m'imiscer dans leur discussion, c'était un sujet sensible pour moi et ils le comprenaient. Dans un premier temps, ils avaient supprimé le mot "suicide" de n'importe quelle de leur discussion pour ne pas me brusquer, mais après une longue conversation tous les trois, je leur ai dit qu'il n'y avait pas d'intéret à faire comme si rien ne s'était passé, ça s'est produit, et je ne veux plus vivre comme si de rien n'était.

Alexia a été la première à venir vers moi à la rentrée, elle n'était même pas au courant que j'avais connu Tom, elle est venue spontanément vers moi sans arrière-pensée et c'est une caractéristique que j'apprécie beaucoup chez elle. Elle formait un duo comique avec Max'. Ils sont tous les deux décrontactés, on peut parler de tout sans problèmes avec eux. Dans un certain sens, ils m'ont aidé à m'accepter comme j'étais car on partageait les mêmes différences qui nous liaient. Je finis par prendre part à la discussion.

- On va dire que ça part d'une bonne attention, il ne faut pas en demander trop avec le personnel du lycée, ils n'en auraient jamais parlé si ça n'était pas arrivé à un de leurs élèves.

- Tu marques un point, répondit Max.

- J'ai toujours raison si tu m'écoutes bien, plaisantais-je.

- Ne prends pas trop la confiance non plus s'exclama Alexia en me tapant légerement l'épaule. Je ne voudrais pas interromprendre notre très chère princesse Léa, mais il serait temps qu'on aille en cours car ça ne va pas tarder à sonner.

- Tout mais pas ça ! j'ai pas envie de subir les châtiments de notre professeure d'espagnol si on arrive encore en retard alors que c'est le début de l'année, se plaigna Maxence.

Nous marchions en même temps que l'on discutait.

- Cette professeure est vraiment effrayante. La dernière fois je l'ai surprise en train de parler toute seule dans les couloirs du lycée, répondis-je.

La sonnerie retentit ce qui mis fin à notre conversation, nous étions devant la salle en attendant que tous les précèdents élèves finissent de sortir. Nous nous sommes installés et le cours a commencé normalement, les heures ont défilé plus ou moins rapidement, puis la sonnerie du midi résona dans tout l'établissement pour annoncer la fin des cours. J'observais Alexia du coin de l'oeil qui s'empressa de ranger ses affaires puis de sortir de la salle en précipitation. Je supposais donc par la mine paniquée qu'elle affichait, qu'elle avait quelque chose d'urgent à régler, probablement par rapport à son petit frère. Il est nouveau dans notre lycée et il a eu énormément de mal à s'intégrer, on pourrait croire que les mentalités du lycée sont plus évoluées mais ça n'empêche pas de subir des remarques déplacées de la part de ses camarades, et ça a été son cas.

Alexia a perdu sa mère il y a trois ans, elle a dû se débrouiller seule avec son père pour subvenir aux besoins de toute sa famille en enchainant les petits boulots de droite à gauche. Elle a acquis une grande maturité à cause de ce deuil qu'elle n'a jamais vraiment eu le temps de faire, le jour où elle m'en a fait part, j'ai pleuré toutes les larmes de mon corps à sa place. On aurait dit que c'était moi qui avais perdu ma mère ce jour-là. Alexia était forte, je l'ai très vite compris.

Après avoir rangé mes affaires je me dirigea vers le fond de la salle, où était installé Maxence. Il s'était endormi durant le cours, affalé sur sa table avec un filet de bave qui dégoulinait de sa bouche. Je cria brusquement pour le faire réagir.

- Mais ça va pas d'hurler dans mes oreilles aussi fort ? s'exclama t-il.

- Max' tu me connais, tu sais très bien que la douceur c'est un mot qui me définit parfaitement.

On se mit à rire mutuellement puis nous sortimes de la salle d'espagnol, la professeure me fixait avec des gros yeux après avoir assisté à ce spectacle lorsque nous sommes sortis de la salle.

- On aurait dit que ses yeux allaient sortir de leurs orbites, c'est vraiment une sorcière !

- Au moins elle a pas besoin de se déguiser pour halloween, c'est rentable, répondis-je.

- Simple formalité pour ne pas passer pour un meilleur ami excécrable, mais elle est passée où Alexia ?

- Je l'ai vue sortir de la classe en courrant, je pense que son petit frère lui a envoyé un message pendant le cour et qu'il a des ennuies.

- Je ne sais pas comment elle fait pour supporter la pression des cours, de son deuil, et de la vie d'adulte qu'elle subit à ses dépends. Je connais Alexia depuis six ans, et je ne l'ai jamais vue pleurer une seule fois.

- Elle ne montre pas ses émotions parce qu'à la maison on lui a assigné le rôle de la deuxième maman, mais j'ai peur qu'elle finisse par craquer un jour ou l'autre. Je la vois un peu comme une bombe à retardement, et quand elle explosera elle finira par tout emporter sur son passage.

Après cette sérieuse discussion nous avons passé le reste de la journée dans le parc à coté de notre lycée, c'était le point de rassemblement. Alexia nous a rejoint une heure plus tard et a assisté à une de mes nombreuses chutes en skate, j'essayais de m'entrainer mais mon cruel manque d'équlibre me fit dégringoler sur le sol.

- Franchement c'est une superbe entrée que tu me fais là, Lélé ! Elle se mit à rire en me voyant me rétamer par terre.

- Ne m'appelle plus jamais comme ça, tu sais que je déteste ce surnom.

- Ok, Lélé.

- J'abandonne la vie, au revoir.

Maxence me traitait de succeptible suite à ma réaction, ce qui a également le don de m'agacer.

- Il y a des tensions dans l'air, pour régler ça je propose qu'on aille à la soirée qu'organise Isaac ce soir.

- Toi, tu as une idée derrière la tête, répondit Max.

- Je sais que ça ne va pas te plaire Léa, mais Isaac aimerait te parler.

- Il compte enfin s'excuser ? s'amusa Max.

- Je vais peut-être t'arranger un rendez-vous avec lui finalement, nan c'est vrai, mais deux idiots ensemble ça fonctionne carrément en fait, répondis-je d'un ton sarcastique.

- C'est à propos de Tom, Isaac a appris quelque chose sur lui.

L'atmosphère était devenue tout de suite plus lourde et tendue. L'air devenait irrespirable et consumait mes poumons à l'entente de son prénom. L'évocation de son souvenir avait des répercussions physiques sur mon corps, soudainement je devenais incapable d'aligner deux mots. Je me retrouvais confuse face à la situation qui se déroulait sous mes yeux.

Laisse tomber la pluieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant